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Lettre sur la manière de faire des statistiques De l’importance dont Paris est à la France


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Continuant donc à faire ma supputation sur la lieue quarrée que je me suis proposée pour base de ce système : je suppose, comme j’ai déjà dit, qu’il y a dans chaque lieue quarrée cinq cents cinquante personnes de tout âge et de tout sexe, et que quatorze personnes consommeront par an un minot de sel ; c’est ce que l’ordonnance leur donne. Il leur faudra donc par an pour le pot et la salière seulement, quarante minots de sel, qui porteront à dix-huit livres le minot, sept cents vingt livres. Or il y a trente mille lieues quarrées dans le royaume ; il y faut donc tous les ans douze cents mille minots de sel. On y peut encore ajouter hardiment cent mille minots, tant pour les salaisons des beurres et viandes, que pour les bestiaux. Ce qui fera au moins treize cents mille minots.

Je suppose que le roi tirera de chaque minot ces dix-huit livres quittes de tous frais, par les raisons ci-devant exprimées. Donc ces treize cents mille minots feront un fonds net toutes les années de vingt-trois millions quatre cents mille livres au moins.

Dans les temps de guerre, et quand on sera pressé, on pourrait augmenter le prix du minot de vingt sols, de quarante sols, ou de quatre livres à la fois, en sorte néanmoins qu’il ne passe jamais trente livres ; parce que dès qu’on le vendra plus cher, les paysans n’en donneront plus aux bestiaux, et beaucoup de gens s’en laisseront manquer. Outre qu’il faut toujours avoir égard à la dîme royale des deux premiers fonds, lesquels chargeant de leur côté comme le sel du sien, feraient bientôt trop sentir leur pesanteur, si on la poussait plus loin.

Il y a une chose de grande importance à observer sur cet article, qui est que comme il se consomme beaucoup de sel pour les salaisons des morues, harengs et autres poissons à Dieppe, et aux autres ports de mer ; s’il fallait que ceux qui font ces salaisons, achetassent le sel à dix-huit livres le minot, on ruinerait le commerce du poisson salé qui se fait dans le royaume, et il passerait tout entier aux Anglais et aux Hollandais, lesquels font pour l’ordinaire ces salaisons du sel de Saint Hubés au Portugal, qui ne leur coûte presque rien.

C’est pourquoi il est du bien de l’État de continuer de donner à ceux de Dieppe et autres villes maritimes qui font pareil commerce, le sel au prix accoutumé pour ces salaisons : en prenant les mêmes précautions qu’on prend aujourd’hui pour empêcher que les habitants de ces villes et lieux n’en mésusent, ou telles autres qu’on jugera les plus con-venables.

Supposant donc que tout le royaume se puisse peu à peu réduire à ce prix, je mettrai ici le troisième fonds, pour le premier et plus bas pied, à la somme ci-dessus calculée de vingt-trois millions quatre cents mille livres ; laquelle augmentera bien plutôt qu’elle ne diminuera, à cause de la plus grande consommation qui s’en fera. Mais on peut compter surement que le peuple y gagnera le double, non seulement par le rabais du sel, mais encore, parce qu’il sera délivré de tous les frais et friponneries qui se font dans le débit.

Une considération importante qu’on doit toujours avoir devant les yeux, est que le sel est nécessaire à la nourriture des hommes et des bestiaux, et qu’il faut toujours l’aider et le faciliter, sans jamais y nuire, par quelque raison que ce puisse être.

Total de ce troisième fonds, vingt-trois millions quatre cents mille livres, ici : 23 400 000 livres.


QUATRIEME FONDS - Revenu fixe.
Je compose le quatrième fonds d’un revenu que j’appellerai fixe ; parce que je suppose que les parties qui le doivent former, seront, ou doivent être presque toujours sur le même pied.

