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Buridan le héros de la Tour de Nesle Beq michel Zévaco Buridan le héros de la Tour de Nesle


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Où il est question du fils du comte de Valois et du logis que trouva Lancelot Bigorne


« Hein ! » gronda Lancelot Bigorne en sursautant sur son escabeau.

Le sourire de Simon Malingre se fit plus mystérieux, plus triomphant, et il reprit :

« Oui, suppose, mon digne Lancelot, que pris de remords avant comme tu as été pris de remords après, tu n’aies pas exécuté l’ordre de Marguerite de Bourgogne et de son amant le comte de Valois.

– Ah çà ! bégaya Bigorne, effaré.

– Attends ! Suppose que n’ayant pas voulu jeter l’enfant dans le fleuve, tu l’aies déposé quelque part... dans une cabane, une chaumière écartée, par exemple !... »

Bigorne devint livide, et sa main, tout doucement, alla chercher sa dague. La vérité, ou ce qu’il crut être la vérité, lui apparut avec une évidente évidence : le comte de Valois savait que son fils n’avait pas été précipité dans le fleuve. Comment le savait-il ? Peu importait !... Sachant cela, il l’avait fait rechercher, lui Bigorne, par son valet, son âme damnée, Simon Malingre ! Et maintenant, sans aucun doute, des gens apostés allaient surgir...

« Oui, songea Bigorne, mais Simon qui admire tant Judas n’aura pour cette trahison ni trente deniers, ni trente nobles : il aura un bon coup de dague au cœur. »

Cependant, l’attitude paisible de Simon Malingre, le silence du cabaret, et surtout la situation de ce cabaret sur les confins de la truanderie, finirent par le rassurer.

« Eh bien, reprit Malingre, admets-tu cette supposition qu’au lieu de porter l’enfant à la Saône, tu l’as déposé dans une chaumière écartée ?

– Mais pourquoi l’aurais-je déposé là ? fit Bigorne d’une voix rauque.

– Est-ce que je sais ? répondit Malingre. Pour le reprendre plus tard ! »

Bigorne frémit, et sa main, à nouveau, se crispa sur le manche de sa dague.

« Ou pour tout autre motif, continua Malingre. Le motif ne sera pas difficile à trouver. L’essentiel est que l’enfant n’est pas mort. Ou, du moins, nous supposons qu’il n’est pas mort, comprends-tu ? C’est une supposition pour nous, mais pour d’autres, ce sera une vérité !

– Bon ! grogna Bigorne.

– Quoi, bon ?...

– Rien, je m’entends. Continue. »

Il devinait maintenant la réalité : Malingre était persuadé de la mort de l’enfant. Mais il voulait faire croire à d’autres que l’enfant vivait. Simplement, sa supposition se rencontrait avec la vérité.

Mais d’où venait le détail si précis et si exact du dépôt de l’enfant dans une chaumière abandonnée ?

Malingre, après quelques instants de réflexion, reprit :

« Maintenant que nous avons admis que le fils de Valois est peut-être vivant, écoute ceci, mon digne Bigorne. Il y a quelques années, je fus pris tout à coup par le mal du pays. J’éprouvai le besoin irrésistible de revoir les plaines grises du Nord et de passer quelque temps à Béthune.

– Diable ! ricana Bigorne, je ne te savais pas un tel amour du pays natal !

– Par amour ou pour autre chose, il me fallut absolument revenir pour quelque temps à Béthune. J’y allais d’ailleurs avec l’assentiment de mon maître, le comte de Valois. Or, écoute et retiens ceci : en face de l’auberge où je m’étais installé, habitait une vieille femme du nom de Margentine. Elle ne fréquentait personne, sortait peu, parlait moins encore ; elle n’était pas de Béthune, elle était venue s’installer dans le pays avec un homme et un enfant ; au moment où j’arrivai, l’homme était mort depuis près de neuf ans et l’enfant pouvait avoir une quinzaine d’années. L’homme qui était mort avait porté un nom que je te dirai tout à l’heure... »

Bigorne écoutait ce récit avec une attention passionnée.

« Comment était-il, l’enfant ? demanda-t-il sourdement. L’enfant, ou plutôt le jeune homme, d’après l’âge que tu dis ?

