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MUSEE NATIONAL DU RWANDA ET EDUCATION

A L’UNITE NATIONALE

Par Misago Kanimba



Problématique
Au moment où les pays d’Europe mettent tout en branle pour consolider leur unité et que des pays d’autres continents aspirent à l’unification, l’Afrique centrale-orientale se distingue par des guerres civiles ou régionales. Les idéologies divisionnistes voire génocidaires bannies, combattues sous d’autres cieux, ont élu domicile dans la région interlacustre. Ces idéologies qui sont à la base des conflits s’étalent dans le temps et sont entretenues. En effet, la politique d’exclusion instaurée au Rwanda par le colonisateur a renforcé les clivages sociaux et les inégalités. Elle a transformé les trois composantes de la société rwandaise en trois ethnies. Par ses réformes administratives elle a supprimé les institutions et les systèmes traditionnels qui permettaient un mouvement ascensionnel et favorisaient une mobilité sociale par des mérites personnels.
A l’époque précoloniale, la possession de certains biens socialement revalorisés par excellence, sous l’action des modèles cultures prédominants dans le Rwanda d’alors, entraînait une mobilité excédante intergroupe, alors que la privation de tels biens entraînait une mobilité descendante intergroupe. Dans ce contexte, suite au processus de reconnaissance sociale lié à la possession ou à la privation de certains objets socialement revalorisés, un homme qui passait de certaines formes de conditions sociales d’existence à d’autres acquérait progressivement une nouvelle perception de soi-même et une nouvelle identité que lui accordait son milieu social. Les anciennes institutions reconnaissaient donc l’égalité des trois composantes de la société et la possibilité de participation active de toutes à la gestion de la chose publique et les relations harmonieuses entre groupes. Certes, les conflits entre individus issus de groupes différents ou d’un même groupe ne manquaient pas. Les conflits étaient fréquents entre éleveurs ou entre éleveurs et agriculteurs. Ils portaient sur les pâturages, les points d’eau, les cultures ravagées ou détruits par le bétail, etc.
La cohésion entre groupes était maintenue par des mariages et par la mobilité sociale. S’il est vrai que les groupes socio-économiques pratiquaient l’endogamie plus fréquemment, les agriculteurs Hutu enrichis par leur travail pouvaient s’acheter des vaches et se marier avec des filles des éleveurs Tutsi pauvres. Dans le sens inverse les Tutsi pauvres se mariaient avec des filles Hutu. Un Mutwa qui s’était distingué à la guerre ou dans d’autres circonstances pouvait être intégré au groupe Tutsi acquérir des vaches et se marier à une Tutsi. Cette mobilité sociale contribuait énormément à l’échange de gènes et constituait un obstacle à la cristallisation des groupes sociaux en castes ou en ethnies. Chaque groupe a reçu un rapport notable du sang de l’autre. Les mariages entre les Bahutu et les Batutsi remontent au passé lointain. La tradition orale rapporte que Gihanga, ancêtre de la dynastie Tutsi, s’est marié avec Nyamususa, fille de Geni, un Muhutu, et la fille de Gihanga, Nyirarucyaba a épousé Kazigaba, un Muhutu.
L’unité des trois groupes était basée sur le principe d’égalité puisque la seule différence tenait au mérite de chacun ; on pouvait naître Mutwa et mourir Muhutu ou Mututsi; le cas de Busyete ancêtre du clan Abasyete ou Nyirarutsobe, mère de l’ancêtre du clan Abatsobe sont des exemples éloquents. La division du peuple rwandais en trois ethnies figées dont la pérennité fut garantie par une politique d’exclusion et par l’usage des cartes d’identité avec mention ethnique a engendré des antagonismes et miné l’unité nationale. Après l’indépendance la politique d’exclusion a été renforcée par système éducatif réducteur ; la classe dirigeante a dû souvent recourir à l’ethnisme pour masquer les dissensions politiques et les difficultés économiques se sont chargées de doper les consciences et de cristalliser les idées extrémistes.