La première contiendra les domaines ; les parties casuelles ; les droits de franc-fief et d’amortissement ; les amendes, épaves, confiscations ; le convoi de Bordeaux ; la coutume de Bayonne, la ferme de Brouage ; celle du fer ; la vente annuelle des bois appartenant au roi ; le papier timbré ; le contrôle des contrats, qui serait très utile si on les enregistrait tous entiers, au lieu qu’on n’en fait qu’une note qui deviendra inutile avec le temps ; le droit de ce contrôle modéré, parce qu’il est trop fort, et qu’il est nécessaire à la société civile de passer des contrats. Le contrôle des exploits ; les postes, ou le port des lettres modéré d’un tiers, et fixé de telle manière qu’il ne soit pas arbitraire aux commis de les surtaxer, comme ils font notoirement presque partout, ce qui mériterait bien un peu de galères.

La seconde contiendra les douanes mises sur les frontières tant de terre que de mer, pour le paiement des droits d’entrée et de sortie des marchandises, réduits par le conseil du commerce sur un pied tel qu’on ne rebute point les étrangers qui viennent enlever les denrées que nous avons de trop, et qu’on favorise le commerce du dedans du royaume autant qu’il sera possible.

La troisième sera formée de certains impôts, qui ne seront payés que par ceux qui le veulent bien ; et qui sont à proprement parler la peine de leur luxe, de leur intempérance, et de leur vanité. Tels sont les impôts qu’on a mis sur le tabac, les eaux de vie, le thé, le café, le chocolat, à quoi on en pourrait utilement ajouter d’autres sur le luxe et la dorure des habits, dont l’éclat surpasse la qualité, et le plus souvent les moyens de ceux qui les portent. Sur ceux qui remplissent les rues de carrosses à n’y pouvoir plus marcher, lesquels n’étant point de con-dition à avoir de tels équipages, mériteraient bien d’en acheter la permission un peu chèrement ; ainsi que celle de porter l’épée à ceux qui n’étant ni gentilshommes ni gens de guerre, n’ont aucun droit de la porter. Sur la magnificence outrée des meubles ; sur les dorures des carrosses, sur les grandes et ridicules perruques, et tous autres droits de pareille nature, qui judicieusement imposés, en punition des excès et désordres causés par la mauvaise conduite d’un grand nombre de gens, peuvent faire beaucoup de bien, et peu de mal.

En voici un autre dont je ne fais point de compte, mais qui pourrait être pratiqué avec une très grande utilité. Il y a dans le royaume environ trente-six mille paroisses, et dans ce nombre de paroisses, il n’y a pas moins de quarante mille cabarets, dans chacun desquels il se pourrait débiter année commune, quinze muids de vin, de cidre, ou de bière, selon les pays, à ceux qui y vont boire, s’il arrivait un temps plus favorable au peuple. Supposant donc les aides supprimées, ce ne serait pas leur faire tort, que d’imposer trois livres dix sols sur chaque muid de vin bu dans le cabaret, et non autrement ; et sur le cidre et la bière à proportion ; cela ne reviendrait qu’à un liard la pinte, et pourrait en produisant un revenu considérable, qui irait à plus de deux millions, contenir un peu les paysans, qui les jours de dimanches et de fêtes, ne désemplissent point les cabarets, ce qui pourrait peut-être obliger les plus sensés à demeurer chez eux. Mais il faudrait toujours distinguer ce qui serait bu au cabaret, de ce qui serait livré au dehors à pot et à pinte, qui doit être exempt de cet impôt.

J’estime que les trois premières parties ci-dessus bien recherchées et jointes ensemble, produiront annuellement, à les beaucoup modérer, au moins dix-huit millions de livres, que je considère comme un revenu fixe qu’on laisserait toujours à peu près au même état, pour ne rien déranger au commerce, ni à la commodité publique, pour laquelle il faut toujours avoir de grands égards, par préférence à toutes autres choses : ici : 18 000 000 livres.

De sorte que ces quatre fonds généraux joints ensemble, rendront année commune la somme de cent seize millions huit cents vingt-deux mille cinq cents livres, laquelle pourra être augmentée suivant les besoins de l’État, par degrés dans une proportion juste, et toujours suivie, qui ne souffrira aucune confusion, ainsi qu’il se verra ci-après dans la seconde partie de ces mémoires. Sur quoi il est à remarquer que les trois premiers fonds étant susceptibles d’augmentation, pourront être augmentés proportionnellement, mais le quatrième non ; parce qu’il contient des parties qui ayant rapport au commerce, pourraient le troubler, et causer de l’empêchement aux consommations ; ce qu’il faut éviter. C’est pourquoi dans les tables suivantes, nous proposerons chaque augmentation du premier dixième des trois premiers fonds, le quatrième demeurant toujours au même état, par la raison que dessus.

