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- Nzarya duke noze akarenga = Je mangerai peu au lieu de me salir les pieds.

- Umurimo w’ i Bwami wica utawukoze = Pour le travail de l’Etat, la présence physique.

* Idéal du sage :
- Aka imuhana kaza imvura ihise = L’aide extérieure vient toujours tard

- Imana irafashwa = Aide- toi, le ciel t’aidera

-Utagira Imana agira amaboko ye = Compter sur ses bras plus que la chance
IV.2 L’auto-suffisance alimentaire
Tout doit commencer par là. Toutes les sagesses le disent. Les Romains disaient : « primum vivere deinde philosophare » dont la production populaire pourrait être « manger d’abord, le reste, c’est de la littérature » ; parce que, «ventre affamé n’a pas d’oreille» expliquent les Francophones. «Ubupfura buba mu nda» (La noblesse est dans le ventre) ; ensuite «Iyo mirimo yabaye myinshi habanza uwo kurya» (lorsqu’on n’a pas le temps de tout faire, on assure au moins celui de manger), observent les Rwandais. Même l’hyène qui n’est pas « bête» est de cet avis : lorsqu’elle dit : «Umugabo ni ugenda yasamye » (Avisé est l’homme qui va bouche béante).
Le territoire rwandais (26.338 km²), hébergeant aujourd’hui une population de 7.000.000, avec une démographie toujours galopante, le moindre débouché sur la mer, doit être géré avec parcimonie pour remplir sa mission de nourrir ses habitants. Pour ce faire, quelques conditions sont impératives : un pouvoir fort pour assurer la paix à l’intérieur et aux frontières, une justice distributive impeccable, une économie qui met au travail toutes les couches de la population. En fait d’objectifs prioritaires, protéger le sol contre les intempéries et l’érosion, le secteur agro- pastoral (améliorant les méthodes, sélectionnant les semences spécialisant les cultures par région appropriées), développer les industries de transformation du produit agro- pastoral, axer l’enseignement sur cet objectif d’auto – suffisance alimentaire.

IV.3 Exploiter les richesses naturelles

Nous n’avons pas le sol et le sol immensément riches. Une raison de plus pour exploiter intelligemment le peu que nous avons. Le climat, les volcans, la faune et la flore, l’eau, les quelques minerais disponibles, tout cela sont des atouts qu’il ne faut pas négliger. Le tourisme, l’électrification du pays, les matières de construction, la pisciculture, sont des choses à rentabiliser.

IV.4 Auto-centrer l’économie

Les économies des pays colonisés sont toutes extraverties. Le colonisateur a fait en sorte que ses industries fonctionnent par nos matières premières et que notre consommation constitue débouché. Transformer nos matières premières et consommer notre production doivent devenir le nouvel objectif de notre économie. L’import doit baisser et l’export s’élever. C’est cela auto centrer notre économie. Tout ce qui peut être produit dans le pays ne devrait pas être importé. Il est nécessaire, bien sur, qu’il y ait des industries de transformation pour servir d’intermédiaires entre la production et la consommation. Le surplus serait exporté. Qu’on importe encore des produits provenant du bétail, par exemple, est un non sens. Sous ce titre d’auto-centrer notre économie, on peut se demander si notre sous-sol a été suffisamment prospecté pour conclure qu’il est aussi pauvre qu’on le dit ! Probablement qu’on y trouvera pas du pétrole, mais on peut espérer qu’il y a plus que ce qu’on sait jusqu’ici.

IV.5 Une main d’œuvre extraordinaire


Si la mobilisation pour le travail concerne toutes les forces vives de la nation, dans tous les secteurs de la vie nationale, il ya lieu de rappeler ici des catégories sociales qui doivent être ciblées de manière particulière. Nous pensons en priorité à deux catégories qui sont les séquelles du génocide, à savoir les enfants de la rue et les prisonniers. La mise au travail de catégories constitue une solution de faire d’une pierre deux coups : une rentabilité et une rééducation.