– Je n’en sais rien, répondit Malingre. En effet, ce jeune homme, je ne l’ai jamais vu. Mais, en revanche, j’ai vu Margentine, c’est-à-dire celle qui passait pour la mère de Jehan...

– Le jeune homme s’appelait Jehan ! murmura Bigorne en tressaillant.

– Oui, maintenant, je dois te dire une chose, c’est que cet amour du pays natal dont je te parlais tout à l’heure me prenait surtout la nuit. Le jour, je demeurais confiné au fond de mon auberge. Mais le soir, je n’y pouvais résister : il me fallait sortir et visiter certaines localités que justement, par une heureuse coïncidence, mon noble maître m’avait chargé d’étudier.

« Me suis-tu bien ?

– Va toujours... Je te suis mieux encore que tu ne penses.

– Bon. Une nuit donc, je revenais de faire une tournée et regagnais mon auberge, vers deux heures du matin, lorsque, dans la maison située en face, il me sembla distinguer comme des plaintes. Et juste à ce moment, la porte s’entrouvrit. J’aperçus une sorte de fantôme blanc et voulus tout d’abord m’enfuir, mais bientôt je m’aperçus que ce fantôme n’était qu’une femme et que cette femme venait d’ouvrir sa porte pour demander du secours. Je m’approchai donc, et bien que je n’aime pas beaucoup perdre mon temps à des œuvres inutiles, je ne pus me dispenser d’entrer et d’accorder à cette malheureuse les quelques soins qu’exigeait son état. Soins inutiles, d’ailleurs, car elle était mourante, et, en effet, elle mourut une heure plus tard. Cette femme, c’était celle qu’on nommait Margentine.

– Celle qui passait pour la mère du jeune homme de quinze ans appelé Jehan ? fit Lancelot Bigorne.

– C’est cela. C’est-à-dire la femme de l’homme mort depuis neuf ans dont j’ai promis de te dire le nom. Bref, Margentine se mourait. Et bientôt, elle eut la conviction que tout soin serait inutile. Elle se sentait mourir. J’allais me retirer en regrettant le temps que je venais de perdre là, lorsque cette femme me prit par la main et me dit qu’elle avait un grand service à me demander au nom de Dieu, des anges et de la Vierge. Moi, qui suis bon chrétien, je ne pus résister à une demande ainsi faite, d’autant que Margentine m’exposa qu’elle me récompenserait par l’abandon d’un petit trésor qu’elle possédait. Non seulement, donc, je restai, mais au mot trésor, j’allai solidement verrouiller la porte afin qu’aucun importun ne pût venir m’empêcher de rendre à cette pauvre mourante le service qu’elle me demandait.

– Je t’ai toujours connu plein de cœur et de délicatesse, fit Bigorne.

– Que veux-tu, je suis ainsi fait et je n’y puis rien. Ce n’est pas moi qui aurais eu le courage d’aller jeter un enfant à la rivière. Ce n’est pas pour t’en faire le reproche. Bref, voici en quoi consistait le service que voulait la vieille Margentine. Il s’agissait d’aller à Paris, en l’Université (elle me donnait le nom de la rue et de la maison), de retrouver le jeune homme appelé Jehan et de lui faire part de certaines particularités. Car le jeune Jehan, féru d’amour pour les aventures, la vie de Paris et l’étude, était parti, paraît-il, afin de s’embaucher comme écolier dans un de ces mauvais lieux qui avoisinent le collège de maître Sorbon. Moyennant la peine que je prendrais, Margentine me faisait don de six écus d’or. Le reste de son trésor consistait en vingt autres écus également d’or, et en une chaînette d’argent à laquelle était suspendu un médaillon renfermant des cheveux de femme. Je pris le tout, et jurai sur ma part de salut de rapporter fidèlement au jeune Jehan vingt écus d’or et la chaînette d’argent... Malheureusement, il y avait sur le médaillon un assez beau diamant... »

Bigorne crispa ses poings et ses lèvres blêmirent.

C’était ou ç’avait été un truand que ce Lancelot Bigorne. Mais le cynisme cauteleux de Simon Malingre le révoltait.