SECONDE PARTIE


Après avoir établi les fonds qui doivent composer celui de la dîme royale, j’ai cru qu’il était à propos de mettre à la tête de cette seconde partie une table, comme je l’ai promise, qui serve à fixer avec facilité la quotité de cette dîme selon les nécessités de l’État, depuis le vingtième jusqu’au dixième. Ce qui est déjà un très grand avantage pour la levée des deniers publics, qu’on puisse savoir avec quelque précision ce que chaque fonds doit produire.

Il faut observer trois choses sur cette table.

La première, que nous appelons premier fonds, la grosse dîme. Second fonds, l’industrie. Troisième fonds, le sel. Et quatrième fonds, le revenu fixe.

La seconde, qu’après le revenu simple exposé une fois, tous les fonds seront réduits en un, auquel sera ajouté le premier dixième des trois premiers, dans les dix articles suivants.

Et la troisième, que si au lieu du dixième on les voulait augmenter seulement d’une vingtième partie, ou d’une trentième ; cela se pourra avec la même facilité, en suivant la même méthode.

CHAPITRE 1


Au surplus, que l’estimation des revenus de l’État, selon ce nouveau système, telle qu’elle vient d’être supputée, soit trop forte ou trop faible à plusieurs millions près, cela n’est d’aucune conséquence ; parce que tous les calculs qu’on en a faits ne sont à proprement parler que des modèles et des essais pour faire connaître le système en lui-même : et que la quotité de cette dîme royale se peut hausser ou baisser selon les besoins de l’État.

Au reste, il serait superflu de pousser ces augmentations plus loin par trois raisons.

La première, que tous les revenus du roi avec tous les extraordinaires qu’on a pu y ajouter pendant cette dernière guerre, n’ont point été à plus de cent soixante millions de livres ; fonds suffisant pour soutenir la prodigieuse dépense que le roi était obligé de faire, pour défendre l’État contre toutes les forces de l’Europe, s’il avait pu être continué.

La seconde, que cette somme fait presque le tiers de l’argent monnayé du royaume ; et par conséquent qu’il n’est pas possible qu’elle entre plusieurs années de suite dans les coffres du roi, sans altérer le commerce, qui ne peut subsister, si l’argent ne roule incessamment.

La troisième, qu’il est évident par tout ce que j’ai dit, que cette quotité des subsides, quoique répartie avec une grande proportion, ne pourrait être poussée plus loin sans ruiner les peuples, principalement ceux qui n’ont point d’autre revenu que celui de leur industrie, et du travail de leurs mains, lesquels seraient accablez et réduits à la mendicité, qui est le plus grand malheur qui puisse arriver à un État ; car la mendicité est une maladie qui tue dans fort peu de temps son homme, et de laquelle on ne relève point.

C’est pourquoi je crois devoir encore répéter ici, qu’au cas que ce système soit agréé, il faudra bien prendre garde à ne pas pousser la dîme plus haut que le dixième, et même n’en approcher que le moins qu’il sera possible. Parce que la dîme royale levée au dixième, emporterait deux sols pour livre, en même temps que la dîme ecclésiastique et les droits seigneuriaux en enlèvent autant ; et que le sel de son côté en tirera à soi pour le moins deux autres, ce qui joints ensemble reviennent à six sols pour livre, dont le roi profitant de quatre pour la dîme et le sel, et le clergé et les seigneurs de deux, il ne restera plus que quatorze sols pour la part du propriétaire et de son fermier, sur quoi il faut faire tous les frais du labourage. De sorte que la dîme étant élevée jusqu’au dixième des fruits de la terre, on doit compter que le propriétaire ne jouirait que du tiers du revenu de sa terre, son fermier de l’autre, et le roi, l’église et les seigneurs de l’autre, ce qui serait un joug bien pesant, qu’on doit éviter d’imposer tant qu’on pourra, et soutenir toujours la dîme royale le plus près du vingtième qu’il sera possible ; se persuadant que si une fois l’État est débarrassé de toutes les charges inutiles dont il est accablé, et acquitté de ses dettes, que la dîme des fruits de la terre au vingtième jointe aux trois autres fonds, sera plus que suffisante pour fournir à toutes les dépenses nécessaires de l’État, tant qu’il ne sera question de guerre.