1° Les enfants
Le génocide et la guerre ont produit des fruits amers de toutes sortes. Entre autres, il y a une jeunesse nommée « enfants de la rue » qui constitue un problème humain et social extrêmement grave. Les solutions jusqu’ ici proposées sont manifestement inférieures à l’ampleur du problème. La solution à la hauteur doit viser deux objectifs : la ré-éducation et l’occupation. Nous pensons que si cette jeunesse désabusée par la société en crise pouvait être socialement encadrée et occupée, on aurait fait d’une pierre deux coups. En gros, on peut imaginer une triple stratégie de socialisation. D’ abord et avant tout, il faut les encadrer. Cela veut dire les regrouper en équipes humainement contrôlable, leur faire suivre des « cours pratiques » de thérapie psycho-sociale, leur trouver des loisirs qui génèrent l’esprit de sportivité et de solidarité communautaire. Il faut ensuite, les occuper à des activités collectives véritablement rentables. Les secteurs de l’agro-pastoral, de la construction et d’autres métier surtout manuels qui empêchent l’esprit de divaguer. Il faut enfin, une formation plus scientifique et plus technique pour les jeunes qui en auront manifesté les aptitudes requises.

Les prisonniers


Personne n’ignore la gravité de notre population carcérale qui dépasse toutes les possibilités normales d’un petit pays comme le notre. L’amnistie encouragerait l’impunité et la répétition, l’exécution capitale des grands coupables pour désengorger les prisons ne ferait que saigner à nouveau notre pays. Que faire alors ? De toutes les manières, il y aura pour longtemps des masses de prisonniers pour lesquels il faut trouver une solution durable et supportable par le pays. Sans chercher midi à quatorze heures de solutions il n’y en a pas beaucoup. Il faut les occuper utilement, dans leur intérêt et dans celui du pays. Pour ce faire, il faut chercher des lieux plus ou moins séparés de la population et suffisamment spacieux pour permettre des activités manuelles. Des métiers de production, de transformation, de construction, à grande échelle ou à la chaine, pouvant engager un grand nombre de prisonniers sont à trouver.
Qu’est –ce qu’on peut imaginer ? La tannerie, le tissage, la menuiserie, la préparation des matériaux de construction, etc. Les prisonniers temporels peuvent même intervenir dans des travaux à l’extérieur des lieux de détention si un encadrement adéquat leur est assuré. Quoi qu’il en soit, ne rien prévoir, ne rien essayer, c’est aller tout droit, tôt ou tard, à la catastrophe, si pas humaine au moins économique. Le pays ne peut pas se payer le luxe de nourrir des centaines de milliers de gens indéfiniment improductifs !


O. CONCLUSION
Durant les festivités qui ont entouré la fête du travail, le premier mai de cette année 2000, une chose était notable dans les discours qu’on a entendus : l’embarras de donner une idée complète de ce que signifie le travail. Pour beaucoup, le travail = le gagne-pain, sans plus. Une connaissance plus approfondie de la nature du travail, surtout de la part des encadreurs sociaux, s’impose. Les exemples évoqués au début de cet article en donnent une assez bonne idée. Tout ce que l’homme fait et qui produit un résultat est du travail. Sa valeur dépend de la qualité de son fruit. Nous parlons, cela va sans dire, du bon travail. Le mauvais existe aussi qui produit de mauvais fruits. Pendant le génocide, les hordes de tueurs ne disaient-elles pas «achevons le travail » pour dire : ne laisser subsister aucun tutsi et ses alliés hutu.

