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Fatalitas ! par Gaston Leroux


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XXII



À fond de cale


Palas était fort bon nageur. Ce fut un jeu pour lui d’atteindre en quelques brassées, et sans être aperçu du bord, la chaloupe que la Tullia traînait derrière elle à la remorque...

La nuit commençante semblait propice à son hardi dessein... Se hissant, à l’aide du cordage qui retenait la chaloupe, jusqu’au bastingage de la Tullia, il choisit son moment pour se glisser vers le gaillard d’arrière...

Tout l’équipage était alors à la manœuvre et il ne lui fut point malaisé de se dissimuler derrière quelques ballots qui encombraient le pont...

De là il pouvait voir et entendre...

Où était sa fille ?... Qu’avait-on fait de sa fille ?...

Il y avait bien des chances pour que la malheureuse fût retenue prisonnière dans le roof central qui devait être le seul endroit à peu près propre du bord... servant de dortoir, de salle à manger et de carré aux officiers !... Les officiers de la Tullia !... Palas venait de voir passer quelques figures... tout ce monde-là lui rappelait certaines silhouettes qui avaient habité ses cauchemars pendant dix ans !...

Comme il n’avait pas encore aperçu Arigonde, Palas était à peu près certain que celui-ci devait se trouver auprès de Gisèle... Se rapprocher de sa fille, l’avertir de sa présence au plus tôt, tenter de l’enlever si la chose apparaissait possible, et cela dans la nuit même, n’était pas un plan irréalisable... grâce à la chaloupe que la goélette traînait derrière elle...

La Tullia avait mis le cap sur l’Orient, mais n’était pas très éloignée de la côte... Palas pouvait espérer que le Parisien cesserait, pendant quelques instants, à l’heure du repas, d’imposer à la malheureuse enfant son ignoble présence... Alors il saurait la délivrer... alors, la chaloupe était là, prête à recueillir Palas et Gisèle... Avant tout, il fallait agir avec une excessive prudence. Un geste maladroit pouvait les perdre tous les deux... Palas pensa que la surveillance devait forcément se relâcher en pleine mer... Les forbans n’auraient plus rien à craindre. Et peut-être même Palas allait-il bientôt voir apparaître sur le pont la captive et son ignoble ravisseur...

Cependant le temps passait... et Gisèle restait invisible...

Alors les pensées de Palas devinrent tellement sombres que son immobilité lui fut tout à coup insupportable... Cette effroyable brute d’Arigonde était capable du crime le plus odieux.

Palas regretta de n’avoir pas accepté que Yoyo vînt partager comme il le lui avait offert l’aventure... Il avait cru plus habile de l’expédier immédiatement à Chéri-Bibi pour que celui-ci fût instruit du drame que la Tullia emportait dans ses flancs.

Palas n’y tient plus... Il quitte son refuge, il profite de ce que les hommes de quart sont tous, dans le moment, réunis sur le gaillard d’avant, pour ramper sur le pont et gagner du côté de la grande écoutille qui est restée ouverte sur la cale...

À la suite d’une manœuvre inattendue, il n’eut que le temps d’arriver à cette écoutille et de se jeter sur cette échelle... Des commandements, des coups de sifflets ont retenti... des hommes accourent... le second apparaît. La manœuvre rompt le calme de la nuit, le bâtiment a changé de route, remis le cap sur l’horizon... et maintenant il danse à la lame...

Palas a descendu encore quelques échelons, de peur d’être aperçu...

Et soudain quelque chose se passe au-dessus de sa tête qu’il ne comprend pas tout d’abord... Les hommes achèvent de fermer la grande écoutille, glissant les panneaux au-dessus de sa tête. Ils l’enferment à fond de cale !... et cela sans qu’ils s’en doutent, de toute évidence !... Palas a laissé faire, épouvanté, mais espérant tout de même encore que, tout à l’heure, quand le pont sera redevenu désert, le panneau cédera à son effort tout-puissant...

La force accomplit de tels miracles au bagne que lorsqu’elle en est sortie, elle a peine à croire que quelque chose lui résistera, surtout lorsqu’elle a pour la décupler des sentiments comme ceux qui bouillonnent dans le cœur de Palas !...

