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I.2 L’attitude de l’ONU
Les Accords d’Arusha prévoyaient l’arrivée d’une Force de maintien de la paix des Nations-Unies dans les trente-sept jours après leur signature : le 4 Août 1993. Il fallut huit mois pour voter le budget de la MINUAR, le 4 Avril 1994. Les Accords prévoyaient que les Casques bleus devraient participer à la recherche des caches d’armes et à la neutralisation des groupes armés. Les diplomates de New York supprimèrent totalement ces dispositions (p.157-159). Les règles d’engagement acceptées par le siège de l’ONU prévoyaient explicitement que la MINUAR empêchera tout crime contre l’humanité (p.160). Quelques heures après l’attentant contre l’avion de Habyarimana, le général Dallaire, chef de la MINUAR, alerta l’ONU à New York. Ses supérieurs au département des opérations de Maintien de la paix (DOMP) répondirent que personne à New York ne s’intéressait à cette affaire (p.701). En voici quelques réactions :
- Les Américains et les Anglais s’opposent à l’élargissement du mandat de la MINUAR (p. 708). Les Américains interprètent le problème rwandais à travers le prisme de la Somalie. - Le Black Caucus (le lobby des parlementaires noirs) ne manifeste pas d’intérêt ( p. 729-730). - Kofi Annan, chef du DOMP s’oppose au renforcement de la MINUAR. Il propose même qu’elle quitte le Rwanda avec les forces d’évacuation française et belge (p. 709-7010). En combinant la MINUAR avec ces forces d’évacuation et les forces occidentales prépositionnées dans la région, on disposait de plus de 3000 soldats compétents. Selon le général français Quesnot, il aurait suffi de 2000 hommes décidés pour arrêter les massacres. Selon le FPR, 900 soldats auraient pu suffire pour arrêter les massacres. Le général Dallaire a reçu de New York les ordres de ne pas évacuer les employés locaux de l’ONU (p.715).


  • Pendant le trimestre du génocide, au Conseil de Sécurité de l’ONU, le représentant du Gouvernement Intérimaire rwandais travaillait étroitement avec la France, puis avec Djibouti et Oman (p.731). - Le Secrétaire Général Boutros-Boutros Ghali bénéficiait habituellement d’un soutien appuyé de la France. Son représentant à Kigali, le Camerounais Roger Booh-Booh, envoie des informations lénifiantes, s’attardant peu sur les massacres en gommant leur dimension organisée contrairement à Dallaire. - Le personnel du secrétariat privilégiait l’interprétation de Booh-Booh. Au Conseil de Sécurité, le vocabulaire utilisé par le Secrétaire Général semble refléter le point de vue du Gouvernement Intérimaire rwandais, renforcé sans nul doute par la France (p.731-732). Ce vocabulaire reprend la description délibérément inexacte des tueries qui étaient diffusées par certains représentants de la France et par le Gouvernement. Intérimaire lui-même. Des militaires incontrôlés et des groupes de civils armés cédaient à des inimitiés ethniques profondément ancrées dans leurs habitudes. (p.744).




  • Le Nigeria est l’un des rares du conseil à réagir, sans succès. Mais il y a un blocage général sur le mot génocide. Même du Nigeria. La France ne cessa pas d’apporter son soutien au gouvernement intérimaire. Certains responsables politiques français menés par Mitterrand, étaient déterminés à empêcher une victoire du FPR, même si cela devait signifier de continuer de collaborer avec des tueurs en train de commettre un génocide (742). Le 16 mai, le ministre des affaires étrangères rwandais Bicamumpaka est autorisé à s’exprimer devant le conseil de sécurité. Il tenta de justifier le génocide (p. 750).


