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Fatalitas ! par Gaston Leroux


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XXI



Explications tragiques


À la porte de la chambre où Françoise était allée s’enfermer avec son désespoir et la résolution d’en finir avec les horreurs de la vie, une domestique était venue frapper. Elle apportait le mot écrit en hâte par Didier. Françoise, de sa fenêtre où elle avait appuyé son front en feu, venait de voir Gisèle sortir de la villa et, quelques instants plus tard, son mari : « Va la rejoindre ! » avait-elle murmuré avec une amertume terrible...

Quand elle eut lu le billet de Didier qui était ainsi libellé : « Saynthine n’est pas mort et continue de poursuivre Gisèle... Ne t’inquiète pas si je rentre tard ce soir ! » elle se dit tout haut à elle-même : « Ils sont deux aussi pour celle-là, comme pour Nina ! » Ah ! le dégoût suprême !... »

Elle déchira le billet et en laissa tomber les morceaux. Ainsi eût-elle voulu arracher son cœur... Mais comme c’était beaucoup plus difficile que de se tirer simplement un coup de revolver dans la poitrine, elle se leva et se dirigea vers un petit meuble où elle savait trouver l’arme qui allait être le grand remède à tous ses maux...

En passant devant une glace, Françoise se vit et recula d’effroi...

« Mon Dieu ! dit-elle, j’ai l’air de mon propre fantôme... »

Dans le même moment la porte s’ouvrit, et une femme se précipitait vers elle :

« Françoise ! que se passe-t-il ? »

C’était Mme Martens qui, avertie par la confidence inquiète de la femme de chambre, forçait la consigne.

« Oh ! ma pauvre enfant, tu as l’air d’une morte !

– C’est ce que j’étais en train de me dire, répondit Françoise avec un sourire glacé !... et plût à Dieu que je le fusse déjà !...

– Tu m’épouvantes !... Reviens à toi, ma petite Françoise !... qu’est-il arrivé ?... Confie-toi à moi, je t’en supplie ?... Il y a quelques jours encore tu me parlais de ton bonheur...

– Oui !... eh bien, c’est fini !... ça n’a pas été long, n’est-ce pas !...

– Où est ton mari ?... Il faut que je lui parle !...

– Mon mari est avec Gisèle !... »

Ceci fut dit d’une telle sorte, simple et terrible à la fois, que Mme Martens fut renseignée du coup...

Elle comprit !... elle prit Françoise dans ses bras... et celle-ci se laissait faire sans qu’elle parût même s’apercevoir de l’étreinte :

« Françoise ! Françoise ! es-tu folle ?... qu’est-ce que tu crois ?

– Je ne crois pas !... répondit la statue, j’ai vu !...

– Tu as vu quoi ?...

– Je les ai vus s’embrasser comme ne s’embrassent pas deux...

– Ça, ce n’est pas vrai !...

– Décidément, répliqua Françoise avec un sourire d’outre-tombe, décidément, ma chère... vous croyez beaucoup à la vertu de M. d’Haumont !... Eh bien, apprenez que M. d’Haumont, qui nous a raconté ce qu’il a voulu concernant Nina-Noha, est, par-dessus le marché, l’amant de Gisèle !...

– Malheureuse ! C’est sa fille !... »

À cette révélation, la statue parut se ranimer... du sang afflua à ses tempes... la vie alluma sa flamme dans ce regard éteint.

« Sa fille ! sa fille ! répéta Françoise... Et comment savez-vous donc, madame, que c’est sa fille ?...

– Ah ! je le sais depuis quinze ans !...

– Vous savez cela depuis quinze ans !... Depuis quinze ans, vous savez que Gisèle est la fille...

– La fille de Raoul de Saint-Dalmas !... Oui, ma petite Françoise, je sais cela... Mais comprends donc que j’ai reconnu ton mari tout de suite !... Notre famille était amie des Saint-Dalmas !... »

Françoise considérait Mme Martens avec des yeux hagards :

« Ah ! ah ! soupira-t-elle... vous saviez, vous saviez qu’il...

