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Petit Manuel à l’usage de la France d’en bas L’école pour tous Tous pour l’école «Le peuple qui a la meilleure école est le meilleur peuple du monde. S’il ne l’est pas aujourd’hui, il le sera demain»


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Petit Manuel à l’usage de la France
d’en bas


L’école pour tous

Tous pour l’école
« Le peuple qui a la meilleure école est le meilleur peuple du monde. S’il ne l’est pas aujourd’hui, il le sera demain »

Jules Ferry


Avant-propos

Les présents documents ont été recueillis en vue de constituer un socle à la réflexion, un argumentaire, un aide-mémoire où chacun peut trouver rapidement les données et les références qu’il recherche. La plupart comportent leurs sources et souvent les liens Internet permettant de les retrouver.

Ce vademecum, ce memento peut être laissé en libre consultation dans les lieux de lutte, les établissements scolaires, les lieux des assemblées générales de grévistes.

Sa diffusion est libre. Cependant, certains documents sont frappés de copyright (certains articles du Monde par exemple).

Les deux premières parties sont centrées sur l’éducation nationale mais les informations qu’elles contiennent sont destinées à tous les citoyens, notamment afin de déchirer le voile des idées reçues propagées ces dernières années pour tenter de diviser « la France d’en bas ». Cette tentative de division illustre parfaitement la mise en œuvre des consignes données par l’OCDE (consignes que l’on pourra d’ailleurs trouver dans ce dossier) pour permettre aux gouvernements de faire passer leurs réformes sans entraîner de mouvement de contestation uni.

Les deux dernières parties concernent l’ensemble des Français. Ainsi la partie sur les retraites intéressera-t-elle tout autant les salariés du secteur privé que ceux de la fonction publique.



N.B. Nous vous proposons ici une version abrégée, expurgée des graphiques, des témoignages et des textes, fort intéressants au demeurant, du dossier complet, disponible sur commande. Pour plus de renseignements, contacter M. Frédéric Bénédetti, e-mail : FredBenedetti@aol.com ou M. Xavier Pellegrini, tel. 06-15-10-70-62, e-mail : x.pellegrini@voila.fr

D’autre part, veuillez signaler les liens internet éventuellement invalides ou périmés en nous contactant par mail

SOMMAIRE

I) Le système éducatif en chiffres ou « qui veut noyer son chien l’accuse de la rage » 4

A- Le coût du système 4

1- La part de la Dépense  Intérieure d'Education (DIE) dans le PIB : pas si cher que cela !… 4

2- Massification et démocratisation : évolution du nombre d’élèves, d’étudiants, de diplômés 4

3- Evolution du nombre des personnels… 5

B- Art pédagogique : Prends quelques idées préconçues et tords-leur leur cou ! 5

1- Les absences des professeurs. 5

2- Les professeurs : temps de travail 5

3- Les salaires : comparaison public privé 6

4- Des fonctionnaires aux patrons : faux privilégiés, vrais nantis, par Pierre Bitoun (INRA) 7

C- Ailleurs… Chaque usage a sa raison ? 10

1- La pénurie des profs et leur salaire comparé à ceux des autres pays de l’OCDE 10

2- La France, élève moyen : étude de l’OCDE sur la qualité des différents systèmes éducatifs 10

3- L’échec du modèle allemand décentralisé 10
II) La décentralisation 11

Introduction : de la première loi de décentralisation à l’avant-projet de la nouvelle (un florilège éloquent, inquiétant…) 11

Lettre à l’usage de ceux qui aiment vraiment l’école (Jean-François Le Van, collège Albert Calmette) 14

A- La décentralisation en question 14

I- La décentralisation pour quoi faire ? 14

1- Quelques rappels. 14



  1. L’esprit de la décentralisation selon le gouvernement. 15

  2. L’esprit de la décentralisation tel que nous le percevons. 15

II- Les pièces à charge 15

1- Le contexte économique mondial. 15

2- La méthode adoptée par le gouvernement. 15

3- La grogne des présidents de régions. 16

4- La prise de position inédite des Inspecteurs d’Académie. 16

5- Déconcentration ou décentralisation ? 16

6- Le changement de dénomination du ministre de l’éducation. 16

7- Le Rapport du Conseil d’Etat du 20 mars 2003. 17

B- Les premières répercussions concrètes de la décentralisation telle qu’elle est mise en œuvre 18