CHAPITRE 2
Pour peu qu’on veuille s’appliquer à bien examiner ce système, il sera facile de se convaincre qu’il est le meilleur, le mieux proportionné, et le moins sujet à corruption qui se puisse mettre en usage.

C’est un moyen sûr de subvenir aux nécessités de l’État pour grandes qu’elles soient, sans que le roi soit jamais obligé de créer aucune rente sur lui ; ni qu’il ait besoin du secours de la taille, ni des aides, ni des douanes provinciales, ni d’aucunes affaires extraordinaires, telles qu’elles puissent être ; non pas même de la part qu’il prend dans les octrois des villes du royaume, dont les murs, aussi bien que les portes et autres édifices publics, dépérissent depuis qu’on a ôté les moyens de les entretenir.

Ce moyen est encore sûr pour l’acquit des dettes de sa majesté ; pour le rachat des engagements de la couronne, et pour le remboursement des charges de l’État ; même des rentes créées sur l’hôtel de ville de Paris, qu’il est bon de diminuer le plus qu’il sera possible.

Enfin il remettra en valeur les terres qui sont venues à un très bas prix ; et on doit s’attendre que son exacte observation ramènera l’abondance dans le royaume, parce que les peuples qui ne craindront plus la surcharge des tailles personnelles, comme il a déjà été dit, travailleront à qui mieux mieux. D’où s’ensuivra encore nécessairement qu’avant qu’il soit peu, les revenus du roi et ceux des particuliers s’augmenteront notablement ; et que le royaume, dont le peuple est fort diminué, se repeuplera bientôt, attendu qu’il s’y fera beaucoup de mariages ; que les enfants y seront mieux nourris par rapport à la faiblesse de leur âge, et les paysans mieux vêtus. Les étrangers même viendront s’y habituer, quand ils s’apercevront du bonheur de nos peuples, et qu’ils y verront de la stabilité. La pauvreté sera bannie du royaume ; on n’y verra plus les rues des villes, et les grands chemins pleins de mendiants, parce que chaque paroisse se trouvera bientôt en état de pouvoir nourrir ses pauvres, même de les occuper. Le commerce de province à province, et de ville à ville, se remettra en vigueur quand il n’y aura plus ni aides ni douanes au dedans du royaume ; ce qui fera que la consommation sera d’autant plus grande qu’elle sera plus libre. D’où naîtra l’abondance des denrées de toutes espèces, laquelle venant à se répandre par tout le royaume, se fera bientôt sentir jusque sur les côtes, où elle facilitera encore le commerce étranger. Et comme les peuples cesseront d’être dans l’état misérable où ils se trouvent, et qu’ils deviendront plus aisés, il sera bien plus facile d’en tirer les secours nécessaires, tant pour les fortifications de la frontière, que pour les ouvrages des ports de mer, sûreté des côtes, et entreprises de rendre navigables quantité de rivières, au très grand bien des pays qui en sont traversés ; les arrosements des pays qui en ont besoin ; le desséchement des marais ; les plantations des bois et forêts où il en manque ; le défrichement de ceux où il y en a trop ; et enfin la réparation des grands chemins : tous ouvrages d’autant plus nécessaires qu’ils peuvent tous contribuer considérablement à la fertilité des terres de ce royaume, et au commerce de ses habitants.

Ajoutons que rien ne prouve tant la bonté de ce système que la dîme ecclésiastique, qui est d’ordinaire plus, ou du moins aussi forte que la taille ; et qui se lève par tout sans plainte, sans frais, sans bruit, et sans ruiner personne. Au lieu que la levée de la taille, des aides, des douanes, et des autres impositions, dont ce système emporte la suppression, font un effet tout contraire. Il n’y a donc qu’à prier Dieu qu’il bénisse cet ouvrage, et qu’il lui plaise d’inspirer au roi d’en faire l’expérience, pour être assuré d’un succès très heureux pour lui et pour ses peuples.

