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Ion Manoli Dictionnaire stylistiques et poétiques Etymologie. Définition. Exemplification. Théorie


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4. Les combinaisons de vers et les poèmes à forme fixe.

a) groupes de vers uniformes : la tragédie, la comédie, l'épopée, l'épître, la satire, les poèmes didactiques ou philosophiques utilisent le même vers du début à la fin du poème, et cette régularité leur donne une sorte de majesté.

b) l'ode. Voir sous ce mot.

c) poème à forme fixe. On appelle ainsi des pièces de vers dans lesquelles le nombre des vers et la disposition des rimes sont commandés par des règles immuables. Telles sont d'abord les petites pièces, telles que les épigrammes, madrigaux, épitaphes, acrostiches, inscriptions, présentées sous forme de distiques (pièce en deux vers), de tercets, de quatrains, de sixains, de huitains, de dizains. Il en sera de même des poèmes à forme fixe peu employés aujourd'hui, comme le triolet ou le rondeau ancien, le lai, la ballade, la ballade double, etc. (voir sous ces mots).

Le vers français est l’héritier du système greco-latin qui était fondé sur de tout autres critères : l’évolution s’est faite sur des siècles en suivant celle de la langue et des sensibiltés.

La versification latine était fondée sur une opposition, pertinente dans cette langue entre les quantités vocaliques : il y a en latin des voyelles brèves (U) et des voyelles longues (-), et donc des syllabes brèves et des syllabes longues.

La base de cette prosodie, le pied, est un groupement de syllabes, les pieds principaux sont l’iambe (U - ), le spondée (--), le trochée (- U), le dactyle (- UU), l’anapeste (UU -).

Synonyme : prosodie.



Vices n. m. pl. Du lat. vitium : « mal, dommage, défaut ».

Ce sont des défauts, des lacunes qui tiennent en grande partie à l’élocution. Parmi les vices les plus importants, qui sont rédhibitoires, on citera les équivoques, les bassesses et les obscénités, le manque de variétés, le non respect des bienséances.

Les vices d'un style amènent toujours à la contradiction, à l'invraisemblance et à l'obscurité.

Voir sous les mots : équivoque (expression ~), bas (style ~). Voir en roumain peltea n. f.

Antonyme : bienséances.

Vide (Style ~) adj. Du lat. pop. vocitus, de vocuus :  « creux ; sec ».

Le vide est un vice du style. C'est un texte ou un discours oratoire qui ne contient pas de renseignements véritables, d'idées solides, d'arguments subsistants. Ce texte ou ce discours aboutit à créer un effet de pauvreté, de superficialité, de carrence de tout niveau. La critique du vide est donc intéressante pour la rhétorique en général. S'opposant à une éventuelle radicalité technique des jeux verbaux, elle implique un privilège accordé au contenu et relève en fait d'une exigence morale. (G. Molinié, p. 335).

Antonyme : copieux (style ~).

Voir sous vices.



Vieux, vieilli adj. Du lat. vetulus, diminutif de vetus : « ancien ».

C’est une marque stylistique (abréviation : vx) qui dans un dictionnaire ou une source lexicographique indique un emploi ou une expression, dans un état de langue donné, qui est senti par la majorité des locuteurs comme n’appartenant plus à l’usage courant.

Par ex. : Après avoir pris langue chez le curé, un vrai dragan aux petits bras, il se fit annoncer chez mère Téodora (J. Audiberti).

Dragan c’est un terme de l’ancienne marine qui désigne l’extrémité de la poupe d’une galère. Nous pouvons chercher l’origine du dragan dans les dialectes provençaux avec dragoun, dragou, mots qui viennent du roman dragon.

En roumain dragan est un nom de famille, Drăgan, qui a son origine probablement dans la marine d’antan.



Villanelle n. f. Du l’ital. villanella : chanson, danse villageoise ; de villano : « vilain ».

  1. Poésie, sorte de chanson pastorale.

  2. Poème à forme fixe (fin du XVIe siècle) à couplets de trois vers et à refrain,

terminé par un quatrain. D’habitude le poème est composé de six strophes ayant au total 19 vers.