I- Conséquences effectives partout dès la rentrée 2003-2004 18

1- Les Assistants d’Education. 18

2- Une baisse généralisée des moyens. 18

II- Ce qui est expérimenté et qui a vocation à s’étendre 19

1- Le système de remplacement ; le recours massif à des personnels précaires. 19

2- Expérimentation de l’autonomie des établissements(bordeaux académie pilote). 19

3- Globalisation des budgets (Postes et fonctionnement). 20

4- Soumission au critère de rentabilité ; fermeture des structures non rentables. 20

5- Modification des missions des Conseillers Principaux d’Education. 20

6- Haro sur les documentalistes ! 20

7- Extinction ou dégradation des disciplines non rentables. 20

III- Conséquences des transferts de personnels aux collectivités territoriales… 20

1- Problèmes généraux occasionnés par ce transfert et répercussions particulières de celui des T.O.S 20

2- Transfert des Conseillers d’Orientation – Psychologues aux régions. 20

3- Transfert des assistants sociaux aux départements. 21

4- Transfert des médecins scolaires aux départements. 21

Sonnez l’alarme !... Les conseils donnés par des experts de l’OCDE aux chefs des Etats membres, diviser pour réformer. 21



III) Les retraites 23

A- Passage au crible de la réforme Fillon ; public, privé, même combat 23


B- Quelques points de vue fort pertinents… 32

1- Cotisons dans la bonne humeur ! (J-P Piriou, économiste, maître de conférence à l'université Paris I Panthéon) 32

2- Voici pourquoi monsieur Raffarin, nous allons nous opposer à votre réforme. (Pierre Bitoun, sociologue et Anne Carpentier, journaliste et chef d’entreprise). 33

3- L’enjeu des cotisations patronales (Bernard Friot, professeur de sociologie à l'Université Paris X Nanterre) 34

ANNEXES

1- Un petit QCM pour se désintoxiquer, contrôler et compléter votre lecture… 35



2- Une page de science-fiction : une journée à l’école de 2010, si nous ne réagissons pas aujourd’hui 37

3- Le Canard enchaîne nos ministres de l’Education préféré dans leurs mensonges… 39

4- Préambule de la constitution et textes légaux sur le droit de grève 39

I) Le système éducatif en chiffres ou « qui veut noyer son chien l’accuse de la rage »

A- Le coût du système



I)1- La part de la Dépense  Intérieure d'Education (DIE) dans le PIB : pas si cher que cela !...

Chiffres et graphiques sont disponibles sur le site du ministère à la page : www.education.gouv.fr/dpd/etat/ind1b.htm.

La part de la DIE dans le PIB était la même (6,3%) en 1974 et en 1990, a augmenté d’un point de 1990 à 1992, et n’a cessé de baisser pendant les dix années suivantes ! Or est-il logique de laisser ainsi diminuer les dépenses alors que le nombre d’élèves scolarisés et le nombre de diplômés s’est considérablement accru ? De même, est-il logique de hurler au gaspillage, de prétendre qu’on dépense trop alors que manifestement ces dépenses n’ont pas été inutiles mais au contraire indispensables à une tentative d’absorption démocratique la massification ?

Enfin, notre système n'est vraiment pas le plus cher du monde! Nous ne dépassons même pas d’un point la moyenne des pays membres de l’OCDE, et le taux du Danemark est de trois points plus élevé que le nôtre ! Les Etats-Unis dépensent beaucoup plus que nous… Notre système éducatif doit affronter la massification ; on devrait donc dépenser plus qu'avant… Or les dépenses ont baissé malgré ce contexte ! C'est donc clair que l’on nous brade le système scolaire sans nous révéler vraiment pourquoi on veut nous faire croire -à tort- qu'il faut réduire les dépenses et que notre système est trop cher.

Il pourra être intéressant de mettre ces chiffres en perspective avec les résultats de l’étude récente de l’OCDE disponible dans la partie II. Y a-t-il corrélation entre les dépenses d’éducation et la réussite des élèves ?...

I)2) Massification et démocratisation : évolution du nombre d’élèves, d’étudiants, de diplômés.



Evolution du nb d'élèves et d'étudiants effectifs en milliers
Source : MEN in Données sociales 1999, Insee, 1999, p. 41
Cité dans Nouveau Manuel de SES, La découverte, page 378.