L’objectif visé dans la devise, c’est de faire travailler tous les Rwandais adultes et valides et de faire produire à notre pays le maximum de sa fécondité. La conviction est que si tout le monde s’y met et que l’intégralité de notre territoire, sol et sous –sol compris, nous pouvons vivre décemment et même sortir d’un certain sous- développement lié à un mauvais recours au travail. Il s’agit en particulier de s’occuper de certaines catégories de gens, habituellement en chaumage plus ou moins déguisé. Nous pensons, par exemple, à des personnes âgées mais spécialement qualifiées dans des domaines de caractère social, artistique, scientifique. Nous pensons à la jeunesse non scolarisée. Le pays doit faire en sorte qu’aucun enfant rwandais n’échappe à cette formation de base. Nous pensons aux Rwandaises aux quelles certaines coutumes imposent des limites pour des travaux qui ne sont pas contraires à leur nature ni a leurs obligations d’épouses et de mères. Nous pensons enfin aux Abatwa. L’histoire leur a fait subir un tél complexe d’infériorité qu’il faut un coup de pousse de la part des pouvoir publics pour les rendre productifs et compétitifs à l’instar des autres Rwandais.

Les conditions de possibilité de cette mobilisation pour le travail sont nombreuses et connues : la paix sociale, les bonnes relations avec les voisins et la communauté internationale. L’espoir pour un avenir meilleur est permis. Car, notre pays, malgré un environnement indifférent ou franchement hostile, a pu se sortir du génocide et poursuit valablement la lutte contre ses séquelles. La pose des assises de la démocratie qui nous convienne est en cours de réalisation. Bien sûr «le Dieu de nos père » (Imana y’ i Rwanda ) ne dort pas. Après cet effort de définition intégrale du travail, rien n’empêche qu’on limite la réflexion à un aspect de celui-ci. C’est le cas pour les articles de ce numéro qui vont suivre. Tous ciblent le travail dans le domaine économique xxx du pays. Il y a là une question d’urgence, sans pour autant sous-estimer les autres aspects de la vie nationale.

Notes bibliographiques





  1. KAGAME, A. ; Un abrégé de l’ethno-histoire du Rwanda, Butare, 1972. c’est dans ce livre qu’on trouve l’histoire de ces personnages de l’ancien Rwanda que nous venons de citer, à savoir Gihanga, Mukobanya, Ndoli et Nyirarumaga.




  1. La libération du Rwanda par le FPR-Inkotanyi. Le déroulement de la guerre de libération menée par le « Front Patriotique Rwandais », de 1990 à 1994, est encore si frais dans les mémoires qu’il est peu utile d’en faire ici sa relation. Le régime actuel est issu de ce mouvement. L’essentiel de sa victoire militaire fut de rétablir les droits de citoyenneté à tous les Rwandais, droits qui avaient été niés aux Tutsi par les partis politiques de tendance « hutu-power», soutenus par la colonisation. Le fruit le plus amer de cette exclusion fut le génocide, commencée en 1959 et consommé en 1994.



  1. GUTHRIE, M., The comparative Bantu, London, 1971. Dans ce gros livre de plusieurs volumes, on reconnait un millier de racines de mots du Kinyarwanda-Kirundi. Dans cet ouvrage, l’idée de «travail» possède, comme dans nos langues, deux racines Dim et Kor- Alors que la première désigne une activité d’ abord «champêtre » pour s’étendre ensuite à toute activité «manuelle», la seconde vise toute «activité » en général.



  1. Collection de poèmes traditionnels. Dans son livre, « Introduction aux genres lyriques de l’ancien Rwanda », Butare, 1969, A. Kagame parle d’une collection de poèmes anciens qu’il n’a pas encore publiée. Ledit livre en donne de larges extrait. Malheureusement, il est sans avoir fait cette publication. Que faut-il faire pour que ce trésor national soit mis à la disposition du public ? De cette richesse poétique et historique, nous avons l’exemple du poème N°24 de cette collection de Kagame, publié in extenso dans le livre ci-dessus mentionné (pp.191-217). Ce poème comprend 345 vers. On y lit l’histoire des règnes de nos rois proprement historiques, depuis Ruganzu Bwimba jusqu’à Cyilima Rujugira