– Je sais que tu as été sublime, je sais comme toi qu’il est innocent !... Oh ! Françoise, Françoise, parce que tu l’as vu embrasser Gisèle... Mais c’est sa fille !... mais c’est sa fille !... »

Maintenant Françoise tremblait de fièvre, elle claquait des dents :

« Pourquoi ne me l’a-t-il pas dit à moi ?... Pourquoi vous a-t-il dit, à vous, une chose pareille ? »

Mme Martens prit entre les siennes les mains glacées de la malheureuse et les plaça sur son cœur ami, sur son cœur douloureusement fidèle :

« Ah ! crois-moi, Françoise, il était résolu à tout te dire après avoir révélé à Gisèle le secret de sa naissance !... Si tu les as vus dans les bras l’un de l’autre, c’est que maintenant l’enfant sait tout !... Ah ! Françoise, ne doute pas de ton mari !... C’est le meilleur et le plus malheureux des hommes !... et si une faute a été commise, ce n’est pas lui le plus coupable !

– Vous connaissez donc la mère de Gisèle, madame ?

– Non !... ceci est le secret de Raoul... on parlait d’une femme mariée... je dis que cette femme est coupable car elle n’a rien fait pour cette enfant... et que la première chose qu’a faite Raoul en sortant de son enfer a été de la rechercher, de la sauver de la misère, de lui apporter une protection de tous les instants. Ne t’étonne pas que je plaide la cause de ton mari avec cette chaleur... je l’ai connu... il y a longtemps !... Il était jeune, il a fait des folies... mais c’était un noble cœur, et chez nous, dans notre famille, je parle chez mon père, chez ma mère où il fréquentait, nous n’avons jamais douté de lui !... Jamais !... Ah ! Françoise, comprends mon émotion, l’autre jour, quand je l’ai reconnu dans ce mari que tu me présentais !... Ton mari !... Comprends maintenant que, depuis, il m’a confié toute votre terrible histoire... Il sait qu’il peut me parler comme à la plus fidèle amie !... Il sait comme je t’aime, ma petite Françoise !... Si tu savais, toi, avec quel accent il est venu me dire : « Elle savait tout ! Et elle a continué de m’aimer !... Son amour, la seule chose qui compte pour moi en ce monde, me sauve !... et le bagne peut revenir, et la mort peut me frapper !... Je remercie le Ciel, car j’ai été le plus heureux des hommes !... à cause d’elle !... à cause de ma Françoise ! » et en disant cela, il sanglotait !... Ah ! laisse-moi pleurer !... »

Mais déjà Françoise pleurait, elle aussi...

Ce fut Françoise qui, la première, reconquit la pleine possession d’elle-même...

« Mais alors... fit-elle, mais alors ? cette histoire de poursuite est vraie !... Et Didier, où est-il ?... quels dangers court-il encore ?... »

C’était au tour de Mme Martens de ne pas comprendre... Françoise la mit au courant du départ précipité de Gisèle suivi de Didier... De toute évidence, il s’était passé quelque chose d’inattendu et peut-être de très redoutable !...

« Et il ne rentre pas !... »

Elle voulait sortir, essayer de le retrouver...

Mme Martens lui fit entendre qu’elle n’avait aucune indication, aucun indice... Elle lui fit espérer qu’il pouvait rentrer d’un moment à l’autre... Enfin elle la persuada, beaucoup plus facilement qu’elle n’avait osé l’espérer, de rester à la villa pour qu’elle y attendît le retour de Didier...

Mme Martens, alors, la voyant plus calme, la quitta.

Aussitôt que Mme Martens fut partie, Françoise, jetant une écharpe sur ses épaules, descendit, par la terrasse, jusqu’à la mer, et, à travers les rochers, se dirigea vers une certaine cabane de pêcheur...


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