+9% de 80 à 97 dans le second degré

+28% de 75 à 97 dans le second degré

+78% de 80 à 97 dans le supérieur

+147% de 75 à 97 dans le supérieur



c'est indéniable le nombre de bacheliers a augmenté

source du graphique ci contre:




dernier numéro de "l'état de l'école" publiée annuellement   par la Direction de la Programmation et du Développement (dépendant du ministère de l'éducation nationale)

Or, une étude menée au Royaume Uni le prouve : Le nombre d¹élèves par classe est un facteur crucial de réussite scolaire. LA MASSIFICATION DOIT S’ACCOMPAGNER D’UNE DEMOCRATISATION IMPOSSIBLE A METTRE EN ŒUVRE SANS MOYENS
Les enseignants en sont convaincus : des classes moins nombreuses favorisent la réussite scolaire. Pourtant, cette évidence n¹en est pas une. Il existe très peu d¹éléments statistiques permettant de confirmer cette impression largement répandue. Les ministres, engoncés dans leurs carcans budgétaires, s¹empressent de mettre en avant les travaux des pédagogues pour nous dire : " la réussite dépend de la qualité du prof, pas de la taille des classes ". Sous la direction du professeur Peter Blatchford, une équipe de chercheurs britanniques vient de briser ce tabou. Leurs résultats, auprès d'enfants de l'école primaire, sont impressionnants: En mathématique, on observe une amélioration des résultats dès que le nombre d¹élèves passe en dessous de 25. En lecture, une réduction du nombre d¹élèves de 25 à 15 représente un gain d¹une année pour les enfants les ³moins bons² et un gain de cinq mois pour tous les autres. Cela signifie que la réduction de la taille des classes permet non seulement d¹obtenir de meilleurs résultats pour tous, mais aussi de réduire considérablement les écarts entre enfants. Dans la perspective d¹une démocratisation de l¹enseignement ce constat est évidemment d¹une importance extrême.
Une analyse plus détaillées ainsi que le texte complet en anglais sont disponibles sur le site Internet de l¹Appel pour une école démocratique. http://users.skynet.be/aped

La taille des classes est déterminante dans la réussite des élèves !
L'étude américaine STAR (Student Teacher Achievement Ratio), l'une des rares recherches réellement scientifiques sur l'impact des effectifs des classes sur la réussite des élèves (une cohorte de 11.000 élèves suivis durant plus de 12 ans)dévoile des résultats fracassants !
STAR établit de manière irréfutable trois faits essentiels.
1) La réduction de la taille des effectifs scolaires dans les premières années d'enseignement est bel et bien un facteur crucial de réussite scolaire (toutes choses restant égales par ailleurs).
2) Les effets d'une réduction de la taille des classes dans les trois premières années d'école sont durables et semblent même augmenter au fil des années d'étude ultérieures.
3) La diminution de la taille des classes permet de réduire considérablement les écarts entre enfants de différentes origines sociales (autrement dit ça rend le système plus démocratique).

Par exemple, STAR a montré que le passage de 25 à 15 élèves au début de l'école primaire réduisait de 54% la différence entre blancs et noirs dans les examens d'accès à l'enseignement supérieur.


Découvrez sur  http://users.skynet.be/aped une description détaillée de l'étude STAR, de ses conclusions ainsi que de nombreux liens vers des documents et des sites relatifs à cette recherche.

I)3) évolution du nombre des personnels… (source : ibid.)

Les chiffres le prouvent : les élèves sont de plus en plus nombreux dans le secondaire et le supérieur. C’est ce que l’on appelle la massification du système. Or, on constate qu'entre 1975 et 1998,  si le nombre d'élèves a augmenté de 28% dans le second degré et de 147% dans le supérieur, en revanche, celui des personnels a seulement augmenté de 15%. Signalons d’autre part que cette évolution du nombre d’enseignants s’est accompagnée d’un changement de leur nature. Ainsi les rectorats recourent-ils désormais massivement aux contractuels et vacataires pour remplacer les titulaires. Ceci évidemment s'associe à une déqualification et une précarisation croissantes des personnels que l'on peut voir à tous les niveaux, ATOSS, surveillants, enseignants...

Le journal de 20h sur TF1 le 27 mai 2003 faisait état d’une augmentation importante des personnels sur les cinq dernières années contre une réduction du nombre d’élèves dans le même temps. C’est un fait. Mais ce rattrapage ne fait-il pas figure de « miettes », en regard du retard accumulé que montrent les chiffres précédents ?

B- Art pédagogique : Prends quelques idées préconçues et tords-leur leur cou !