Quelques minutes d’immobilité et de stupeur...

Il est là, suspendu à une échelle, dans l’abîme noir... Va-t-il escalader la nuit ? Va-t-il descendre au fond des ténèbres ?... Chercher à tâtons quelque issue ?

Le balancement du navire s’est accentué, mais le roulis a cessé. La Tullia doit maintenant filer, appuyée sur le vent...

Il monte, et sa tête heurte le panneau, sa main le tâte et glisse... Maintenant ses épaules s’arc-boutent.

Obscure cariatide dans le néant noir de cette cale, il déploie une force prodigieuse et vaine... la sueur coule sur ses muscles vaincus...

Mais tout à coup, un rai de lumière glisse comme une lame d’argent dans l’interstice de deux planches et apporte un peu de vie au fond de cette nuit opaque... Il tend la main à cette lumière et la cueille dans sa paume comme une onde pâle et glacée... Mais elle lui échappe, disparaît... On a dû jeter quelque bâche, là-haut !

Ne pouvant plus monter, il descend...

Il descend et il écoute !...

Un murmure !... des voix !... Le grondement d’une voix d’homme... et... et un sanglot !... c’est sa fille !

C’est sa fille qui pleure !...

Oh ! alors, il prend la nuit à pleins bras ! et il se bat avec elle ! avec les formes mystérieuses dont elle encombre son chemin. Avec quelle force et quelle prudence il lutte contre le noir ! Comme il le repousse, le rejette, l’écarte, le roule sous lui, et lui met les genoux dessus !...

Ah ! c’est une besogne formidable que de déplacer un arrimage pareil !...

Mais il y a sa fille qui pleure derrière tout ça !...

Il s’arrête, il n’entend plus rien ! Cette douleur le guidait... maintenant il regrette que sa fille ne pleure plus ! ...

Alors, à tout hasard, il bouscule encore la nuit... et quelque chose cède dans la nuit... quelque chose qui lui rompt les bras et l’écrase... mais quelque chose derrière quoi apparaît une petite lueur... une petite lumière, couleur de sang... et en même temps une voix d’homme accourt jusqu’à son oreille... une voix d’homme qu’il connaît bien et qui dit : « Tiens ! où est passé le couteau ? »...

......................................................

Gisèle était montée à bord de la Tullia, persuadée qu’elle n’avait rien à craindre pour elle.

Dans son taxi elle avait réfléchi que la manœuvre dont un anonyme menaçait, dans le moment, M. d’Haumont, était avant tout une tentative de chantage...

Chantage terrible et qu’il fallait subir et pour lequel elle avait été choisie comme intermédiaire, parce qu’elle était peu à redouter... Il allait sans doute falloir s’entendre. On allait lui fixer un chiffre et on agirait sur son esprit pour qu’elle déterminât M. d’Haumont à céder.

Elle avait donc suivi le capitaine sur la Tullia avec docilité et décision.

Sur la prière de celui-ci, elle était descendue dans le roof central...

Un coin d’élégance inattendu, ce roof de goélette, soigné, ciré, astiqué comme une jolie cabine de maître à bord d’un voilier de plaisance...

Là se trouvait un homme dont elle ne pouvait apercevoir la figure qu’assez mal, dans l’ombre...

Le capitaine alluma lui-même la lampe suspendue au-dessus de la table centrale entre deux petites alcôves qui servaient de divans, le jour, et qui se transformaient en couchettes, la nuit.

Mais Gisèle poussa un cri : elle venait de reconnaître M. de Saynthine !...

Et aussitôt, d’un mouvement spontané, elle voulut se rejeter en arrière, regagner le pont...

Mais déjà Arigonde la retenait de force, la rejetait au fond du roof cependant que le capitaine qui, sans doute, en avait vu bien d’autres, refermait lui-même les deux battants de la petite porte et remontait en sifflotant un vieil air barbaresque lancinant et mélancolique...