Les éléments introduits n’ont pas été bien intégrés dans le contexte culturel et dans la logique sociale rwandaise. La destruction ou la mise en cause des valeurs fondamentales et les institutions existantes sur lesquelles nos ancêtres fondaient leur unité et leurs rapports sociaux n’a pas non plus favorisé l’assimilation des valeurs nouvelles issues des contacts avec l’étranger. La perte des valeurs nouvelles traditionnelles doublée de l’absence d’intégration harmonieuse a créé un vide culturel et moral. Car la rupture avec le système culturel antérieur ne pouvait assurer aucune stabilité et aucune continuité. Depuis quelques années, on remarque un regain d’intérêt pour leur culture chez les Rwandais de toutes les couches sociales. L’intérêt se dénote dans les manifestations aussi bien politiques que culturelles. Ce mouvement, qu’il faut encourager, est nécessaire, si nous voulons renforcer notre patriotisme et recouvrer notre unité nationale.
Dans la quête de l’unité nationale, dans la recherche de résolution des conflits, élément éducatif s’avère fondamental. Aussi les institutions vouées à la recherche et à l’éducation doivent apporter leur contribution en assument le rôle de catalyseur des efforts de tous les Rwandais. C’est dans ce cadre que le Musée National doit contribuer à la réalisation de cette tâche. La présente étude se propose d’expliquer comment le Musée National du Rwanda participe à l’éducation et éveille la prise de conscience de l’unité nationale en s’appuyant sur ses collections, notamment sur celles qui servaient à baliser et à entretenir l’unité du peuple rwandais. Nous rappelons d’abord ce qu’est un musée, en général, et la triple vocation du Musée National du Rwanda, en particulier. Ensuite nous explicitons successivement sa vocation de conserver le patrimoine, son rôle éducatif et sa contribution à la consolidation de l’unité nationale.
Concept de musée et vocation du Musée National du Rwanda
Le concept de musée a changé à travers le temps. Pendant longtemps, le musée a été perçu comme une institution désuète et élitiste, destinée à une certaine classe de la société. A partir des années 1980, les musées tentent de se libérer du carcan pour s’ouvrir à un public plus large et jouer un rôle significatif dans le processus de développement (1). Cependant, la notion de musée demeure assez vague dans le public rwandais. Le musée évoque chez certains une image stéréotypée d’un bâtiment vétuste abritant des objets d’un passé révolu. D’autres pensent que lu musée s’adresse seulement à une élite de visiteurs nationaux, à des étrangers, notamment à des touristes. Dans les deux camps, l’image du musée paraît tronquée, car le musée n’est pas un lieu réservé aux seuls initiés ; il est une institution conçue pour le public et ouverte au grand public qui a droit à une information cohérente et complète sur les objets conservés ou exposés. Par ailleurs, les objets conservés dans un musée ne sont pas forcément vieux. Tout objet qui fait partie des collections a été choisi pour servir de support matériel, pour représenter un fait culturel ou rappeler un événement ou un personnage historique. Une pièce de musée est choisie parce qu’elle est chargée d’un message.
Comme le souligne bien Madline Y. El Mallah : «le mot a acquis aujourd’hui un sens plus large et désigne une institution culturelle de grande importance, qui joue un rôle influent dans l’éducation de la société, dans l’évolution de la pensée humaine et l’imprégnation de la conscience des faits de la civilisation, de l’art et de l’histoire» (2). Cette explication se rapproche de la définition adoptée en 1974 par Conseil International des Musées (ICOM) : « Le musée est une institution permanente, sans but lucratif, au service de la société et de son développement, ouverte au public, et qui fait des rechercher concernant les témoins matériels de l’homme, acquiert ceux-là, les conserve, les communique et notamment les expose à des fins d’études, d’éducation et de délectation» (3). Trois attributions complémentaires et d’égale importance sont assignées au Musées National du Rwanda : la collecte et la conservation préventive et curative des collections, la recherche axée essentiellement sur les collections et l’éducation sociale.