I.3 LA FRANCE
Le soutien français à Habyarimana. Il provient d’un raisonnement qui exhale les passions coloniales du siècle dernier (p. 142). En février 1993, Le français livrèrent aux FAR jusqu’ à 20 tonnes d’armes par jouir (p.145). Le 21 février 1993, le Monde, journal réputé sérieux, publia le récit d’un massacre de plusieurs centaines de civils par le FPR, qui n’avait en réalité jamais eu lieu (p. 146). Le général Christian Quesnot, chef de l’état-major particulier du président, et le général Jean-Pierre Huchon partagèrent l’analyse de Mitterrand sur la situation rwandaise.
Après la reprise des affrontements, certains militaires français haut gradés défendirent l’idée que les combattants du FPR étaient les Khmers noirs. Les militaires français utilisaient des expressions comme tutsiland et pays hutu dans leur correspondance privée et même dans leurs ordres officiels (p. 762-763). Dés le 7 Avril matin, quatre soldats français montaient la garde devant le domicile de Habyarimana. Pourquoi? Les troupes et conseillers français étaient censés avoir quitté le pays après les accords d’Arusha, en décembre 1993.
Il n’y a eu aucun récit sur le rôle joué par ces conseillers français de l’Etat –major de l’armée, de la gendarmerie, etc., soit au moins 40 militaires dans les premiers jours de la crise, alors que les officiers qu’ils avaient entraînés, ordonnaient à leurs soldats de massacrer les civils (p. 764). La France accorda au Gouvernement Intérimaire un soutien politique discret mais vital (765). Lorsque quatre ans après les événements, un haut responsable français connaissant bien le dossier rwandais, était interrogé pour préciser si les pressions venant de Paris avaient apporté des changements significatifs dans la politique du Gouvernement des génocidaires, il rétorqua : quelles pressions? Il n’y avait pas de pressions (p. 770). Pendant le génocide, le lieutenant- colonel Cyprien Kayumba passa 27 jours à Paris, pour tenter d’accélérer les fournitures d’armes et de munitions à l’Armées rwandaise. Il rencontrait fréquemment le général Jean- Pierre Huchon (p.770). Pendant le génocide, Paul Baril est engagé par le Ministre rwandais de la Défense pour diriger un programme de formation de 30 à 60 hommes au tir et aux techniques d’infiltration : une unité d’élite. L’opération avait reçu le nom de code <opération insecticide>, signifiant, que l’opération se distinait à exterminer les Inyenzi : les cafard. Barril reçu à cet effet 1200 000 dollars (p. 774-775).
De nombreux témoignages mentionnent la présence de soldats blancs francophones durant le génocide. Un officier français a répondu à Patrick de Saint-Exupéry qu’il s’agissait probablement dés mercenaires (p. 775 – 776).
L’opération Turquoise avait en fait un objet parallèle à celui de sauver des vies, celui d’empêcher une victoire du FPR (p. 777). Aux Nations Unies, les diplomates français qui essayaient d’obtenir un soutien pour l’opération Turquoise, montrèrent pour commencer une carte qui proposait une zone sous contrôle de la France, devant englober tout le territoire situé à l’ouest d’une ligne qui partait de Ruhengeri au nord, puis qui descendait en direction du Sud-est, vers Kigali, et finissait sa course, dans une direction Sud–ouest, à Butare. Cette zone aurait compris Gisenyi, là où le Gouvernement Intérimaire s’était réfugié. D’où Habyarimana était originaire, comme beaucoup d’officier de haut rang, où les forces du Gouvernement avaient concentré le gros des groupes et ravitaillement, le site idéal pour lancer une contre –offensive (p. 779). Un détachement français de 200 soldats d’élite est entré à Gisenyi dès le début de la Turquoise (24 juin), prêt à protéger la ville qui abritait le Gouvernement génocidaire. Cet épisode parait si gênant qu’il ne figure pas dans le rapport de la mission parlementaire d’information (p.784). Que cache-t-il? Mi-juillet 1994, les principaux responsables du Gouvernement Intérimaire étaient à Cyangugu en zone Turquoise et reconstituaient leur gouvernement. L’ambassadeur de France, Yannick Gérard, proposa à Paris d’arrêter ce Gouvernement en fuite. Bruno Delaye, le Monsieur Afrique de Mitterrand, s’y opposa. Ensuite de quoi, le 7 Juillet, l’état-major tactique de l’Armée française a provoqué et organisé l’évacuation de ce Gouvernement vers le Zaïre (p. 795-796). Le journaliste Sam Kiley (A French Hand in Genocide, the times, 09/04/98) a accusé les soldats François d’avoir évacué le colonel Bagosora. Les soldats français ravitaillèrent même en carburant, avant leur départ pour le zaïre, les camions de l’Armée rwandaise chargés du butin pillé dans les maisons et des magasins. Au Zaïre, des soldats français promenaient leurs collègues rwandais dans les véhicules officiels (p. 798). Le rapport de la mission parlementaire française d’information sur le Rwanda est bien loin d’établir la responsabilité des divers décideurs politiques et militaires (p. 890).