BREF APERCU DU TRAVAIL OBLIGATOIRE

AU RWANDA DURANT LA PERIODE COLONIALE

Par Charles KABWETE MULINDA

Assistant à l’U.N.R /BUTARE


  1. INTRODUCTION

L’idée de travail est aussi vieille que l’humanité. La nécessité de la vie a obligé l’homme à recourir à la satisfaction de ses besoins primaires (nourriture, abri contre les intempéries et les animaux, etc.) et même secondaires. Il s’est fabriqué des outils qui lui ont facilité la tache. Du travail de l’homme il en a tiré un profit certain. C’est ce profit qui, avec l’évolution de la société, a donné naissance à la notion de salaire. Nous dirons alors normalement tout travail mérite salaire. Le travailleur apparaît comme le vendeur de sa force de travail. Cette latitude de le faire dénote une relative liberté du travailleur, relative parce que si le salaire n’est pas équitable, il comportera en lui-même une forme d’exploitation. Telle est la vision marxiste de la question (Encyclopaedia Universalis). Le salaire inéquitable constitue de ce fait le premier aspect du travail non libre.


Dans le contexte rwandais, on a enregistré évidemment plusieurs manifestations du travail salarié, et du travail non salarié et du travail au salaire non proportionnel à la prestation. C’est le travail sans salaire et le salaire non équitable qui nous intéresse dans cette étude. A ces dernières formes du travail, s’ajoute l’usage de la contrainte du pouvoir sans la quelle l’exploitation des sujets rwandais n’aurait été possible. Dans le cadre de l’éducation au travail, une vue rétrospective est indispensable. C’est ce qui nous a conduits à appréhender deux aspects du travail obligatoire au Rwanda durant la période coloniale : uburetwa, qui existait au Rwanda depuis vraisemblablement le XIXè siècle, et Akazi, qui fut instauré par les Allemands et consolidé par les Belges. Après une rapide définition des concepts nous aborderons laconiquement les domaines dans lesquels se sont manifestés les aspects du travail obligatoire. Par la suite, sera étudiée la question relative à l’émigration qui fut conséquente au poids du travail obligatoire. L’abrogation de ce dernier fera l’objet d’un autre point et la présente étude sera clôture par une lumière au sujet de la manière dont les débat politique des années 1950 a conduit certains auteurs à faire une lecture ethniste des méfaits du travail obligatoire.


DEFINITION DE CONCEPTS
Dans le contexte rwandais, le travail obligatoire a été traduit par uburetwa et akazi.


    1. Uburetwa



Uburetwa désigne l’ensemble des prestations en travail que devait accomplir la population rwandaise au profit des autorités coutumières. L’unité d’exécution d’uburetwa était le lignage mineur Inzu. Ce dernier devait fournir deux journées de travail par semaine aux autorités rwandaises. Avant la pénétration européenne, la semaine rwandaise comptait cinq jours. Durant la période coloniale, précisément à partir de 1924, Uburetwa fut fixé à 2 jours sur 7 puis en 1927 à 1jours sur 7. En 1928, l’Administration belge décida de réduire à 15 jours par an la corvée au profit du personnel des chefs et sous-chefs. Ensuite, il fut d’abord appliqué à certains contribuables en 1939 (administrateurs, travailleur sous-contrat, catéchistes, éleveurs possédant plus de 10 têtes de bétail,…), puis en 1945 à tous les contribuables. De facultatif, le remplacement devint obligatoire en 1949. Ce fut le rachat de la corvée Uburetwa (1)
En outre, pour étendre le nombre des travailleurs, il fut décidé juste après 1924 que désormais le lignage mineur n’était plus le cadre de référence de recrutement et que désormais seraient considérés les hommes adultes et valides (HAV). (2). L’institution Uburetwa aurait été établie sous le règne de KIGERI IV Rwabugiri. Monarque incontestablement conquérant, Rwabugiri avait mis au point un certain nombre de mécanismes de soumission hiérarchique, pour consolider son autorité et asseoir son pouvoir. Cela s’est traduit par le morcellement de toutes les régions soumises au contrôle royal en collines et en sous- collines attribuées à titre d’igikingi à un client du roi ou d’un chef. Cette organisation administrative facilitait en même temps la collecte de l’impôt, puisque le bénéficiaire de l’Igikingi exigeait diverses redevances à des populations y établies. Aux éleveurs, il était réclamé une vache et des travaux de l’entretien de l’enclos du responsable (inkike). Aux cultivateur, il était demandé soit une certaine de haricots (ipfukire) et de sorgho (urutete), etc. C’est après s’être acquittés de leurs impôts et du travail qu’il pouvaient conserver leurs terres(3). Avec l’arriver des Allemands, qui préconisaient l’ «Indirect rule», les prestations en travail due aux autorités traditionnelles furent maintenues en même temps que certains pouvoirs de ces dernières. Bien plus, les allemands et les missionnaires pères blancs exigèrent de la population l’exécution d’autres prestations notamment pour leur installation et pour le démarrage de leur action. Ces nouvelles prestations furent dénommés Akazi.