La collecte consiste en l’acquisition des objets présentant un intérêt scientifique, culturel, historique ou esthétique. La conservation vise à augmenter l’espérance de vie des collections saines ou endommagées. La recherche au Musée porte sur plusieurs domaines, mais elle est souvent menée en rapport avec nature des collections et l’objectif de répondre aux exigences de son public. C’est dans cette perspective qu’au Musée National la recherche est principalement axée sur la culture et l’histoire du Rwanda. Quant à l’éducation sociale, le Musée National a le devoir d’éduquer la population. Il a la tâche de concourir activement au processus éducatif à tous les niveaux et d’offrir au public la possibilité de développer et de parfaire son éducation. Cette éducation doit atteindre toutes les couches sociales, principalement les plus démunies. Le message que recèle l’objet est extrait et transmis par diverses techniques de communication.


Musée National : Mémoire collective du peuple rwandais et garant de son identité culturelle
Le Musée National est par excellence la mémoire vivante du peuple rwandais. Sa fonction primordiale est de sauvegarder le patrimoine national et de le présenter au public. La protection du patrimoine national est et doit demeurer l’objectif essentiel de la politique culturelle rwandaise, car un peuple sans mémoire est un peuple sans avenir. Monsieur Luc a raison d’affirmer qu’«un peuple sans musée est un peuple sans tradition et sans âme » (4). La meilleure façon de protéger la mémoire, c’est la transmettre à l’ensemble de la population, à la jeunesse et à la masse analphabète. Il incombe au Musée National d’assurer la transmission de cette mémoire vivante, car nous ne pouvons pas comprendre ce qui nous arrive sans saisir d’où nous venons.
Miroir du passé, gardien de la véritable mémoire collective du pays, le Musée National est le premier représentant d’un ensemble de valeurs durables. Il est donc une mine d’informations, une source intarissable de renseignements intéressants et utiles non seulement pour reconstituer le passé, mais aussi pour bâtir l’avenir. Il constitue un réservoir important de connaissances pour les générations actuelles et futures ; il garde les témoins matériels qui expriment tant une vision du monde qu’une façon de l’organiser. C’est dans cette optique que l’héritage culturel tant matériel que non matériel constitue une base déterminante de développement intégré. Il appert que les systèmes d’organisation économique et sociale qui prennent en considération nos valeurs traditionnelles et s’adaptent à notre contexte culturel en environnemental serviraient mieux le bien-être de l’ensemble de la population que les modèles importés et conçus sans référence à nos réalités.
Toutefois la conservation du patrimoine demeurerait un exercice gratuit si cette action n’est pas conduite à l’enseigne des autres objectifs, notamment la recherche et l’éducation sociale. Aussi le Musée National s’emploie-t-il à familiariser le public avec les différentes composantes de la culture rwandaise. Ces composantes ne prennent leur valeur réelle que si leur origine, leur histoire et leur environnement sont connus avec la plus grande précision. C’est pourquoi, tout en étant gardien de l’héritage, le Musée National est un centre de recherche, un établissement au service du public rwandais auquel il donne l’occasion de réfléchir sur sa société et sur son identité.