I.4 LE FPR
Les 39 pages sur les exactions du FPR (p. 805, 808, et 817-853) ont été présentées comme la révélation du livre (Libération, 31/03). Refusant l’impunité, les auteurs ont pris, avec raison, le parti de ne pas les cacher. Ils commencent ainsi le chapitre traitant de la question. Le Front Patriotique Rwandais mit fin au génocide de 1994  en infligeant une défaite aux autorités civiles et militaires responsables de tueries. Dans la poursuite d’une victoire militaire et de l’arrêt du génocide, le FPR tua des milliers de gens, aussi bien des non combattants que des troupes gouvernementales et des miliciens. En cherchant à établir leur contrôle sur la population locale, ils tuèrent aussi des civils par des nombreuses exécutions sommaires et des massacres. Il semble qu’il ait tué des dizaines de milliers de gens durant les quatre mois de combat entre Avril et Juillet. Les tueries diminuèrent en Août et réduisirent nettement après la mi- septembre (p.805). Ils constatent plus loin ce qui suit. Les pressions exercées par Kofi Annan, ainsi que par les États-Uniens, et peut-être par d’autres en coulisse, renforcèrent, au sein de Gouvernement, la position des modérés qui voulait mettre fin aux attaques visant les civils (p. 850). Un commentaire d’un dirigeant américain, en septembre 1994 disait ce qui suit. Trois choix s’offraient à nous. 1° Soutenir le Gouvernement génocidaire, ce qui était impossible. 2° Soutenir le FPR, ce qui était possible. 3° Ne soutenir aucun des deux, ce qui était inacceptable, car les génocidaires auraient alors pu revenir et gagner (p.849). Bien qu’il soit très difficile d’établir le nombre approximatif de personnes tuées par le FPR, l’ouvrage avance sur la base d’indications partielles et non confirmées, un nombre de victimes compris au minimum entre 25 000 et 30 000. Il est impossible de dire combien de ces victimes avaient participé activement au génocide, ou combien étaient engagées dans des opérations militaires contre le FPR, au moment où elles furent tuées (p. 851). Il est en tout cas certain qu’en plusieurs endroits, il s’agissait de civils non combattants, y compris des enfants (comme à Mukingi ou à Gatenzi). Il y eut aussi beaucoup d’exécutions sommaires et arbitraires. Selon un ancien témoin soldat du FPR, considéré comme crédible et convaincant, des milliers des prisonniers civils, attachés, ont été tués à coups de marteau ou d’instruments contondants, puis leurs corps brûlés au quartier général du service des renseignements militaires à Masaka, ou au camp de Gabiro, dans le parc National de l’Kagera (p. 837-838). Certain types d’exactions étaient perpétrés avec une telle fréquence et d’une manière tellement similaire, qu’elles devaient être dirigées par ces officiers qui le commandaient en haut lieu. Il est probable que ces types d’abus étaient connus et tolérés par les plus hautes autorités du FPR (p.808). La trop faible réprobation de la communauté internationale a pu laisser croire que les tueries de civils, si elles étaient perpétrés à la suite d’un génocide, étaient compréhensibles et pouvaient être tolérées. De cette façon, la porte était ouverte aux massacres futurs (p. 853).
Cette réprobation nécessaire est d’autant plus forte et efficace qu’elle portée par des milieux non complaisants avec l’idéologie génocidaire du Hutu power, et ses corollaires négationnistes. C’est manifestement le cas avec cet ouvrage. A en juger par les auditions de la Mission d’information parlementaire française, par les clichés d’une partie de la presse et par la tranquillité laissée aux suspects du génocide réfugiés dans l’hexagone, ce n’est pas encore vraiment le cas en France. Ni au Vatican, ni en Flandre. Il est clair, qu’on y encourageait une mécanique génocidaire ou réconforté ses mécanismes. Regarder en face de telles complicités et y devenir intolérant permet d’être crédible quand on exige de Kigali l’intolérance aux crimes commis par certains officiers. Les auteurs de cet ouvrage le sont dans leur dénonciation. Et nous partageons leur avis sur la grave danger qu’il y a à laisser ces officiers-là, impunis, suivre ou mener d’autres guerres dans l’Afrique des Grands Lacs. L’incontestable travail de construction civile entrepris depuis cinq ans au Rwanda risque fort d’en être moralement ruiné»