La structure de la villanelle est complexe : le premier et le troisième vers du

premier tercet (voir sous ce mot) se répètent. Chaque deuxième vers de la strophe doit être original. Le rythme de la villanelle est simple.

Nous y présentons un exemple de villanelle de la création de Jean Passerat (1534-1602) et on remarquera l’ordre de la répétition de vers dans le texte :


J'ay perdu ma tourterelle

J'ay perdu ma tourterelle : 
Est-ce point celle que j'oy ?
Je veux aller après elle.

Tu regrètes ta femelle, 
Hélas ! aussi fay je moy :
J'ay perdu ma tourterelle.



Si ton amour est fidelle, 
Aussi est ferme ma foy,
Je veux aller après elle.

Ta plaincte se renouvelle ;
Tousjours plaindre je me doy :
J'ay perdu ma tourterelle.

En ne voyant plus la belle, 
Plus rien de beau je ne voy ; 
Je veux aller après elle.

Mort que tant de fois j'appelle, 
Pren ce qui se donne à toy :
J'ay perdu ma tourterelle, 
Je veux aller après elle.
Virelai n. m. L’étymologie est expliquée dans l’article du mot .

Poème à forme fixe, avec un nombre de strophes à deux rimes. L’un de ses vers sert de refarin et réapparaît à la fin de chaque strophe ou parfois selon une ordonnance plus complexe. Les mètres d’un virelai peuvent être identiques ou variés.

Le mot virelai vient de lai et de virer dans le sens de tourner, ce qui évoque à la fois la danse et le refrain, ce dernier pouvant être repris en chœur. Les premiers virelais datent de la fin du xiiie siècle et le genre fut surtout populaire au xive et au xve siècle. Parmi les auteurs de virelais, l'un des plus importants est Guillaume de Machaut, qui en écrivit 39 sous le nom de chansons balladées.
Quant je sui mis au retour de veoir ma Dame,

Il n'est peinne ne dolour que j'aie, par m'ame.

Dieus! c'est drois que je l'aim, sans blame de loial amour
Sa biauté, sa grant doucour d'amoureuse flame,

Par souvenir, nuit et jour m'espient et enflame

Dieus! c'est drois que je l'aim, sans blame de loial amour
Et quant sa haute valour mon fin cuer entame,

Servir la weil sans fotour penser ne diffame.

Dieus! c'est drois que je l'aim, sans blame de loial amour.
Vocabulaire (d’un poète, d’un écrivain, d’un homme politique) n. m. Du lat. médieval vocabularium.

Ensemble de mots, expressions, tournures phraséologiques dont dispose un auteur. Il ne faut pas confondre le vocabulaire d’un auteur avec le lexique de son oeuvre (Vendryès).

On dit : le vocabulaire de Balzac, de Hugo, de Baudelaire, mais on dit aussi : le vocabulaire de la Divine Comédie.

Vocalique (Terminaison ~) adj. Du lat. vocalis.

Qui a rapport aux rimes qui se terminent en voyelles.

On dit : alternance, dissimulation vocaliques.

Voir sous rime féminine.



Volume du mot n. m. ou masse du mot n. f. Du lat. volumen.

On appelle volume ou masse du mot la quantité de phonèmes composant un mot prononcé isolément, c'est-à-dire le volume désigne une masse sonore.

Le français fournit des mots de masse très inégale, depuis les monosyllabes (mur, dur, sur, clair, haut, peu, brun) jusqu'aux mots d'un grand nombre de syllabes comme:

anticonstitutionnellement, hypersuperlificoquentieusement. (A. Rimbaud), diabolicosceptiquement (R. Queneau), etc.

Les mots peuvent devoir leur expressivité non seulement à la nature des sons qu'ils contiennent, mais aussi à la grandeur physique du mot: le mot bref (long, bon) doit être manié avec sagesse et prudence pour ne pas tomber dans le ridicule.

II n'en reste pas moins que la masse du mot rappelle sans cesse l'impérieuse nature vocale du vers ou de n'importe quel texte d'origine littéraire.

Les grands écrivains français ont su et ont pu tirer parti de la correspondance éventuelle entre le volume du mot et l'ampleur de la pensée. Les poètes français usent volontiers du procédé, du fait que la longueur du mot apparaît avec plus d'évidence dans le cadre étroit du vers :


L'échelonnement des haies

Moutonne à l'infini.