Au surplus, ce projet peut être la règle d’une capitation générale la mieux proportionnée qui fût jamais, et dont les paiements se feraient de la manière la plus commode et la moins sujette aux contraintes. C’est à mon avis l’unique et le seul bon moyen qu’on puisse employer à la levée des revenus du roi, pour empêcher la ruine de ses peuples, qui est la principale fin que je me suis proposée dans ces mémoires.

CHAPITRE 3
Bien que l’utilité de ce système se puisse prouver aussi démonstrativement qu’une proposition de géométrie, et qu’il n’y ait aucun lieu de douter de la possibilité de son exécution ; je ne laisse pas d’être persuadé, que si on entreprenait de l’établir tout à la fois et à même temps dans tous les pays où la taille est personnelle, on pourrait peut-être y trouver bien des difficultés par la quantité d’oppositions qu’on y ferait. C’est pourquoi mon avis est de le conduire pied à pied, jusqu’à ce que l’utilité en soit développée, et reconnue du public d’une manière qui lui en fasse voir tout le mérite ; pour lors loin que personne s’y oppose, on le recherchera avec empressement : mais il est vrai qu’avant cela, il est nécessaire de faire connaître cette utilité.

Pour y parvenir, je serais d’avis d’y procéder par la voie de l’expérience ; et à cet effet, de faire choix de deux ou trois élections du royaume, en résolution que si deux ou trois ans après qu’on aura réduit leur taille et leurs autres subsides en dîme royale, les peuples n’en sont pas contents ; ou que ce nouveau système soit trouvé moins avantageux pour le roi que les précédents, de remettre les tailles et les autres subsides sur le vieux pied.

Cela une fois disposé, messieurs les intendants propres à cette exécution, choisis et instruits à fond des intentions du roi ; la première chose que je me persuade qu’ils auront à faire, doit être de s’assembler, pour concerter entre eux la manière dont ils s’y pourront prendre pour établir cette dîme comme elle est proposée avec l’uniformité requise ; et après qu’ils seront convenus de ce qu’ils auront à faire, que chacun d’eux se rende à son intendance pour y travailler conformément à ce qu’ils auront résolu.

Mais comme cet essai ne pourra mettre ce système en pratique dans toute son étendue, parce qu’on le suppose restreint à des élections séparées et isolées tout autour par des pays où la dîme royale ne sera pas encore établie, et qu’il est d’ailleurs nécessaire que le roi ne perde rien de ce qu’il avait accoutumé d’en tirer ; il faudra d’abord commencer par examiner à quoi pourront monter les revenus que sa majesté en tire, pour les convertir en dîme, et distribuer le sel par imposition ; et le reste comme il est expliqué ci-après au chapitre de l’élection de Vézelay. Ce qui fera que la quotité de la dîme sera plus haute dans ces élections de plus d’un tiers qu’elle ne serait, si ce système était pratiqué par tout généralement.

La seconde application de ces messieurs doit être :

Premièrement, d’examiner avec soin ce qu’il y aura de personnes dans ces élections qui tirent des pensions, gages ou appointements du roi ; qui ont des rentes constituées sur l’hôtel de ville de Paris, sur les tontines, sur le sel, sur les postes, ou sur d’autres fonds qui soient à la charge du roi : quels peuvent être les émoluments des officiers de justice, et de tous les gens de plume : le gain des marchands, des artisans et des manœuvriers : et quel nombre il y a de serviteurs, pour les faire tous contribuer proportionnellement, et toujours en bons pères de familles, comme il est dit dans l’exposition du second fonds de ce système ; parce que cette contribution doit régler la quotité des fruits de la terre de ces élections dans ce commencement, ainsi que des autres revenus.

Secondement, de prendre une aussi grande connaissance qu’ils le pourront de la quantité des terres à labour, vignes, prés, pâtures, bois, étangs, pêcheries, maisons, moulins, et de tous autres biens sujets à la dîme royale ci-devant spécifiés, que contiendront ces élections ; et ce que ces terres, vignes, prés, bois, etc. peuvent rendre une année portant l’autre, afin de fixer avec plus de proportion la quotité de la dîme royale des fruits, sur ce qu’ils jugeront qu’elle pourra être affermée, le montant de l’article précédent déduit, par rapport à la somme que ces élections ont coutume de rendre au roi, par la taille, les aides, et tous autres subsides quelconques ; même pour la plus-value du sel s’il y en a ; à quoi le produit de la dîme ecclésiastique leur servira de beaucoup.