1- les absences des professeurs.

d'après: INSEE première n° 606 de septembre 98



http://www.insee.fr/FR/FFC/DOCS_FFC/ip606.pdf

Une étude de l'I.n.s.e.e. donne pour les professeurs un "taux d'absence pour maladie ou accident" de 1,6% contre 3% pour l'ensemble des salariés et 2,2% pour les "cadres de la fonction publique". Extrait du commentaire accompagnant le graphique ci après

"Parmi les professions intermédiaires, celles de la santé et du travail social sont les plus absentes pour cause de maladie ou d’accident alors que celles de la fonction publique et des entreprises se retrouvent au même niveau. En revanche, les instituteurs sont les moins absents "

"Globalement, il n’apparaît pas une grande différence entre le secteur public et le secteur privé."

pourcentage de salarié ayant travaillé moins que d'habitude pour maladie ou accident en 1998

public privé par secteur d’activité par catégorie socioprofessionnelle (public privé mélangé)

administrations nationales 2,5 cadres et professions intellectuelles supérieures 1,5

collectivités locales, hlm 3,5 professions intermédiaires 2,3

sécurité sociale 3,5 employés 3,2

entreprises nationales 2,7 ouvriers 3,5

privé 2,9



2- les professeurs : temps de travail


http://www.senat.fr/commission/enquete/index.html#rap

En 1999, le rapport Roché (temps de travail dans la fonction publique) faisait sienne la durée hebdomadaire de 38 h issue de l'enquête de la DEP (1) de 1994 : or celle-ci ne tenait pas compte des recherches personnelles et déduisait la durée des " intercours ", ainsi que bon nombre d'activités régulières, dont la formation continue ...

(1) D.E.P. : Direction de l’Evaluation et de la Prospective de l’Education nationale, devenue D.P.D. : Direction de la Programmation et du Développement.

"Pour le second degré, le rapport de la mission(Roché) se fonde sur une étude publiée en 1996.

Pour les agrégés, la répartition du temps de travail hebdomadaire est passée, de 1988 à 1994, de 38 heures 53 à 38 heures 38

pour les certifiés des collèges de 37 heures 20 à 36 heures 47,

pour les certifiés de lycées de 42 heures 15 à 39 heures 30

pour les PEGC de 41 heures 11 à 36 heures 52

pour les PLP de 41 heures 48 à 38 heures 18.

En moyenne, les enseignants du second degré seraient passés de 40 heures 34 à 38 heures 11. " rapport du sénat »


3- les salaires : comparaison public privé

La fonction publique bénéficie de certains avantages mais pas celui d'un meilleur salaire et ceci dans toutes les catégories socioprofessionnelles…



chez les cadres:

Un professeur certifié ou agrégé gagne 72% du salaire d'un autre cadre agent de l'état et 55% du salaire d'un cadre du privé. Ce même cadre agent de l'Etat (et pas prof) gagnant 77% du salaire d'un cadre du privé



chez les profession intermédiaires:

Un instituteur ou un professeur PEGC gagne 70% du salaire d'un salarié intermédiaire dans le privé.

Un salarié intermédiaire de l'Etat (tous agents confondus) gagne 75% du salaire d'un salarié intermédiaire dans le privé.

chez les employés et ouvriers:

Un employé ou ouvrier agent de l'état gagne 91% d'un employé du privé et 90% d'un ouvrier du privé

Voici les chiffres, d'après

N° 865 - août 2002 http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ip865colette.pdf

salaires des agents de l'Etat en 2000

http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/IP818.pdf

Les salaires dans les entreprises en 2000 -



http://www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/ip833.pdf

salaires annuels moyens en 2000 en euros

cadres

privé: 49430

agents de l'Etat: administratifs et techniques: 38136

agents de l'état: enseignants (agrégés et certifiés): 27348

cadres agents de l'Etat tous ensemble: 28849 (commentaire: vu le nombre important de professeurs dans les cadres des agents de l'Etat: la moyenne chute énormément!!!)

(la catégorie hiérarchique A représente 40,8 % des agents en 2000, hors "emplois aidés", contre 29,5 % en 1990.les fonctionnaires sont de plus en plus qualifiés, il faut donc logiquement les payer davantage)

professions intermédiaires

privé: 26670

agents de l'Etat: prof intermédiaire: administration: 22429

agents de l'Etat: prof intermédiaire: techniques 20996



agents de l'Etat: prof intermédiaire:enseignants (instituteurs et PEGC) 18656

agents de l'état: prof intermédiaire:tous ensemble:20076 (commentaire : c’est encore l'enseignement qui fait chuter la moyenne…)



employés/ ouvriers

employé privé:18700

ouvriers privé: 18800

employés et ouvriers agents de l'Etat considérés ensemble: 17072

employés administratifs agents de l'état 17175

police et prisons agents de l'état 21191

ouvriers agents de service de l'état 14631


source
:capital n°58 Aout 96
dossier "les vrais salaires des fonctionnaires"

page 112: "La grille des enseignants n'a pas été modifiée depuis 1948" "Pour progresser lui(le prof certifié) et la plupart des fonctionnaires n'ont d'autre choix que de se présenter à un concours"


4- Des fonctionnaires aux patrons : faux privilégiés, vrais nantis…

Article de PIERRE BITOUN, sociologue, chercheur à l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), auteur, notamment, de Eloge des fonctionnaires. Pour en finir avec le grand matraquage (Calmann-Lévy, Paris, 2001).