P. Verlaine



-X-
L'art d'écrire, qui ne peut être que l'art d'écrire à la mode du jour,

est trop changeant pour pouvoir être enseigné... Le secret

de longue vie n'est pas dans les procédés.

Remy de Gourmont



Xénisme n. m. Du gr. xeno :  « étranger », de xenon : « chose étrange ».

  1. Mot ou tournure emprunté par une langue à une autre. Tout mot l'origine

étrangère adopté par une langue. En ce sens les vocables comme blockaus, toréador, izba, steppe, baobab, parking, etc sont des xénismes.

Le linguiste George Pruteanu donne une autre définition : « Cuvintele străine, care

nu devin românești, ci continuă să fie folosite cu scriere și pronunție străine se numesc xenisme (li s-a spus și idiotisme sau barbarisme) ».

Le linguiste illustre sa définition par deux exemples : tramway et science- fiction qui sont des emprunts du français. Sa conclusion est la suivante : «  les xénismes sont les mots ou les tournures pénétrés dans une langue dans leur forme originale, sans se naturaliser ».

Parfois les xénismes sont à condamner : « Oricât am fi de moderni, postmoderni sau răspostmoderni un cuvânt ca acquis (acquis-ul comunitar - UE) nu poate avea același statut în dicționare ca și cuvintele acadea... Dar trebuie să-l găsim în dicționare » (G. Pruteanu).

  1. Mot ou tournure d'une langue étrangère qu'un écrivain ou poète utilise dans son

oeuvre pour différentes raisons: a) pour créer l'effet comique: mitocan, mocofan, tourloutonner. (E. Ionesco); b) pour mieux exprimer la couleur locale. A se rappeler les xénismes de Mérimée qui en use largement dans ses nouvelles « Carmen », « Colomba», « Tamango », etc.

A ne pas confondre avec barbarismes (voir sous ce mot).




-Y-
Polonius : Que lisez-vous, Mon seigneur ?

Hamlet : Des mots, des mots, des mots.

William Shakespeare


Yé-yé (des vers, des chansons) adj. inv, n. D’un refrain d’une chanson.

Ysopet ou isopet n. m. Du nom d’Esope, le grand fabuliste de l’Antiquité.

Au Moyen Âge on désignait sous ce mot les recueils de fables.

Les fables antiques ont été transmises à cette époque par des recueils composés au IVe-Ve siècle par des adapteurs de Phèdre et de Babrius, Avianus et Romulus. La tradition médio-latine de ces recueils est très complexe. Au XIIe siècle, Marie de France (1154-1189) entreprend l’adaptation en labgue vulgaire de l’un de ces recueils, le Romulus, enrichi d’autres apports : 102 fables en tout, dans lesquelles l’auteur adapte la moralité aux caractères du monde féodal. On donne le nom d’Ysopet (« petit » Esope) aux recueils de fables en langue vulgaire. D’autres Isopets suivirent : Isopets dits de Paris, de Chartres, de Lyon, Isopit-Avionnet (tout composés en vers généralement octosyllabiques).

D’autres sens :



  1. Jeune chanteur (d’habitude sans expérience) à la mode vers 1960.

  2. Des vers légers qui se prȇtent facilement à ȇtre interprétés.

  3. Style de musique, de danse venu des Etats- Unis, en vogue parmi les jeunes dans les années 60 du XXe siècle, ainsi que des comportements qu’il a suscités.


-Z-
Quand on voit le style naturel, on est tout étonné et ravi,

car on s'attendait de voir un auteur et on trouve un homme.

Blaise Pascal


Zeugma ou zeugme n. m. Du gr. zeugma, seugnurni : « je joins ».

Figure stylistique qui consiste à lier deux ou plusieurs phrases ou membres de phrase, de telle sorte qu'un adjectif ou un verbe exprimé dans le premier membre ou la première phrase s'applique également aux autres, sans qu'il soit besoin de le répéter. Par ex. :



L'air était plein d'encens et les prés de verdures.

V. Hugo


On aurait pu dire : L'air était plein d'encens et les prés étaient pleines de verdure.