Musée National et son rôle éducatif
Le musée en tant qu’institution chargée d’éducation populaire doit corriger les stéréotypes et les clichés attitudes profondément enracinées et vaincre l’ignorance. Une meilleure connaissance des autres détruit les préjugés et rapproche les groupes. L’exposition de photos et d’objets peuvent contribuer à corriger l’image fausse qu’a l’un de l’autre des trois composantes de la société rwandaise. Il devrait jouer le rôle de catalyseur dans les programmes de réconciliation, notamment lorsqu’il s’agit des problèmes sociaux. L’éducation par le musée visé à transmettre l’expérience accumulée par les générations antérieures et à assurer la jonction entre le passé et l’avenir. Les collections du Musée National du Rwanda appartiennent à des périodes différentes et proviennent de toutes les régions du pays. Le musée remplit son rôle éducatif en associant l’image et le son pour communiquer le message que recèle l’objet ; il le transmet en exploitant le plus grand nombre possible de récepteurs sensoriels dont l’homme dispose pour apprendre. Le personnel du musée déploie de grands efforts pour intéresser et instruire le public par la présentation judicieuse des pièces, les notices explicatives, les photographies soigneusement choisis. L’audiovisuel est devenu un outil pédagogique et incontournable.
L’exposition permanente qui est appréciée par les visiteurs est régulièrement complétée par des expositions temporaires sur des thèmes précis et ayant des objectifs clairement définis. A titre indicatif, l’exposition sur le mariage qui a été organisée dans plusieurs endroits et qui a attiré plus de dix mille visiteurs avait l’objectif de souligner l’importance de la famille. Nous l’expliquerons plus bas. L’attention des visiteurs est attirée par les objets qui sont exposés en premier lieu pour informer le public et éveiller sa curiosité. L’intérêt porté à ces éléments peut les inciter à consulter les textes, les photos ou autres matériels explicatifs. Dans chaque objet se trouve conservé un lien avec le passé qui se manifeste sous diverses formes : ornementation, dessin, détails… Chaque objet est un témoignage de son passé, il est encore plus significatif en tant qu’expression d’une culture vivante. C’est pourquoi après avoir contemplé les vitrines l’une après l’autre, on comprend mieux les hommes qui les ont fabriqués ou tout simplement utilisés.
Aussi le Musée National est-il séduisant et capable de concilier les activités éducations et les divertissements. C’est en effet un lieu tranquille et confortable où chaque visiteur peut s’intéresser à un sujet particulier, peut s’instruire. Chacun a le plaisir de se recréer en se cultivant. En vue de répondre aux attentes et exigences de son public, le Musée National s’emploie à organiser des expositions temporaires susceptibles non seulement d’attirer de nouveaux visiteurs, mais aussi d’enchanter les habitués. Ces expositions respectent les traditions nationales. Elles communiquent des informations, évoquent des comportements, transmettent des valeurs, bref offrent au visiteur une visualisation de l’histoire du peuple rwandais et de sa culture. L’éducation au musée présente un intérêt pour les gens de tous les âges et de toutes les professions. Le musée apporte à l’enfant et à l’adulte, à l’analphabète comme à l’intellectuel, un complément enrichissant à la connaissance de sa culture et de l’histoire de son pays. Il transmet donc une culture générale suffisante, toute pénétrée des leçons du passé. Et en expliquant le passé au moyen des témoins, des objets réels, il contribue à orienter le présent et à forger l’avenir. Dans cette optique, l’éducation permanente qu’il dispense vise à adapter l’homme à un nouvel univers pour échapper à ses contradictions dramatiques et à ses déséquilibres provoqués principalement par la guerre et le génocide de 1994.
Le musée n’atteindre son but pleinement que s’il devient réellement un élément de la vie quotidienne, un lieu de rencontre pour les gens pour les gens ordinaires, pour l’homme de la rue. Pour que le musée s’acquitte pleinement de sa mission, il importe que le musée soit doté des moyens nécessaires pour mettre sur pied un service éducatif visant à assurer la liaison entre le muséologue et le grand public. Il doit sortir de son cercle urbain pour aller vers la population sur les collines.