« Je vous demande pardon de cette brutalité, commença par déclarer M. de Saynthine en s’inclinant avec galanterie, mais j’éprouve tant de joie dans votre compagnie que l’idée de vous perdre par un stupide malentendu me fait sortir de mon naturel qui est généralement aimable avec les dames... »

Et comme Gisèle ne répondait pas, le considérant avec un effroi grandissant :

« Ne tremblez pas ainsi, continua-t-il... Je ne vous veux aucun mal, au contraire... je ne suis ressuscité que parce que je vous veux du bien !... »

Elle se taisait toujours, alors il soupira :

« Ainsi ! mon enfant, vous aussi vous me croyiez mort ?... Vous avez dû bien pleurer !... »

Même silence. M. de Saynthine recommença de s’excuser :

« Qu’est-ce qu’a bien pu vous raconter votre canaille de père ? Vous a-t-il dit que nous avons été au bagne ensemble ?... Et que nous faisions là-bas une jolie paire d’amis ?... »

Cette fois Gisèle parla, ou plutôt râla, le suppliant de se taire.

« Si vous ne voulez pas que je devienne folle, taisez-vous !... »

Elle ne put en dire davantage... Elle étouffait sous les sanglots.

« C’est la première fois que je fais pleurer une femme, ricana Arigonde... Vous m’en voyez, ma chère enfant, aux mille regrets !... Si vous étiez raisonnable, vous vous feriez un peu moins de bile pour votre noble père. Il est loin de mériter l’intérêt que vous semblez lui porter... Et surtout, c’est un bonhomme, voyez-vous, dont il convient de se méfier... »

Et comme Gisèle avait levé sur lui un regard terriblement hostile, au milieu de ses larmes, il s’expliqua :

« Ainsi, moi, qui vous parle, qui vous regarde, qui vous admire et qui vous aime... Eh bien, s’il n’avait tenu qu’à lui, je ne pourrais ni vous parler, ni vous répondre, ni vous admirer, ni vous aimer !... Ah ! l’affaire avait été bien montée, allez !... et il a pu me croire convenablement trépassé avec quelques camarades !... Qu’est-ce que c’est pour l’assassin du banquier Raynaud que la mort de trois ou quatre vieux camarades de bagne qui le gênent ?... Je vous en prie, mademoiselle, ne vous trouvez pas mal !... la conversation n’est pas encore terminée... et puis, je vais vous dire... je n’en veux pas du tout à monsieur votre père !... Au contraire, moi, je l’admire cet homme-là !... et la preuve, c’est que je veux entrer dans sa famille !... Vous voyez que tout peut s’arranger !... mademoiselle Gisèle, M. de Saynthine a l’honneur de vous demander votre main !... »

Gisèle maintenant était renseignée sur le genre de chantage adopté par Saynthine et sur ce qu’on voulait d’elle dans cette affaire.

Et maintenant, quelle que fût sa fièvre, si grande que fût son horreur, en dépit du trouble plein d’épouvante où la jetaient ces propos terribles pour son père, au fond de l’abîme où elle se débattait, sa pauvre, sa misérable pauvre petite perspicacité féminine en éveil lui faisait entrevoir une possibilité de salut... ou, tout au moins, espérer le retard de la catastrophe, une suspension des coups du destin dans un moment où elle était à l’entière disposition de son bourreau et où elle pouvait craindre le pire...

Ce n’était point seulement de l’argent que le misérable voulait, comme elle l’avait d’abord cru quand il n’était encore pour elle qu’un anonyme... Ce n’était pas seulement elle-même, Gisèle, qu’il désirait, comme elle l’avait pensé quand Saynthine avait si subitement ressuscité au fond de ce traquenard... c’était la fille et l’argent !...

Ses dernières paroles ne laissaient aucun doute à cet égard... Ce n’était pas ironiquement qu’il avait demandé la main de Gisèle. Il l’avait demandée sur un ton terriblement sérieux... Gisèle comprit ce que représentait pour ce bandit la réussite d’un plan pareil... et la force d’un Saynthine, marié à la fille (fût-elle naturelle) de M. d’Haumont !...

Gisèle s’était replongée la tête dans ses mains. Arigonde crut que le moment était indiqué d’intervenir et il s’assit auprès d’elle. Il voulut lui prendre ces petits poings qui s’obstinaient à cacher un visage dont la vue lui avait toujours été agréable...