G. Molinié explique un exemple de Matzneff un peu autrement : Elle (Danielle) est pulpeuse, sensuelle, protestante.

Par rapport au thème Danielle, représentée par le mot Elle dans la phrase, les deux premiers qualifiants, pulpeuse et sensuelle, sont parfaitement homogènes. En revanche, leur est immédiatement coordonné, par une juxtaposition absolument contiguë, un troisième qualifiant, protestante, qui appartient à un tout autre registre de signification que les deux précédents. C'est en cela que consiste le zeugma. (p. 337).

Dans les deux cas il s'agit d'une discordance sur lequel le zeugma se fonde, et son effet est toujours assez vif, stylistiquement marqué, comme dans ce vers de J. Prévert :


Tout jeune Napoléon était très maigre

et officier d’artillerie

plus tard il devient empereur

alors il prit du ventre et beaucoup de pays.
Zétacisme n. m. Du gr. zȇta, et le suf. – isme.

Aboutissement d’une consonne au son de z.

A ne pas confondre avec zézaiement. Voir sous ce mot.

Zézaiement ou zozotement n. m. Du verbe zézayer, et le suffixe –ment.

On appelle zézaiement un défaut de prononciation d’un personnage réel ou littéraire où les sons (s) et (j) sont remplacés par [s] ou [z] : Que c’est sarmant ! pour : Que c’est charmant ! Serser la femme ! pour : Chercher la femme ! Pizon pour : pigeon.



Zoomorphisme n. m. De zoo-, et – morphisme.

Assimilation d’un être humain à un animal.

Ex. : Le professeur rougit (type particulier de métaphore).

Dans la mythologie, il s’agit des créatures fantastiques : homme- animaux. Dans les contes – métamorphose d’un ȇtre humain en animal (cochon, grenouille, biche, etc.).

On dit : croyances au zoomorphisme (dans les contes populaires).
ANNEXES
Anthologies littéraires, recueils de poèmes et morceaux choisis
dans le contexte de la francopolyphonie moderne

Auteur : Ion Manoli
Etablir une distinction plus ou moins précise entre anthologie, recueil et morceaux choisis est un acte simple sur le plan lexicographique, mais en réalité pour tracer une frontière étanche entre ces notions si largement utilisées, il faut revenir à la diachronie et à l’histoire des mots.

Il demeure que l’observation des dictionnaires, encyclopédies et ouvrages spécialisés montre un certain nombre de divergences dans l’appréhension de l’anthologie comme terme littéraire. Celles–ci ne concernent pas seulement le nombre des auteurs admis (non-admis), mais aussi la nature des textes, les modes d’organisation, les publics visés, la place de l’auteur et le statut de la compilation [16, p. 90].

Dans le présent article l’objet d’étude est l’anthologie littéraire dans le contexte de la francopolyphonie communicative; nous voudrions mettre l’accent sur le rôle de l’anthologie dans la construction du discours francophone. On s’imagine la réaction des «modernistes» et des « pragmatistes» qui vont s’interroger: à quoi bon discuter anthologie au moment où tout le monde parle de l’acte de parole dans la conjoncture [7, p.14]. Mais il faut le faire. Nous sommes convaincus suite à une longue expérience pédagogique, professionnelle, littéraire, qu’il est impossible d’éviter un matériel si riche et si important caché tantôt sous le titre d’anthologie, tantôt sous le titre de «recueil de textes» et un peu plus rarement sous le terme « morceaux choisis».

Une simple démarche diachronique nous montre que l’anthologie paraît clairement trouver son expansion et ses caractéristiques principales au cours du XIX-ème siècle. L’Encyclopédie ne retenait à l’article «Anthologie» que l’Anthologie grecque. Or dès la sixième édition du Dictionnaire de l’Académie (1836), on relève un élargissement au-delà de ce modèle initial:



Anthologie n.f. Il signifie proprement collection ou choix de fleurs, mais dans ce

sens il n’est pas usité; il se dit figurément d’un recueil de l’Anthologie grecque.