II. UN COMMENTAIRE
Ce texte n’a vraiment pas besoin de commentaire. Celui-ci n’a qu’un but : signaler des thèses politiques dont ce texte constitue justement un cinglant démenti.
II.1 Une guerre civile
Par définition, une guerre civile est celle qui met face à face deux camps armés de la population d’un pays. Il a été clair par ce texte que ce qui s’est passé au Rwanda est un génocide, conçu et exécuté par la régime en place, dirigé contre une partie de la population, par la main d’une autre population et des forces gouvernementales. Parler de guerre civile est, non seulement une erreur, mais une manière de nier le génocide.
II.2 L’équilibrisme
Celui-ci consiste à distribuer à parité, les torts et les raisons, aux deux camps : les Hutu et les Tutsi ont tué, les FAR et les Interahamwe ont tué, le FPR aussi a tué. La conclusion est le double génocide ou le match nul.
Cette thèse est assez habile car elle a l’apparence de l’impartialité. Il ne résiste évidemment pas à un raisonnement objectif, à moins d’être simplement de mauvaise foi. Étant donné la persistance de cette thèse de « double génocide», rappelons ce que nous atteste ce rapport. - L’idéologie ethniste qui a sécrété les germes du génocide des Tutsi vient des partis politiques bien connus : Aprosoma, parmehutu, MRND-CDR, MDR- power. Le génocide fut préparé et exécuté par les forces armées appuyées par la population hutu entraînée par ce régime. Tel est le témoignage patent de ce rapport. - Lorsque ces forces génocidaires ont été chassées par le FPR, elles n’ont pas déposé les armes. Elles se sont reconstutuées au Nord-Kivu, prenant en otage de paisibles réfugiés. Ils sont revenus tuer la population par des commandons nommés « abacengezi» (infiltrés). Après le retour au pays de la masse des réfugiés, les irréductibles ont rejoint l’Armée du régime actuel du Congo-Kinshasa dans l’intention d’achever le génocide de Tutsi au Rwanda comme au Congo. C’est l’action libératrice du pays opérée d’abord par le FPR. Y avait-il moyen pour le FPR de faire ce qu’il a fait sans la guerre, sans la poursuite des génocidaires impénitents? Etait-il facile de trier sans erreur les innocents et les malfaiteurs dans une population mêlée sur les collines ou dans les camps ? Sans excuser d’éventuelles fautes individuelles, utiliser le terme de génocide pour le régime actuel, c’est manifestement un équilibrisme de mauvaise foi. Qu’est-ce que c’est un génocide? C’est une volonté appuyée par des actes tendant à « éliminer physiquement la totalité d’un groupe», de personnes sur une base commune : race, religion, nationalité, etc. L’intention d’éliminer tous les Hutu n’a existé que dans l’imaginaire des militants du « hutu- power»
II.3 le négativisme
Cette thèse a plusieurs niveaux. Le premier se limite à minimiser la gravité du génocide en diminuant les chiffres des victimes du génocide : le plus bas possible ou tout simplement éviter de donner un chiffre précis. Le second consiste à dire que les Hutu comme les Tutsi ont été tués de la même manière par des bandes d’extrémistes des deux bords. On peut comprendre cette forme de négativisme dans le langage devenu classique d’Itsembabwoko n’itsembatsemba » (Extermination d’une race et extermination totale). L’«itsembatsemba» vise les Hutu tués pendant le génocide et par les génocidaires. La vérité est que les Hutu englobés dans le génocide l’ont été pour l’unique raison qu’ils étaient considérés comme des « complices» des Tutsi (ibyitso). De la sorte, le terme « itsemba-tutsi» suffisait. Les Tutsi ont été tués parce qu’ils sont Tutsi, les Hutu parce qu’ils étaient liés aux Tutsi ou pratiquaient une politique qui leur était favorable comme le multipartisme. Ainsi la cause est la même : supprimer le Tutsi et ses partenaires. Les Hutu tués pour d’autres raisons (idées, partis politiques, règlement des comptes personnels, régionalismes) ne sont pas visés dans le langage d’« itsembatsemba». La négation totale est déjà vue dans la thèse de « la guerre civile ».