Musée et éducation à l’unité
L’unité des Banyarwanda repose sur leur identité culturelle, linguistique et anthropologique. Le Musée National a quelque chose à offrir au discours sur l’identité commune du peuple rwandais. Car, il est garant de son identité culturelle par son rôle statique dans ce qui est de la conservation de ses collections, et par son rôle dynamique quand il s’agit de leur accroissement, de leur étude et de leur diffusion. A travers ses collections, il facilite le dialogue avec le passé et permet à l’ensemble des rwandais et surtout à la jeunesse de connaître son héritage culturel et naturel et de prendre conscience de son identité culturelle. Le peuple rwandais a une chance exceptionnelle, en Afrique subsaharienne, d’avoir une langue commune et unique. La langue, on le sait, est l’expression par excellence de la culture. Elle est un atout unificateur, un instrument important pour l’unité nationale (5). La langue est par ailleurs un instrument indispensable pour animer, informer et expliquer à notre population les problèmes vitaux de tout ordre qui se dressent sur son parcours de développement.
La culture rwandaise possédait des principes et des pratiques qui servaient à stabiliser les rapports sociaux, à renforcer la compréhension et le respect mutuels, à faire comprendre et accepter les différences. Les traditions, les proverbes et surtout les contes réservent une place importante à l’unité nationale. Les mythes, les légendes et les proverbes mettent en exergue la solidarité et la nécessité de complémentarité. C’était par les actes communautaires et les actions accomplies en groupe que les membres se rapprochaient et de sentaient proches les uns des autres. Ces réalités sont rendues vivantes au musée par les collections qui sont de nature variée : objets, cassettes, films, photos, etc.
Bien des objets, des photos contiennent des messages exaltant la solidarité et l’unité. L’unité est quelque chose d’abstrait qui se concrétise dans les faits, les actes, etc. L’unité des Rwandais est traduite dans les éléments géographiques, historiques, culturels, linguistiques, économiques, sociaux et politiques dont les supports matériels sont exposés dans les vitrines du musée. Les objets renferment un message ou des informations ; le musé a justement la tâche de les porter à la connaissance du public par divers procédés, par différentes méthodes. Les objets recèlent des modes d’expression et des savoir-faire qu’il faut interpréter et rendre leur langage compréhensible. La lecture des objets ne consiste pas à les voir comme tels, mais à comprendre les multiples formes d’interactions entre les événements publics, les circonstances de la vie privée, les émotions ou les aspirations partagées qui influent sur le genre de vie à telle ou telle époque. Il faut extraire de la pierre taillée, d’un pot en terre cuite, d’un panier, etc., les sentiments qui animaient l’auteur, les actions qui ont été réalisées avec ces outils.
Le musée comprend sept salles d’exposition dont chacune reconstitue un pan de l’histoire et illustre une composante de la culture rwandaise. La première salle est embellie par plusieurs œuvres d’art moderne provenant de différentes cultures. Elle montre que la culture n’a pas de frontière et que la diversité est au service de la solidarité. La connaissance des autres cultures permet de mieux comprendre sa propre culture et de découvrir son identité culturelle. La salle deux abrite des cartes, des graphiques, des diagrammes et des photographies. Les cartes indiquent la position du Rwanda en Afrique en général et en Afrique centrale en particulier. Les photographies illustrent les paysages touristiques et les sites naturels, notamment la région de Kibuye au bord du lac Kivu et le Parc National des Virunga. A ces beaux paysages s’ajoutent une faune et une flore riches et variées. La beauté naturelle inspire l’admiration de tous et constitue pour un Rwandais une source de fierté et partant de nationalisme. L’amour de ce beau pays devrait susciter le patriotisme et consolider l’unité nationale.
Les graphiques et diagrammes mettent en évidence la richesse du Kinyarwanda et indiquent ses liens à différents degrés avec les langues de la région interlacustre. Dans la troisième salle sont exposés des ustensiles de ménage et divers objets intervenant dans différents domaines de l’économie domestique : agriculture, élevage, apiculture, chasse et pêche. Certaines activités illustrées par les photos et certains objets rappellent l’unité, l’entraide et la solidarité qui caractérisaient la communauté traditionnelle. La salle quatre abrite des objets qui illustrent les métiers traditionnels. Dans bien des cas, ils se transmettaient de père à fils ou de mère à fille. Les métiers étaient tous importants et complémentaires. Les artisans étaient issus de tous les trois groupes (6).