1.2. Akazi


Akazi est un terme swahili entré au Rwanda durant la colonisation allemande. Il désignait « à la fois les prestations en nature que la population devait aux autorités, tout travail non rémunéré aussi bien que tout travail rémunéré ou dont la rémunération était dérisoire.»(4) Tous les prélèvements en nature (lait, poulets, œufs, etc.) et tous les travaux exécutés par contrainte s’appelaient Akazi. Si ce terme a été introduit au Rwanda en provenance de l’Afrique orientale pendant la colonisation allemande, sa vulgarisation a surtout eu lieu durant la période belge. Le recours à la force se remarque précisément dans l’usage du fouet (Ikiboko) qui fut institué. Si les Allemands en sont les initiateurs, la pratique de la chicote s’est étendue jusque dans la période belge. Tous les Rwandais qui se soustrayaient au travail forcé étaient fouettés.
Entre 1925 et 1959, les travaux relatifs à Akazi se sont considérablement intensifiés. En effet, déjà en 1926 eut lieu la réorganisation administrative. A cet égard, la triple hiérarchie des autorités traditionnelles, à savoir les chefs du sol, les chefs des partages et les chefs d’armée, a été supprimée. La nouvelle organisation administrative de type colonial inspira aussi l’organisation de l’Akazi puisque c’est le gouverneur du Ruanda-Urundi qui fixait le plan d’ensemble des travaux à exécuter et qui le soumettait au résident du Rwanda, lequel en référait au Roi. Celui-ci transmettait les directives reçues aux chefs pour exécution. Les chefs se chargeaient de répartir les tâches entre les sous-chefferies de leurs circonscriptions et en dernier ressort le sous-chef confiait les travaux aux hommes adultes et valides. Pour assurer la bonne exécution des travaux, les administrateurs territoriaux, les agronomes, les vétérinaires,…devaient sillonner le pays, chacun dans sa circonscription, vérifiant si les ordres reçus étaient traduits en pratique.
Les sous-chefs passaient par les intermédiaires, tels que les Ibirongozi, les Abamotsi qu’on appelait aussi Abavuza-mahembe pour facilement atteindre et exploiter les hommes adultes et valides. Les Ibirongozi remplaçaient le sous- chef en cas d’empêchement de dernier pour surveiller sur terrain l’exécution des travaux. Quant aux Abamotsi, ils aidaient le sous-chef dans le recrutement des travailleurs (Abanyakazi) et se chargeaient de transmettre des messages de tous ordres à la population. A cet effet, il se plaçait au point culminant de la colline avoisinante et, sifflant dans une corne, criait le message à la horde, leur précisant quel travail serait fait, le lieu et les outils nécessaires. Si ces intermédiaires n’étaient pas rémunérés par l’administration coloniale, ils bénéficiaient toutefois de l’exemption aux travaux obligatoires et, quelquefois, ils pouvaient faire travailler des gens chez eux. Enfin, avant chaque séance d’Akazi, le sous-chef ou son ikirongozi procédait à l’appel (iperu). Les absents étaient sévèrement punis(5). C’est dans ce contexte que furent organisés les travaux du portage, de la construction des infrastructures coloniales et missionnaires, le lancement et l’intensification des cultures obligatoires et plusieurs autres aménagements.