« Voyons, fit-il d’une voix rude, voyons les particularités que tu devais raconter au jeune homme...

– Voici ! dit Simon Malingre. Le jeune Jehan savait qu’il n’était pas le fils de Margentine. Mais il ne savait que cela. Il avait adopté le nom de l’homme qui avait vécu avec Margentine, mais il savait que ce nom n’était pas le sien. Or, Margentine espérait, en révélant au jeune homme les particularités en question, que cela lui apporterait honneur et richesse en lui faisant retrouver des parents qu’elle savait nobles et riches. Maintenant, pourquoi n’avait-elle pas raconté elle-même à Jehan ce qu’elle me chargeait de lui raconter ? C’est ce que tu te demandes sans doute et c’est ce que je lui demandai, à elle. Elle me répondit qu’elle n’était pas dans cette affaire absolument exempte de reproches, et qu’elle avait craint les reproches du jeune Jehan, auquel elle avait fini par s’attacher...

« Patience, Bigorne, voici les particularités, et tu vas voir qu’elles sont précisément intéressantes pour toi...

– Pour moi ?... Qu’ai-je à faire en tout ceci ?...

– Tu vas voir. Et si tu n’y étais pour rien, pourquoi te raconterais-je cette histoire ?...

– C’est juste. Continue.

– Eh bien, d’après ce que me confia Margentine, il paraît qu’elle savait le nom des parents du jeune homme. Ou plutôt, elle avait deviné ce nom à certaines marques faites sur les habits de l’enfant...

– Et ce nom ! demanda Bigorne haletant.

– C’est ce qu’elle n’a su me dire ! Au moment où elle allait me révéler le nom que je devais transmettre au jeune Jehan, la mort lui ferma les lèvres. Mais elle avait eu le temps de me raconter le reste. Et ce reste, le voici : elle et son mari avaient trouvé le petit Jehan, et ayant deviné quels étaient ses parents, l’avait gardé pour s’en faire une arme plus tard, et extorquer de l’argent auxdits parents.

« Comprends-tu ?

– Je comprends admirablement ; tu parles de ces choses avec une sorte de passion qui les rend lucides et intéressantes.

– C’est que je m’intéresse à tous les nobles efforts. Malheureusement, l’homme mourut un an après avoir trouvé le petit Jehan. Quant à Margentine, il paraît qu’elle se repentit, renonça au projet primitif, éleva de son mieux l’enfant trouvé, remettant de jour en jour les révélations qu’elle voulait lui faire. Un jour vint où il voulut aller à Paris. Là encore elle ne parla pas, mais elle se promit d’aller retrouver Jehan pour lui dire tout : la mort arrivée plus tôt qu’elle ne pensait l’en empêcha. Voilà l’histoire. Qu’en dis-tu ?

– Intéressante, je le répète, et tu contes à merveille. Mais j’attends la suite.

– Tu crois donc qu’il y a une suite ? fit Malingre d’un air goguenard.

– À toutes choses il y a un commencement, une suite et une fin. Nous connaissons le commencement ; il me reste à savoir la suite.

– Tu te trompes, Bigorne, tu ne connais pas le commencement, et je vais te le dire. Mais d’abord, que j’en finisse avec mon voyage à Béthune. Mon amour du pays natal se calma en même temps que les affaires dont m’avait chargé le comte de Valois se terminèrent : heureuse coïncidence qui me permit de regagner Paris. Margentine était morte : j’oubliai le jeune Jehan. Je gardai, bien entendu, la chaînette et le médaillon à diamant qui contenait des cheveux. J’ai vendu le diamant. Mais j’ai gardé le médaillon aux cheveux. J’oubliai donc complètement le petit Jehan jusqu’à ces temps derniers, où, en présence de certaines circonstances et sur certaines paroles que me dit Gillonne, je me souvins brusquement de lui. C’est alors que je me mis à ta recherche... Maintenant, Bigorne, je vais te dire le commencement : sais-tu où Margentine et son homme ont trouvé le petit Jehan, alors qu’ils traversaient le royaume pour se rendre dans les Flandres ?...