Le Dictionnaire Universel de la langue française, avec le latin et l’étymologie, dans sa XIV-ème édition (1857), marque le sens figuré du mot:

Anthologie n.f. – Choix de fleurs, (fig.) de poésies, d’épigrammes grecques. [13,

p.38]


Un siècle plus tard Le Larousse explique :

Anthologie n.f. - Recueil de morceaux choisis d’œuvres littéraires ou musicales:

florilège. [18,p.52]

On s’aperçoit que les termes anthologie, recueil et morceaux choisis s’emploient comme synonymes dans le cadre du même article.

De ce point de vue, Le Robert, par exemple, ne dit pas aujourd’hui autre chose que ce que disaient l’Académie, Larousse ou Quillet :

Recueil de pièces de vers choisies, de morceaux choisis en prose ou en vers. Morceau d’anthologie, page brillante digne de figurer dans une anthologie. Voir florilège [18, p.74 ].

A cent cinquante ans de distance, ces deux définitions se limitent à une conception exclusivement littéraire, la seule différence notable concernant l’élargissement de l’anthologie aux pièces en prose. Aujourd’hui nous avons facilement glané les

« qualificatifs » suivants pour le mot « anthologie » :

anthologie littéraire; des portraits; de l’humour; des chansons, des poètes

(maudits), des modernistes, des lauréats (du Prix Nobel); de l’Age classique, des poètes Romantiques, des ballades françaises; des fleurs poétiques; folklorique; des contes; des anges (Aнтология ангелов), des vins et des wiskies, des mathématiques, etc.

Chacune relève en outre un sens premier peu usité.

Les synonymes « classiques » du mot « anthologie » sont « morceaux (n.m.pl.) choisis; recueil n.m. ; florilège n.m. ». Mais cette série synonymique s’est enrichie ces derniers temps d’autres vocables devenus des synonymes plus récents :

album(poétique); journal (poétique); almanach n.m.; magazine n.m. (littéraire);

livre n.m. (d’étrennes); répertoire n.m. (des conteurs); annuaire n.m. (romantique); cahier n.m. (poétique, littéraire); écritures n.f.pl. (ordinaires poétiques); bulletin n.m.; poèmes n.m.pl (à dire); livre n.m. ( d’or de la prose; de la poésie ); choix n.m. pl. (de lettres).

Il y a même des termes empruntés comme celui de keepsake n.m., utilisé d’habitude au pluriel « les keepsakes » : (1829); mot anglais, de to keep – garder et sake (for my sake) - pour l’amour de moi.



Sorte de livre-album, généralement illustré de fines gravures, qu’il était de mode

d’offrir en cadeau, comme souvenir à l’époque romantique. [19, p.1060]

Le nom keepsake porte le signe lexicographique conventionnel anciennement qui nous signale qu’il présente un substantif ou un sens courant qui désigne une chose du passé, disparue. (N.B.Ne pas confondre avec les conventionnels vieux ou historique).

Dans le courant du XIX-ème siècle, le keepsake apporte à l’anthologie personnelle, celle recueillie dans les cahiers et les albums des jeunes filles en particulier, une forme et des éléments de contenu : luxe presque solennel de la reliure, poèmes ou pot-pourri de textes poétiques soigneusement mis en page et glanés au hasard sur des thématiques sentimentales douces et romanesque. [16, p. 87]

Les poètes éprouvent une certaine réticence pour les termes album, florilège et annuaire. Ils sont rarement employés. On se rappelle le jugement de Ch. Baudelaire à propos du recueil « Les Fleurs du Mal » :


Dans ce livre atroce, disait Baudelaire, j’ai mis toute ma pensée, tout mon cœur,

toute ma religion (travestie), toute ma haine. (A. Ancelle, 1866)

A la différence des Romantiques, il affectera, il est vrai, de voir dans son recueil un livre de poésie pure, et point un simple album. Il avait peur de ce terme.

Aujourd’hui c’est déjà devenu une tradition de trouver avant tout un titre plus ou moins original (Les Poètes de la Nuit. Anthologie) et puis d’ajouter le mot «Anthologie» comme dans les titres qui suivent :


  • La Nouvelle Poésie française : Anthologie, 1974 [11] ;

  • Les deux cents plus beaux poèmes de la langue française : Anthologie, 1956 [21];

  • Gélin, Daniel. Poèmes à dire : Anthologie 1974 [14] ;

  • Bedouin, Jean-Louis. La Poésie surréaliste : Anthologie, 1975 [8] ;

  • Cosem, Michel. Découvrir la poésie française! Anthologie, 1975 [10] ;

  • Eluard, Paul. La Poésie du passé : Anthologie, 1968 [15], etc.