« Ah çà ! fit-il... mon seul aspect vous fait donc peur ?...

– Non ! eut la force de répondre la jeune fille sur un ton très bas, très épuisé, mais qui déjà avait perdu quelque chose de son hostilité et de son humeur première... ce sont vos manières qui me font peur !...

– Eh bien, pour vous faire plaisir, je vais en changer... et tout de suite !... Tenez, je ne veux plus être que le plus humble et le plus dévoué de vos esclaves !... Tous, à bord de la Tullia, nous sommes vos esclaves, mademoiselle Gisèle !... Pour commencer, je vais vous servir de steward, voulez-vous ?... Vous devez avoir faim ?... Non ?... Moi, je vous dis qu’il faut manger !... Tenez, vous allez voir comme cela va être gentil... Nous allons faire la dînette tous les deux !... »

Gisèle ne dit pas non !...

Si malin que soit un homme, si fort, si intelligent qu’il puisse être, un air de femme (simplement l’air qu’elle prend pour parler ou pour ne rien dire) est plus fort que lui !...

Le galant est roulé d’avance par une enfant innocente, et même par une niaise !... Par exemple, le Parisien, au fond de cette cabine de bateau transformée en cabinet particulier, s’imagine que son charme opère !... Encore une qui n’aurait pas fait longtemps la méchante !... Aussi faut-il le voir maintenant, empressé et galant !... Il raconte des histoires amusantes... Il veut paraître spirituel... Il est aux petits soins. Il se dérange pour le moindre objet... Gisèle est conquise !...

Et le voilà tout à coup revenu encore une fois de loin, de très loin, en apercevant, dans une petite glace, le geste de Gisèle qui, pendant qu’il a le dos tourné, ramasse sur la table un couteau qu’elle fait disparaître...

Tremblant de fureur à peine contenue, il revient à Gisèle, et la malheureuse voit se pencher sur elle un visage qui lui sourit affreusement et qui lui demande, les yeux dans les yeux :

« Tiens, où est donc passé le couteau ?... »

Arigonde n’a même pas besoin de faire un geste pour le lui reprendre, ce pauvre petit couteau, Gisèle le jette sur la table en balbutiant :

« Ce n’était pas pour vous !

– Vraiment !... Et pour qui donc, mademoiselle, pour qui le petit couteau ?...

– Pour moi !... »

Le Parisien éclata d’un rire sinistre :

« Des idées de suicide ? Ça vous passera !... »

Et Gisèle sanglote !... Son geste malheureux a refait de cet homme un abominable tyran :

« Allons, commença-t-il, assez pleuré comme ça !... Essuyez vos larmes, je vous prie !... Je ne veux pas qu’on vous voie avec les yeux rouges, moi !... Pour qui me prendrait-on ?... »

Il s’est levé et ordonne à Gisèle de le suivre :

« Nous allons faire un petit tour sur le pont !... cela vous fera du bien de prendre l’air !... Ça vous changera les idées !... Vous paraissiez plus raisonnable tout à l’heure... Il faudra le redevenir, ma petite ! »

Il la fait passer devant lui... elle obéit. La voilà sur le pont, par une nuit magnifique... Elle n’est plus qu’une misérable petite chose entre ses mains !... Elle se sent perdue, complètement à la merci des caprices de ce monstre.

Elle regrette amèrement le couteau du suicide... pendant que l’autre, qui a passé son bras sous le sien, reprend un ton idyllique et lui fait des phrases sous les étoiles !...

Évidemment, M. de Saynthine pose pour la galerie... il sait qu’il est regardé... Le capitaine Amorgos et le jeune Nicopoli, son second (par la méchanceté de son venin, une vraie vipère), ne doivent pas être bien loin, épiant sans s’en donner l’air le moindre geste de cette promenade des deux amoureux sur le pont, par le plus beau clair de lune du monde...

Il ne déplaît pas à Arigonde de montrer à ces messieurs comment, en quelques heures, il a su conquérir sans tapage les bonnes grâces d’une charmante demoiselle qui, dès l’abord, en l’apercevant, avait commencé par manifester un désespoir mortel...