– Comment le saurais-je ? fit Bigorne d’une voix rauque et tremblante qui eût pu sembler étrange à son interlocuteur.

– Eh bien, reprit Simon Malingre, le petit Jehan a été trouvé... écoute !... trouvé dans une chaumière d’un faubourg de Dijon !... Voyons, Bigorne, es-tu bien sûr d’avoir noyé l’autre ? »

Et Simon Malingre plongea un regard aigu dans les yeux de Bigorne.

Celui-ci poussa un soupir, passa la main sur son front, et répondit :

« Je voudrais bien ne pas en être sûr ! Je n’aurais pas ce remords sur la conscience. Je vois encore le pauvre petit se débattant au-dessus de l’eau, puis coulant tout à coup. Je suis resté là près d’une heure comme fou de ce que je venais de faire... Le fils de Valois est bien mort, va !...

– Bon. Maintenant, il faut que je te dise pourquoi Gillonne et moi nous avons songé à toi. Sais-tu comment s’appelait le mari de Margentine ? En d’autres termes, sais-tu le nom qu’a pris et que porte encore le petit Jehan trouvé près de Dijon dans une cabane abandonnée ?...

– Comment le saurais-je ? répéta Bigorne qui cependant, en lui-même, prononça le nom et eut un profond frémissement.

– Buridan ! fit Simon Malingre.

– Buridan ! » reprit sourdement Bigorne.

Oui ! Il s’attendait à entendre ce nom ! Depuis quelques minutes, il avait compris que l’enfant trouvé par Margentine, c’était Buridan...

Et, cependant, une sorte de stupeur s’empara de lui.

Lancelot Bigorne n’était pas une nature tout à fait vulgaire. Il était capable de saisir – vaguement, il est vrai – la redoutable poésie de certaines situations arrangées par ce grand metteur en scène de la vie, qui s’appelle le hasard.

Ainsi donc, lui, Bigorne, parmi tant de seigneurs et de bourgeois, avait été choisir pour maître l’enfant même qu’il avait sauvé jadis de la mort ! Ainsi donc, Buridan, c’était le fils de la dame de Dramans ! Ainsi donc, Jean Buridan, qui haïssait le comte de Valois de toutes ses forces, et qui en était haï, c’était le fils du comte de Valois !...

Longtemps, Bigorne demeura comme écrasé sous le poids de la sombre rêverie qui s’était appesantie sur son cerveau, arrêtant d’un geste Malingre qui voulait achever de lui exposer son plan. Enfin, il reprit à peu près son sang-froid. Et alors, une indicible curiosité s’empara de lui. Qu’est-ce que Simon Malingre pouvait bien lui vouloir à propos de Buridan ? Il allait d’ailleurs le savoir.

« Es-tu décidé à m’entendre ? reprit, en effet, Malingre.

– Parle...

– Voici ce que j’ai arrangé, inspiré en cela par Gillonne qui, je te l’ai dit, est un esprit fort et m’en remontrerait à moi-même en fait d’astuce. Comme je te le disais en débutant, supposons une minute que tu n’as pas noyé l’enfant de Valois et d’Anne de Dramans. Supposons que cet enfant, tu l’as déposé dans la chaumière abandonnée. Supposons enfin que c’est cet enfant qui a été trouvé par Margentine. Il en résulterait donc que ton maître, Buridan, ne serait autre que le propre fils de Mgr le comte de Valois ?

– C’est vrai. Et après ?...

– Après ?... Eh bien, si Valois apprenait que son fils vit, si on lui en donnait la preuve... et ce sera à toi de donner cette preuve...

– Eh bien ? fit Bigorne.

– Eh bien, je crois que Valois donnerait beaucoup d’argent à qui le débarrasserait de ce fils. Voilà... mais je dis, tu comprends, beaucoup d’argent, beaucoup d’or.

– C’est possible ? Et après ?... »

Simon Malingre hésita une minute, étudiant du coin de son œil pâle la physionomie rude et franche de Bigorne. Brusquement, il se pencha vers lui et murmura :

« Voyons, Lancelot, tu n’as pas eu le temps de t’attacher à ton maître. Est-ce que tu l’aimes beaucoup ?

– Qui ça ?... Buridan ?...