Les anthologies de textes ou de documents historiques, philosophiques, juridiques ou religieux sortent évidemment de notre champ de réflexion. Mais elles existent et leur nombre est considérable surtout au XX-ème siècle. De même les anthologies de peintures, de photographies, de partitions ou d’enregistrements musicaux, même si leur fonctionnement les apparente à l’anthologie littéraire, forment un problème à part et méritent d’être étudiées largement et séparément.

La priorité actuelle du terme anthologie est évidente. C’est probablement à cause des critères d’organisation et de l’importance du péritexte qui constituent les principaux éléments de définition de l’anthologie. La présence de critères d’organisation souligne le fait que l’anthologie est l’expression d’une conscience critique de la littérature, d’une littérature, d’un moment ou d’un mouvement littéraire (Anthologie de la Renaissance; Anthologie de l’âge surréaliste, etc). D. P. forte relève dans les anthologies trois types de dispositions de textes qui peuvent se combiner dans certains cas : l’ordre alphabétique, le classement thématique ou géographique et l’organisation chronologique. Pour être le plus fréquent et pour se présenter comme l’expression explicite d’une conscience de devenir littéraire, le classement chronologique ne saurait être retenu comme le caractère unique de l’anthologie.

L’anthologie aujourd’hui est peut-être la meilleure forme d’organisation d’un besoin individuel ou collectif, national ou international, d’un goût ou d’une esthétique en s’éloignant par son contenu d’un simple catalogue ou album, journal ou alma-nach.

L’anthologie est le lieu d’expression d’une vision et d’un talent individuels, elle est manifestation créatrice de la lecture, d’un choix et d’un rapport strictement lié à la littérature.

Presque chaque auteur d’anthologie écrit une introduction, une préface ou une note préliminaire. Et alors les explications et les excuses suivent. Les motifs sont arbitraires. Mais presque chaque auteur oppose le texte anthologique à l’œuvre littéraire. Roland Barthes en opposant le Texte et l’Œuvre s’inscrit dans une perspective qui relègue l’œuvre dans la finitude matérielle et élève le texte dans le champ d’une pratique théorique, épistémologique et existentielle :

Une œuvre est un objet fini, computable, qui peut occuper un espace physique

(prendre place par exemple sur les rayons d’une bibliothèque); le texte est un champ méthodologique; on ne peut donc dénombrer (du moins régulièrement) des textes; tout ce que l’on peut dire c’est que dans telle ou telle œuvre, il y a ou il n’y a pas du texte: «L’œuvre se tient dans la main, le texte dans le langage». [ 6, p. 373]

Il faut constater que c’est une première tentation de définir pleinement l’anthologie comme un «recueil de textes», leur ensemble pouvant faire une œuvre.

Traditionnellement, la critique comme la recherche littéraire en France se sont plus volontiers appuyées sur les genres, les écoles, les courants, puis sur les textes saisis dans leur dimension abstraite et théorique, que sur les objets concrets que sont les livres et la matérialité des textes qu’ils contiennent.

Au–delà de son caractère normatif, la forme anthologique, qu’elle soit dictée par les besoins de l’université, de l’école ou qu’elle se présente comme œuvre critique d’écrivains (Aragon, Arland, Breton, Cendrars, Eluard, Gide, Péret, Soupault), est bien un discours sur la littérature, une théorie de la littérature en action. Si chaque groupe et chaque génération sont appelés à constituer leurs anthologies propres, c’est que l’anthologie peut être tout à la fois un manifeste, un annuaire ou une œuvre de mémoire sans cesse renouvelée (Fraise Emmanuel, texte sur la couverture de l’ouvrage).