  1. DOMAINES D’INTERVENTION DU TRAVAIL OBLIGATOIRE

Les travaux d’aménagement des infrastructures et plus tard de mise sur pied des moyens de production économique ont nécessité le recours à la main –d’œuvre locale. Au début le travail fut obligatoire. Par la suite, des rémunérations fortes insignifiantes et non proportionnelles au travail accompli furent prévues. L’usage du fouet obligea les sujets à s’acquitter des tâches leurs confiées, même quand ces dernières dépassaient largement leur énergie.


2.1 Le portage
Les réquisitions des Rwandais pour le portage ont commencé depuis la période allemande. En plus des prestations aux autorités coutumières, il fallait intervenir dans la construction de nouveaux édifices coloniaux et missionnaires. Pour construire les missions, une main-d’œuvre abondante fut levée notamment pour le transport des matériaux de construction. Le bois constitua la charge la plus lourde aux Rwandais car les charpentes, les meubles, la cuisson des briques, de tuiles, de chaux,…exigeaient une énorme quantité de bois. A cette gamme, il faut ajouter les besoins des administrateurs et des missionnaires en bois de chauffage.

Etant donné que les quelques arbres qui poussaient dans les environs des lieux d’emplacement des missions ou des postes administratifs ne pouvaient satisfaire aux besoins du bois pour la construction, les porteurs faisaient une ou plusieurs journées de marche pour atteindre les forêts ou les zones boisées. Puisque les moyens financiers nécessaires à la rémunération volontaire des porteurs étaient presque absents, le portage fut organisé sur base uniquement de la contrainte. Ensuite, ces travaux mobilisaient parfois une bonne majorité des habitants d’une contrée. Rumiya nous donne l’exemple des transports du bois de l’Akanyaru jusqu’à Save : «Au cours de l’année 1905, les frères de Save établissent des chantiers de sciage et d’équarrissage sur les bords de l’Akanyaru (environ 20km de Save). Le transport mobilisa toute la région du Budaha et du Ndora pendant quatorze mois »(6). Dans le diaire de Save, du 7 juillet 1905, les missionnaires Pères Blancs reconnurent pour eux l’avantage que procurait le recours aux corvées : « Un tel système de corvées imposé aux collines est désastreux pour notre mission, bien que nous le fassions faire par le roi, mais il nous serait absolument impossibles de bâtir notre église sans cela» (7). Près de 8000 hommes furent recrutés sur trois cents collines. Les missionnaires y parviennent grâce au concours de Musinga ou des autorités locales (8). La fondation de la Résidence de Kigali en 1908 occasionna le recrutement d’une main-d’œuvre importante provenant de Kigali, Gisaka, Bwanamukari et même au Nord-ouest du pays. C’est le transport du bois qui occupa une grande partie d’entre eux. Les méthodes utilisées étaient inhumaines : «A partir de 1908, (…) on assista à l’enrôlement de main-d’œuvre par la force, lequel, dans un cas extrême, (Bugoyi, septembre 1922, alla jusqu’à une rafle de bétail, de femmes et d’enfants, par les soldats de la Garnison de Gisenyi, ce qui obligea les hommes à se présenter à la corvée pour que leur familles fussent remises en liberté(9).