II.4 L’amnésie


Sous plusieurs prétextes, l’oubli du génocide est avancé. Les hommes et des femmes de religions sont les premiers à prêcher cet oubli «par charité». Il faut pardonner et oublier l’offense. Ils sautent volontairement les étapes antérieures au pardon religieux : l’aveu de la faute, le repentir, l’imploration du pardon et la réparation. L’opposition aux obsèques des « génocidés» et aux enterrements solennels vont dans ce sens d’amnésie. Un éditorial du journal catholique Kinyamateka disait : « Kuzikura abapfuye ni ukuzikura inzangano» (Déterrer les morts, c’est déterrer la haine).
II.5 La négligence des rescapés

La politique de « deux poids et deux mesures» qu’on observe va dans le sens de dévaloriser la gravité du génocide. D’un côté, on ne fait pas grand-chose pour les rescapés, de l’autre, on plaide chaudement pour les impliqués dans le génocide : le malheur, c’est que les prisons sont remplies, qu’elles contiennent des vieillards, des mineurs, des sans papiers, etc. Il faut plaider également pour toute bonne cause. Est-il normal qu’un enfant rescapé manque une école, une veuve manque un abri, un ancien réfugié manque une aide pour se situer sous le soleil de ce pays qu’il a retrouvé par une guerre meurtrière après la décennie d’errance? Ce sont – là des rescapés de l’ethnisme et du génocide qui dure depuis 1959. Ces gens, aujourd’hui sans biens et sans droits, ne sont pas tombés du ciel. La plupart de ces gens étaient riches. Leurs biens ont été spoliés ou détruits par ceux qui maintenant les jettent sous la pluie ou sous le soleil.


II.6 Un génocide sans génocidaire
Le principal intérêt de ce livre d’Alison Des Forges qu’on cite est d’avoir établir des responsabilités du génocide. Des individus, des groupes, des institutions, des Etats, des organismes, ont été identifiés. La gravité des un et des autres a été établie. Qui d’entre les principaux coupables a avoué sa faute et fait le nécessaire pour rétablir la justice? Des enquêtes ont commencé, des procès sont en cours. Qui a avoué? Même le pays le plus impliqué, la France, a conclu son enquête par un aveu de son innocence, admettant tout au plus et au bout des lèvres, quelques erreurs d’appréciation de certaines situations! Les enquêtes sur le rôle de l’ONU, de son Secrétaire général ou de l’OUA, vont sans doute conclure sur un brevet d’innocence. Même la Belgique par laquelle tous les malheurs ont commencé s’en est lavé les mains. Horroy, Logiest, n’en savent rien évidement pas !

L’Église catholique, la plus endettée en cette affaire, se contente de proclamer « sa foi en l’amour du prochain». En tant que « corps social», seul le bien est imputable; le mal est déclaré affaire des individus qu’elle n’a pas mandatés. Cette logique déjà boiteuse tourne court dès qu’un membre du haut clergé semble surpris la main dans le sac. Alors on crie persécution de l’Église! Il ne reste qu’à penser qu’il y a eu génocide sans génocidaires. Les quelques aveux de « petits coupables » qu’on a eus ici et là ne valent pas la chandelle pour expliquer ce qui est arrivé. Il ne reste plus qu’à accuser Satan qui est content d’être accusé, pour la simple raison qu’il n’a plus rien à sauver : il est en enfer pour l’éternité!