L’anthologie poétique doit être analysée comme une œuvre et comme une lecture créatrices, une médiation suceptible de définir, voire de fonder une identité collective, une littérature ou un aspect du champ littéraire. C’est le cas de l’Anthologie de la Poésie française, composée par Georges Pompidou [20]. Les explications faites par l’auteur nous aident à mieux comprendre l’acte individuel de la sélection :

Tout d’abord, je n’ai pas cherché à faire une anthologie des poètes de nationalité

française, mais des poètes de langue française. Cela veut dire que j’ai éliminé d’office tous les poètes de langue d’oc, des troubadours à Mistral. Mais cela veut dire aussi que j’ai dû sacrifier notre poésie du Moyen Age dont la langue est si différente de la nôtre qu’on ne peut la lire sans traduction. En fait, aucun poème antérieur au XIV-e siècle ne peut être lu dans son texte par un lecteur non-spécialiste. C’est pourquoi cette anthologie commence avec Eustache Deschamps et Charles d’Orléans. Encore ai-je dû moderniser l’orthographe et la langue chaque fois que le respect du rythme ou de la rime le permettait et ajouter quelques notes indispensables. [20, p. 14]

Le lecteur remarquera facilement combien de fois l’auteur a employé le pronom personnel « je» dans le sens créatif.

En 1991 paraît chez Robert Laffont l’anthologie de Bernard Delvaille Mille et cent ans de Poésie Française : De la séquence de Sainte Eulalie à Jean Genet. C’était à l’époque, et elle reste encore aujourd’hui peut-être, la plus ample et la plus grande anthologie dédiée à l’histoire en marche de l’idée et du culte poétique français. Aujourd’hui, en se plaçant à la hauteur du temps (on n’est plus au XX-ème siècle), on pourrait affirmer sans aucune réticence que c’est la plus importante source qui ait fixé les plus grandes traces poétiques de la poésie française.

« Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver» - aimait répéter René Char. Les anthologistes comme P. Delvaille, J. d’Ormesson, Jean Dutourd, etc., ont cherché toujours des « traceurs ».

Dans l’Avertissement de l’anthologie Et toi mon cœur pourquoi bats-tu Jean d’Ormesson distingue deux catégories d’anthologies:

1) des anthologies de type universitaire qui passent en revues les écoles, les

directions, les mouvements littéraires, les styles et les courants ;



  1. des anthologies d’humeur, de goût, qui s’efforcent d’imposer une conception

métaphysique, éthique, esthétique et parfois politique de la littérature. [24, p.7]

Quoi qu’on en dise, une anthologie poétique est avant tout liée aux problèmes du goût et du choix. Le goût n’a jamais été accepté comme catégorie esthétique. Voilà pourquoi chaque anthologie est avant tout une création sélective strictement individuelle. Pour justifier cette pensée nous nous rappelons un entretien de journalistes avec Jean d’Ormesson sur la question « Comment a-t-il opéré son choix pour l’anthologie Et toi mon coeur pourquoi bats-tu » et Jean d’Ormesson dit: «... toute littérature est un choix, voici le mien. On pourra me reprocher de m’arrêter eu début du XX-ème siècle, et alors? Ce livre trace mon portrait, c’est une autobiographie à l’aide de textes classiques. Mais c’est aussi l’éventuelle biographie des lecteurs qui y trouveraient leur propre existence ». [Jean d’Ormesson, Entretien publié dans Média Publicitaire, 1997, 24 juillet].

Chercher et trouver « sa propre existence », c’est un devoir difficile et noble. Quand le Comité d’organisation du Colloque International La Francopolyphonie comme vecteur de la Communication [Chişinău, 24 mars 2006] déclarait que la francophonie du troisième millénaire se veut ouverte et plurielle, que l’Europe de l’Est est une de ses terres de mission [17, p.10] nous voudrions y ajouter que les Universités à longues et bonnes traditions sont obligées de tenir compte de l’éducation esthétique, morale, culturelle. La capacité de l’étudiant moderne de formation philologique sans préparation « côté littérature » serait moins intègre, ses réflexions dans la traduction, surtout celle littéraire, seraient elles aussi dépourvues de profondeur.

L’anthologie poétique par opposition à d’autres recueils vient de l’amour de la poésie. Celui-ci, en dépit de ce que prétendent les critiques qui ne lui accordent qu’une place assez réduite, est infiniment plus fervent qu’on ne le pense généralement. Cet amour ne se manifeste pas bruyamment. Il entend souvent demeurer secret. Il prétend aussi être éclectique et, parmi la masse énorme des poèmes qui furent écrits, un choix s’est peu à peu imposé. A vrai dire, toute anthologie implique par définition un choix, un goût personnel et... un amour.