– Oui, Buridan, Jean Buridan, ton maître.

– Je le déteste, dit Bigorne en achevant son gobelet d’hydromel. Batailleur, dur, la main trop leste, il m’a tout de suite déplu, et j’avais formé le dessein de le quitter.

– Il ne faut pas le quitter, dit vivement Malingre. Notre fortune est faite. Tiens-toi prêt ! Bigorne. D’abord, il faudra que tu dises que tu n’as pas noyé l’enfant. Ensuite, nous chercherons ensemble le moyen d’occire en douceur ce Buridan que tu détestes. Je te dis que notre fortune est faite !

– Oui, fit Bigorne en toussant, – car il étouffait – mais quelle sera ma part ?

– Je te l’ai dit : la tierce partie de ce que nous arracherons au Valois !

– Eh bien, fit Bigorne, c’est tout autre chose que je veux.

– Et que veux-tu donc ? dit Malingre, étonné.

– Je veux cette chaînette d’argent et ce médaillon que tu as conservés et qui, dis-tu, contient des cheveux de femme. C’est une idée à moi. Je veux cela ou rien du tout.

– C’est facile !...

– Oui, mais je veux la chaînette et le médaillon, non pas après, mais avant, c’est-à-dire tout de suite...

– C’est facile, riposta Simon Malingre. Tout de suite, si tu veux. Accompagne-moi à la Grande-Rue Sainte-Catherine, et tu auras la chose. »

Tant qu’il avait attendu au coin de la Grande-Rue Sainte-Catherine (plus tard rue Saint-Paul) – c’est-à-dire non loin de la porte Saint-Antoine où, cinquante-six ans après ces événements, le sieur Aubryot, prévôt de Paris, devait poser la première pierre de cette forteresse qui devait s’appeler d’abord la bastille Saint-Antoine, puis, tout simplement, la Bastille... la forteresse par excellence – tant qu’il avait attendu, donc, Lancelot Bigorne pensait voir sortir de l’hôtel de Valois une nuée de sbires qui le chargeraient. Mais Simon Malingre était de bonne foi : Lancelot ne fut pas inquiété.

Une heure après, Lancelot Bigorne était en possession du médaillon et le serrait précieusement sur sa poitrine.

« Où nous retrouverons-nous pour convenir de ce que nous avons à faire ? lui demanda Malingre en lui remettant le médaillon.

– Mais, chez Noël-Jambes-Tortes ! » répondit Bigorne, qui comptait bien ne plus jamais remettre les pieds dans le cabaret de la rue Tirevache.

Là-dessus, il s’en alla par la rue Saint-Antoine, rasant les murs des maisons, réfléchissant profondément à tout ce qui venait de lui être dit. Enfin, secouant ses pensées, il passa à un autre ordre d’idées suscitées par une inquiétude plus immédiate.

« Ah çà ! se dit-il, en débouchant sur la place de Grève. Où vais-je coucher, moi ? Dame Clopinel m’a mis à la porte en me menaçant de son balai. Noël-Jambes-Tortes me refuse tout crédit. Rien ne me réussit depuis que je me suis fait honnête homme. Il faut cependant que je trouve un logis, et pas plus tard que tout de suite... »

Comme il maugréait ainsi à part lui, d’une encoignure de la maison aux piliers, une quinzaine d’archers du guet se ruèrent sur lui. En un clin d’œil, il fut désarmé et ligoté.

« Est-ce bien ce Lancelot Bigorne ? demanda une voix.

– Oui, messire prévôt, répondit un sergent du Châtelet, je connais l’homme. C’est une vieille pratique. Où faut-il le conduire ?

– Au Châtelet ! » répondit le prévôt Jean de Précy.

Quelques minutes plus tard, l’infortuné Bigorne, tout ahuri, était enfermé dans un cachot et, avec une grimace de mélancolie, murmurait :

« Enfin, j’ai trouvé un logis, en attendant l’éternel logis qu’on trouve au charnier des fourches patibulaires... »

Pendant ce temps, Jean de Percy courait au Louvre, obtenait audience de la reine et lui annonçait l’arrestation de Lancelot Bigorne.

XXVII



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