Mais il y a une observation importante à faire, qui est que la dîme des vignes et des prés se peut bien lever en espèce, ou abonner : mais qu’il y aura de la difficulté pour la dîme des bois, dont il faudra attendre les coupes qui n’arrivent que de neuf ans en neuf ans ; ou de dix en dix ; ou de quinze en quinze ; ou de vingt en vingt ans, comme en mon pays. Ou bien parce que ce seront des futaies, qui n’ayant point de coupes réglées qui ne soient très éloignées l’une de l’autre, il n’est pas possible d’en percevoir la dîme en espèce d’une année à l’autre sans troubler tout l’ordre des coupes. Il faut donc nécessairement l’abonner, ce qui se doit faire comme une taxe sur chaque arpent de bois, accommodée au prix de ce que la coupe vaut par arpent dans chaque pays, car cela est fort différent. Mais l’âge de la coupe et le prix des ventes étant connu, il sera aisé de régler celui de la dîme. Car supposé que celui de la vente la plus commune d’une coupe de vingt ans, soit de quarante livres, cela reviendra à quarante sols de rente par an, dont ôtant le quart pour l’intérêt des avances, les gardes et les hasards du feu et des larrons pendant vingt ans, le restant sera de trente sols, dont la dîme au vingtième sera de dix-huit deniers, ce qui donnera pour dix arpents 15 sols ; pour cinquante arpents, 3 livres 15 s. Pour cent arpents, 7 l. 10 s. et pour mille, 75 liv. de dîme, et ainsi des autres de même prix et qualité. Observation qui peut servir pour toutes les autres espèces qui y ont du rapport.

Je joindrai ci-après une espèce de modèle de cette conversion de la taille, des aides, etc. en dîme royale, comme je crois qu’elle pourrait être faite, seulement pour en donner une idée, ne doutant point que ceux que le roi emploiera pour l’essai de ce système, connaissant l’importance du sujet, ne le fassent avec toute la justesse et la précision nécessaire, selon la situation des lieux, par la grande attention qu’ils y donneront ; et la correspondance continuelle qu’ils auront les uns avec les autres, pour garder une parfaite uniformité qui est absolument nécessaire dans de pareils établissements.

Au reste, comme la quotité de la dîme royale, tant à l’égard des fruits de la terre, que des maisons, et de toutes les autres choses sur lesquelles elle s’étend, doit être certaine et sue de tous les contribuables, il est important qu’elle soit déclarée par un tarif public, qui sera renouvelé tous les ans, à cause des augmentations et des diminutions qui pourraient arriver d’une année à l’autre, suivant que les affaires du roi le requerront, et affiché à la porte de l’église paroissiale de chaque lieu, afin que chacun y puisse voir clairement et distinctement ce à quoi il est obligé.

Il y aura encore trois choses à observer à l’égard de la dîme des fruits de la terre, dont il est bon que messieurs les intendants choisis soient avertis. La première est de faire défenses très expresses, à peine de confiscation, d’enlever les débleures de dessus la terre, ni de mettre les gerbes en trésaux, que le dîmeur royal n’ait passé et levé sa dîme. Cela se fait à la dîme ecclésiastique en plusieurs pays. Il sera même nécessaire d’obliger les propriétaires d’avertir le dîmeur royal avant que de lier, afin que cette levée se fasse de concert, et que les fruits de la terre ne souffrent point de déchet par le retardement du dîmeur ; ce qu’il est très important d’empêcher, tant pour ne pas donner au peuple une juste occasion de se plaindre, que pour ne le pas mettre à la merci du dîmeur. La seconde, de régler comment le dîmeur en doit user, quand ayant compté les gerbes d’un champ, il en restera 4, 5, 6, 7, ou 8 plus ou moins que le compte rond. La troisième, de faire défenses, sous de grosses peines, de frauder la dîme, soit par vol, dégât des bestiaux, glanages, ou telle autre manière de friponnerie que ce puisse être. Et c’est sur quoi il faudra garder une grande sévérité.

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