Devant les yeux qui le regardent manœuvrer (peut-être du haut de la cabine de dunette, peut-être derrière la misaine), il affecte ces façons auxquelles les amants ne manquent point d’avoir recours quand ils désirent prouver à l’univers qui les entoure que la dame qu’ils accompagnent n’aura bientôt plus rien à leur refuser.

Ce sont de ces airs penchés et enveloppants, de ces attentions délicates, mais un peu familières, qui ne sont permis qu’aux élus...

Ah ! comme Gisèle avait envie de crier vers les étoiles !... mais les étoiles sont trop haut... elles ne l’entendraient point... Et pour comble de malheur, pas l’ombre d’une voile sur la mer... pas une lumière humaine... pas un espoir à l’horizon !... Que va-t-elle devenir !... Seigneur ?...

Redescendre dans cette horrible prison...

Hélas ! voilà que le moment en est venu ! M. de Saynthine a jugé que cette comédie a assez duré !... Il conduit les pas hésitants de Gisèle vers l’escalier du roof.

Mais la jeune fille s’arrêta soudain... Arigonde comprend maintenant que la perspective de se retrouver enfermée avec lui va pousser Gisèle à quelque manifestation désespérée... Elle va appeler à son secours... comme une petite bête !... Et il va être ridicule !... Cette physionomie crispée, ces membres tremblants, il n’est pas difficile de deviner que cette enfant est prête à toutes les résistances...

Alors il joue le grand jeu. Il lui dit qu’elle peut aller se reposer sans crainte. Il n’est pas une brute (prétend-il). Et ce n’est pas dans une cabine de cargo qu’il a rêvé de posséder un bijou aussi rare...

Il saura attendre, il saura se faire aimer (et d’autres balivernes)... Ne doit-elle pas être sa femme ?... Elle peut aller reposer en paix, et, la saluant noblement, il s’éloigne...

Elle l’a regardé partir d’un air hébété, et puis tout à coup elle s’est mise à descendre cet escalier redoutable, comme si quelque chose de plus fort qu’elle, de plus puissant que sa volonté l’attirait là... en bas !...

Amorgos et Nicopoli, le capitaine et le second du bord, se sont bien amusés certes, et maintenant ils ne cachent rien du plaisir que leur a procuré la petite récréation de tout à l’heure. Ils ne manquent point d’en faire part à ce cher M. de Saynthine, « qui a vraiment du succès auprès des dames » !...

On a bu quelques bouteilles. Les cerveaux s’échauffent, les imaginations s’enflamment, les amours-propres se froissent... Celui de M. de Saynthine est à la torture, et depuis trop longtemps pour sa patience... Il ne saurait douter que ses compagnons se moquent de lui...

Et voilà qu’il se lève, en frappant la table d’un coup de poing formidable, comme un mal élevé... Ce petit Nicopoli lui porte particulièrement sur les nerfs !...

« Je fais ce que je veux, atteste Saynthine... quand je veux et où je veux !...

– Tu fais surtout ce qu’elle veut !... réplique Nicopoli. Tu n’es pas plus malin que les autres !... Elle te mène par le bout du nez... et la preuve, c’est que tu es là à nous raconter des histoires pendant qu’elle se fiche de toi dans sa cambuse !... »

L’autre s’est mis à jurer, ce qui ne saurait remplacer des raisons. Brutal, il renverse quelques flacons vides et apparaît sur le pont.

On sait où il va ! Il a prononcé ces mots : « Ce soir, si ça me plaît ! » Et il paraît que ça lui plaît ce soir, car il écarte le matelot de garde, devant le roof et descend, avec un grand tintamarre d’homme soûl, l’escalier qui conduit à la chambre de Gisèle.

Une lueur rougeâtre, venue de la lampe charbonneuse, éclaire sinistrement la petite pièce vide.

Une ombre est étendue dans l’une des alcôves... Vers cette ombre-là, la brute se penche... Il n’y a plus ni calcul, ni comédie... Il y a là une femme et son maître !...

Tant pis, ou tant mieux, s’il y a du bruit, on saura qu’il est au bout de sa patience !...

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