Au début, les Pères blancs récompensaient les travailleurs avec des perles, des roupies ou des cotonnades. Par la suite, avec la consolidation de l’Eglise, les autorités locales furent chargées de fournir de la main-d’œuvre gratuite aux missions. En outre, parmi les nouveaux convertis, figurait un groupe dit des « gens des Pères » (abantu ba Padri) qui supervisaient les travailleurs placés à la disposition de Kabgayi du 16 février 1906 : «…mes gens ne pillent rien du tout ; ils se contentent de faire travailler. Que si le roi préfère travailler lui-même, qu’il me donne un homme à lui pour faire couper en dehors du Marangara.»(10) Dans un autre diaire. Il est stipulé que même les écoliers participaient au travail de portage : «Les briques arrivent transportées par les banyeshuli, nous espérons que nous n’aurons pas besoin des chefs pour ce travail. Les chefs nous aideront seulement pour le transport des arbres à charpente et bois de chauffage.»(11)
En effet, le problème de bois se posait avec acuité à Marangara. C’est pourquoi, les missionnaires ont été obligés d’aller se ravitailler dans d’autres régions. Cela faisait de la peine aux Abanyakazi : « Selon les témoins de ce travail forcé, il fallait 3 jours pour arriver dans la foret de Gishwati et au moins 8 jours pour regagner Kabgayi, ce qui représentait 13 jours (…) d’absence au foyer sans compter la faim, la soif, la fatigue…»(12) La construction de la cathédrale de Kabgayi en 1922 est à ce point révélatrice. Plusieurs milliers de personne ont du être mobilisées pour notamment fournir du bois de charpente et du bois de chauffage pour alimenter les fours à briques. A part les populations recrutées par le truchement des autorités locales, une autre composante, formée des habitants établis dans des domaines échus aux missionnaires, devaient travailler pour le compte des missions et ce, sans rémunération aucune. A ce groupe, il faut inclure les orphelins et les pauvres à qui les Pères Blancs avaient accordé un logement à la mission. (13)
Une autre forme de portage concernait le circuit économique qui reliait le Rwanda à l’Afrique orientale. A cause de sa proximité avec Bukoba, le Rwanda put accéder aux marchandises qui provenaient du port de Mombasa, reliée à Bukoba par une ligne de chemin de fer. Sur la route de Bukoba, les biens d’importation et d’exportation étaient transportés par les porteurs. Honke nous propose les charges qui furent portées de Kigali à Bukoba entre 1910 et 1913 (sachant qu’une charge = 30 kg) :
1910 : 11.370 charges par 13.519 porteurs ;

1911 :13.795 charges par 15.523 porteurs ;

1912 : 20.961 charges par 23.971 porteurs,

1913 :23.521 charges par 25.241 porteurs. (14)


D’après toujours le même auteur, la moitié de ces porteurs étaient Rwandais et leur proportion tendait à s’accroitre. La plupart d’entre eux venaient de l’Est du pays, ouvert depuis fort longtemps aux échanges extérieurs. Bien plus, durant la guerre de 1916, la compagnie des troupes allemandes défensives stationnées dans le pays et les Européens en déplacement recouraient aux porteurs. Beer estime que les Allemands se sont rendus impopulaires en traitant les Rwandais avec plus de brutalité dans le recrutement des porteurs, à mesure que les Belges et les Britanniques avançaient. (15)
Ainsi, le portage pendant la période allemande a été enregistré surtout dans la fourniture des matériaux de construction. Il a été limité dans d’autres domaines, notamment dans les échanges commerciaux, à cause de la rareté des gros tonnages à déplacer. C’est durant la guerre puis surtout avec la colonisation belge que le portage s’intensifia. En effet, avec l’organisation administrative qui en résulta, les autorités locales furent davantage impliquées dans les recrutements des porteurs. Ensuite, avec la mise en valeur économique du pays, le besoin en portage s’amplifia de plus belle. (16) Mais plus tard avec la construction des routes puis l’avènement du camion en 1948, le portage connut une régression notable et prit progressivement fin.


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