En 1955 Philippe Soupault et Jean Chouquet ont présenté un ouvrage fait à la suite d’un amour profond et contagieux. Ils ont présenté une anthologie de la poésie française du XIII-ème à la fin du XIX-ème siècle sous un titre significatif « Les deux cents plus beaux poèmes de la langue française ». [21]

L’ouvrage est la conséquence d’une consultation, la plus large et la plus profonde que les moyens techniques de cette époque permettaient de faire. La Radio-


Télévision Française a organisé un référendum, qui a sollicité les votes de vingt millions d’auditeurs et qui a permis de procéder à un sondage en profondeur de l’opinion publique dans le domaine de la poésie française. Le temps – c’est-à-dire amour et mort – en est le thème essentiel [11, p.2]. Voilà pourquoi le classement des poèmes revendiqué par d’Ormesson est le regroupement des textes en quatre saisons: les quatre âges de la vie, bien sûr, et les quatre temps de l’amour :

  1. les Matins de printemps ou l’émerveillement de la poésie ;

  2. les Flammes de l’été ou la brûlure de la poésie ;

  3. les Soirs de l’automne ou la sagesse de la poésie ;

  4. les Nuits d’hiver ou le temps de la séparation de la poésie.

Jean d’Ormesson, étant invité d’honneur de plusieurs entretiens, ne se fatigue pas d’expliquer au public les principes qu’il a éprouvés en l’écrivant: « Mon meilleur livre! Cela tombe bien, il n’est pas de moi! ».

C’est ainsi que Jean d’Ormesson présente son dernier ouvrage aux Conversations de Strasbourg. Et alors on se demande pourquoi il faut « éviter » que l’étudiant moderne connaisse cette richesse de la langue la plus sélectionnée, la plus riche et peut-être la plus profonde. Cette question–réponse confirme encore une fois de plus la stratégie de la Francophonie comme vecteur de la communication: apprenant ou traducteur, professeur ou simple sujet communicant, que l’on parle argot ou que l’on préfère la haute poésie, que l’on s’intéresse aux modernistes ou aux traditionalistes, à un domaine de spécialité ou à aucun, mieux vaut connaître son sujet et avoir réfléchi aux problèmes de la structuration des langues et des littératures. C’est là un excellent exercice d’interculturalité qui nous permet de mieux connaître les autres pour mieux pouvoir nous redécouvrir nous-mêmes. [17, p.10]

Les anthologies poétiques françaises sont en même temps des portes et des fenêtres qui servent à entrer dans le monde, à le voir et à le découvrir.

Il y a des anthologies de reconnaissance; il y a celles de connaissance; mais il y a celles visionnaires. Il ne faut pas aspirer à donner un jour la plus heureuse formule de la poésie; il faut lire tout simplement les anthologies (voir au moins la bibliographie) pour y découvrir que la poésie est l’expression par le langage humain, ramené à son rythme essentiel, du sens mystérieux des aspects de l’existence, elle constitue la seule source spirituelle d’élévation, « une sorte d’appel vers ailleurs ». [24, p.11]

Cueillir et donner dans un seul « bouquet » l’essentiel de la poésie d’un auteur, d’un courant, d’un mouvement ou d’une école de la langue et de la littérature françaises, c’est une tâche difficile et tourbillonnante. Le nombre de ceux qui ont fait ce «boulot» est grand, et les auteurs sont remarquables. On peut constater le nombre des écrivains, particulièrement depuis la fin de la première guerre mondiale, d’Anatole France à Alain Bosquet ou Roger Cailliois en passant par Georges Duhamel, André Gide, André Breton ou Paul Eluard, qui ne répugnent pas à composer des anthologies. Car l’anthologie est avant tout une source d’information, mais encore elle est une source d’inspiration.

Les rapports de la littérature et de la société dans le cadre de l’anthologie, de la littérature et de la psychanalyse, l’analyse du récit, l’étude des genres littéraires et l’anthologie ne sont pas encore éclaircis et les chercheurs y ont encore à faire sérieusement des fouilles.

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