II.7 la colère populaire
Parmi les tentatives de justification du génocide, il y a la thèse de la colère populaire (Akajinya). Cette colère a utilisé deux supports d’application. Le premier fut la mort de Habyarimana. Tous les Tutsi ont tué le président hutu. Y compris les bébés égorgés dans le sein maternel. Et ce saint homme, les tutsi le tuent depuis 1959! La deuxième application de la thèse est la « haine atavique et séculaire» entre le Hutu et le Tutsi qui a fait surface lors de l’assassinat du président hutu. Cette thèse joue le rôle de catalyseur de toutes les revendications de « la bonne cause » des autochtones bantu hutu opprimés depuis toujours par ces « envahisseurs éthiopiens » de Tutsi. Jusqu’ici, rares sont les hommes de science qui ont osent mettre en doute cette « théorie de l’origine étrangères des Tutsi et même des Hutu ». Cette fausse « évidence » vient de l’anthropologie coloniale. Les Hutu, dit-elle, viennent de l’Ouest-africain ; les Tutsi de la corne de l’Afrique; seuls les Twa sont les vrais «indigènes», comme création spontanée de la forêt. Personne ne s’occupe de la moindre preuve de cette théorie. Ni la réalité des mouvements migratoires mondiaux et dans tous les sens, ni la ressemblance de nos populations avec celles des autres contrées ne constituent une preuve. Pourquoi les points de départ dés brassages des populations ne serait-il pas plutôt dans nos régions des Grands Lacs où l’archéologie situe l’origine de l’humanité? La pression politique aidant, même cette fausse théorie migratoire est oubliée. Les Tutsi restent les seuls étrangers; les Hutu deviennent les seuls rwandais authentiques; les Twa retournent, sans doute dans la forêt, car on en parle plus dans les enjeux politiques. Cette ignorance des Twa facilite l’organisation du « duel» entre les deux grands.
II.8 Le Tutsi a opprimé le Hutu
Combien le disent en sachant que c’est faux? Cette thèse politique, combien têtue, se base sur deux principales gratuités : l’esclavage séculaire du Hutu par le Tutsi et l’identification du clan nyiginya avec tous les Tutsi. Voyons ces choses de près. L’oppression séculaire du menu peuple hutu. Voilà une idée qui a mobilisé tant d’âmes généreuses! Combien d’hommes savent que le Rwanda dans ses limites actuelles n’est pas si ancien ? Le Gisaka (ancienne préfecture de Kibungo) fut rwandisé sous Mutara Rwogera mort en 1853. Les royaumes du Nord et du Nord-Ouest (Gisenyi et Ruhengeri) ont gardé leur autonomie administrative jusqu’ au temps de Yuhi Musinga et ne l’ont perdue que par la colonisation belge. Ferdinand Nahimana le dit bien dans son livre «  Le Rwanda. Émergence d’un État» (L’ Harmattan, 1993). « Ce fut l’administration belge, écrit-il, qui imposa un cadre de représentant politiques Batutsi au pays » ( p. 291). Même dans les régions centrales du pays oú l’administration centrale nyiginya était ancienne, celle-ci transitait par les patriarches familiaux qui avaient les moyens de tempérer les rigueurs de la loi. De plus, il n’existait pas de prestations limitées aux Hutu.Ceci dit, que signifie l’affirmation, combien têtue, que des siècles durant, les Hutu ont subi l’esclavage des Tutsi? On fait comme si les sévices de l’administration coloniale (corvée, chicote, emprisonnement, etc.) venaient du pouvoir traditionnel. Dans ce lot de reproches, on ajoute le contrat bovin (ubuhake). Pourtant, celui-ci ne concernait pas spécialement les Hutu mais bien les Tutsi, en majorité possesseurs de vaches.
Avant la colonisation, le Rwanda était dirigé par la monarchie tutsi. Combien de gens savent que c’est là une fausse évidence! Écoutez seulement.
Le livre de Marcel d’Hertefelf  Les clans du Rwanda ancien (Tervuren, 1971) fait tomber ce masque. D’après son enquête de 1960, aucun clan n’est mono-ethnique. Le clan nyiginya lui-même comprend : Hutu = 57,50; Tutsi= 42,27 ; Twa = 0,15. On comprend par-là l’absurdité de dire Nyiginya = Tutsi à propos de la monarchie qui a dirigé le pays avant la colonisation. Car, en effet, la majorité des Abanyiginya sont Hutu comme l’indique cette enquête. Son auteur, M. d’ Hertefelt, n’a aucun penchant particulier pour le Tutsi qui l’aurait aidé à donner un coup de pousse à une étude dont le résultat contredit le dogme politique de son pays, puissance tutélaire du Rwanda. Indirectement, cette étude démontre que ce que l’on nomme aujourd’hui ethnies n’est pas une question de «  races» mais de « rang social », basé sur la richesse et le pouvoir politique. Le Nyiginya socialement haut placé est dit Tutsi, le Nyiginya pauvre est dit Hutu. Cette règle vaut pour tous les clans du Rwanda. Malheureusement, et bien des gens ne s’en rendent pas compte. Cette réalité sociale a été profondément modifiée par la colonisation : ce qui était rang sociale devient « ethnie» dans le sens de « race». Cette modification est fixée pour de bon par l’imposition de la carte « ethnique». Ainsi la frontière traditionnellement ouverte entre les trois groupes sociaux est aujourd’hui hermétiquement fermée. C’est cette double corruption de notre philosophie sociale qui a permis les deux thèses politiques dont on s’occupe présentement : 1/ les Tutsi sont une race différente de celle des hutu, 2/ la première a opprimé la seconde. C’est ce que dit textuellement Mgr perraudin dans sa lettre de carême de 1959 qui précise : « le pouvoir et la richesse sont dans les mains d’une seule race. Identifier l’injustice avec une race fut la redoutable faute qui a ouvert la porte au génocide.
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