Bien de ces objets étaient multifonctionnels. Ainsi les sièges à deux disques quasi-parallèles avaient, outre la fonction utilitaire, la fonction sociale, religieuse et politique. Ils étaient utilisés dans les cérémonies de haute importance. Ils intervenaient dans le culte de kubandwa, dans les cérémonies de mariage ou dans plusieurs manifestations où la préséance et le prestige étaient de rigueur. En effet, fait remarquer Ndekezi, «tous les actes importants se passaient en position assise pour que les gens se sentent à leur aise, pour qu’ils jugent en position respectable» (7). La salle cinq abrite une hutte meublée la traditionnelle ainsi que beaucoup de photos d’habitations traditionnelles. L’habitat traditionel et l’organisation spatiale étaient identiques partout. Les différences étaient dues au rang et à la richesse de l’individu. Les types d’habitat variaient principalement suivant les régions(8).
La salle six est réservée à l’habillement, aux bijoux et parures, aux divertissements et aux armes. Les photos prises au début de la colonisation montrent que l’habillement variait suivant les âges, les sexes, les régions. Les écorces de ficus battues étaient portées par les adultes des deux sexes, les fibres végétales tressées par les enfants et les jeunes gens, les peaux «amashabure» par les jeunes filles et les hommes, et les peaux de grandes dimensions «inkanda» par les femmes. Les perles en verre, les coquillages et les objets importés qui embellissent les vitrines du musée donnent le message de paix qui régnait et qui était la condition sine qua non pour le bon fonctionnement des circuits commerciaux à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.
Quant aux jeux et sports, il y avait des divertissements populaires et des divertissements pratiques à la cour. Les divertissements populaires réunissaient tous les Rwandais, jeunes et adultes, sans discrimination. Certes, il y avait des jeux réservés aux femmes, des jeux masculins et des jeux communs, notamment l’igisoro. La salle sept donne un aperçu de l’histoire du Rwanda depuis les temps préhistoriques jusqu’à nos jours. Les outils en pierre taillée datant de plus de 60.000 ans prouvent que l’occupation humaine au Rwanda remonte à des périodes beaucoup plus anciennes que celles qu’on retrouve dans certaines reconstructions historiques. Tandis que des outils et des ossements d’animaux domestiques prouvent que l’économie agro-pastorale remonte au début de notre ère. Contrairement à certaines hypothèses qui peuplent le Rwanda par des vagues migratoires dont certaines se situeraient dans le deuxième millénaire après J.C., la symbiose entre chasseurs, agriculteurs et éleveurs connaît une longue tradition que des preuves indirectes autorisent à situer dans le premier millénaire avant J.C..
Une autre vitrine réunit une collection d’objets hétéroclites intervenant dans la divination, dans le culte de Kubandwa et dans le culte des ancêtres. Dans le système de croyances traditionnel, le malheur et les maladies avaient une cause surnaturelle, ou étaient provoqués par des sorciers, des jeteurs de mouvais sort. C’est pourquoi ils recouraient à diverses pratiques divinatoires pour les conjurer ou les guérir. La divination consistait justement à consulter les esprits pour implorer leur secours, connaître leur volonté, savoir quel quotidienne. La surveillance des ancêtres et les menaces de châtiment qui pesaient sur les vivants les rendaient respectueux envers leurs us et coutumes, honorer leurs ancêtres. Transgression était sanctionnée. Le culte aux ancêtres rendu régulièrement maintenait étroits les liens entre les vivants et les morts. Ces pratiques étaient identiques pour tous les Rwandais. Les devins hutu, tutsi ou twa jouissaient d’un prestige et d’une influence considérable auprès de tous les Rwandais ; ils étaient à la fois respectés et craints par tout le monde. Les techniques et les instruments divinatoires, les formules et les gestes rituels étaient à la fois respectés et craints par tout le monde. Les techniques et les instruments divinatoires, les formules et les gestes rituels étaient utilisés de la même façon par les trois groupes. C’était au niveau régional que l’on pouvait déceler des variantes (9). Dans le même ordre d’idées, les guérisseurs, les vétérinaires, les faiseurs de pluie et les purificateurs étaient consultés par tous les Rwandais (10).
Dans la même salle, une vitrine abrite des objets variés qui constituaient le trousseau de la jeune mariée. Les notices explicatives soulignent les multiples fonctions du mariage. Le mariage était un événement qui engageait toute la communauté. Tout le monde voulait contribuer à la réussite de l’événement ; il fallait préserver l’honneur de toute la famille élargie, de tous les amis et voisins. Le mariage était l’une des institutions traditionnelles qui régissaient le mode de vie et le comportement des Rwandais. Il avait une fonction biologique, sociale, économique, politique et religieuse (11). C’était par lui que les jeunes recevaient l’autorisation de fonder leur propre foyer et d’avoir des enfants légitimes. Ceux-ci devaient garantir la reproduction, la sécurité intérieure et extérieure, la puissance économique, sociale et politique. C’est pourquoi le mariage était balisé par des codes sociaux et était continuellement surveillé par les parents. La constitution du couple était au cœur d’un système d’échanges qui structurait la parenté et organisait le groupe dans son ensemble. La famille, à la fois base et pilier de la société était à l’origine de l’entente, de la paix entre les Rwandais et de l’unité nationale.
Actuellement, l’institution matrimoniale s’est profondément transformée suite à la colonisation et à l’influence des confessions religieuses étrangères. Le mariage tend à devenir une rencontre, une aventure à deux individus, à être laissée à la merci des fantaisies du cœur. Ce qui explique le taux de divorce toujours croissant et le nombre considérable des enfants abandonnés, sans éducation et sans protection. Ces influences ont pu s’exercer profondément grâce surtout aux actions conjuguées qui ont transforme le mode de vie et ont apporté un système économique rendant tôt les enfants indépendants de leurs parents. Le choix de l’élu est devenu une affaire strictement individuelle. Il est de bon ton de présenter l’heureux élu à ses parents, souvent après des mois de copinage. Les parents riches interviennent dans l’organisation des cérémonies, tandis que les pauvres y sont invités. Les fêtes organisées avec pompe et de façon protocolaire répondent aux besoins de prestige qu’au désir d’entretenir les traditions fossiles. Les cérémonies rappelant les anciennes pratiques sont des caricatures de mauvais goût.
L’effondrement des structures sociales qui naguère étaient à la base des alliances et interdépendances familiales a eu un impact négatif sur la vie familiale en général et sur l’éducation de la jeunesse en particulier. Il en résulte un esprit individualiste qui ne cesse de miner les valeurs qui constituaient le fondement de la cohésion sociale. La famille élargie n’existe plus ; elle est réduite à sa plus simple expression de famille nucléaire. Les multiples rôles de la famille traditionnelle sont en voie de disparition. Autrefois, la famille étendue était le centre de solidarité et de sécurité. Chaque membre pouvait compter sur le soutien de la famille entière. Les membres restaient solidaires sur le meilleur et pour le pire. La responsabilité collective était développée. Ainsi, suite à un meurtre, les représailles, voire la vendetta, pouvaient s’abattre sur n’importe quelle personne du groupe de l’assassin.
La religion traditionnelle rwandaise qui faisait un lien certain de toute la société a été bannie par le christianisme. Cependant le christianisme n’a pas pu jouer le rôle de rassembleur ; même avant le génocide, la population rwandaise s’interrogeait sur la vérité professée par la religion catholique. La multiplicité des confessions religieuses et les survivances religieuses traditionnelles en constituent la preuve.
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