LE MONDE DIPLOMATIQUE | MARS 2002 | Pages 1, 24 et 25

http://www.monde-diplomatique.fr/2002/03/BITOUN/16301 © 2002 Le Monde diplomatique.
Depuis les annonces faites, à deux jours d'intervalle, des candidatures de MM. Jacques Chirac et Lionel Jospin, l'ensemble des postulants à l'élection présidentielle française des 21 avril et 5 mai prochains sont connus. Pour l'instant, le scrutin ne suscite aucune passion. La désaffection des Français pourrait s'expliquer par le nombre de sujets d'accord entre les deux principaux camps, au point que ces derniers en viennent à s'accuser mutuellement de « plagiat ». Le consensus existait déjà en matière de politique étrangère ; les propositions économiques se ressemblent notamment depuis que les socialistes français ont pris l'initiative d'une baisse des impôts et d'un programme massif de privatisations ; la lutte contre l'insécurité est désormais formulée dans des termes presque identiques par les principaux candidats ; l'Europe ne suscite pas davantage de clivages. Cette convergence va-t-elle à présent s'observer en matière de « réforme » de l'Etat et de lutte contre les « privilèges » des fonctionnaires ? Ce serait oublier que les revenus les plus élevés restent ceux des chefs d'entreprise, qui ont progressé de 36 % en 2001. A un moment où la pauvreté, elle, ne marque aucun recul.
Ils sont des nantis. Ils ont la sécurité de l'emploi, sont mieux rémunérés que dans le privé, bénéficient d'une meilleure retraite, travaillent mollement, sont payés les jours de grève... Depuis vingt ans, des pages du mensuel Capital à celles du Nouvel Observateur, de l'émission de plateau à la « une » du Figaro, une campagne de conditionnement tente de faire croire que les fonctionnaires seraient des privilégiés. Publié en 1982, l'énorme best-seller de François de Closets Toujours plus ! avait déjà alimenté ce genre de thématique. A l'époque, révérence ou cécité, nul commentateur n'avait extrait de l'ouvrage cette phrase d'anthologie, mélange de stupidité et de cynisme : « Nous pouvons nous passer de journalistes, de médecins, de professeurs, de fonctionnaires, de cadres et d'ingénieurs, pas de créateurs d'entreprise. Aussi longtemps que la France misera sur l'économie de marché, elle devra tout faire pour favoriser les candidats à la fortune capitaliste. Et tant mieux s'ils ramassent de gros dividendes. Il faut que l'audace paie (1). »

Parallèlement à cette vieille mise en cause de la fonction publique, de son « archaïsme » et de ses « privilèges », les lucratifs cumuls qui favorisent une gigantesque concentration de pouvoirs (et de jetons de présence) au profit de quelques dizaines de « capitaines » de la finance et de l'industrie font l'objet d'un silence qui doit tout à la pudeur - et rien à l'information...

Tout en reprenant certains thèmes (le fonctionnaire planqué, absentéiste, inutile) de la vieille critique, courtelinesque, des bureaucrates du XIXe siècle (2), le discours dominant s'en distingue, de façon radicale, sur plusieurs points. D'une part, les positions de pouvoir des artisans de l'entreprise (hauts fonctionnaires, grands patrons, journalistes) confèrent à la critique une légitimité, au moins apparente, bien plus grande qu'au siècle dernier. C'est l'élite « sérieuse », « réaliste » et « informée » qui parle et gouverne le propos. D'autre part, l'utilisation des moyens modernes de communication assure une diffusion du message, un modelage des consciences d'une efficacité sans précédent. Enfin, et surtout, le ton et les objectifs ont changé. Là où un Courteline brocardait avec un sens du comique et un talent avérés Messieurs les ronds-de-cuir sans en tirer de réelles conclusions politiques, le discours qui prend son essor dans les années 1980 n'a guère le sens de la plaisanterie et relève d'une propagande agressive et politiquement très orientée. En usant de tous les procédés (présentation tendancieuse de données statistiques, amalgames, simplismes, mensonges), il s'agit de faire des fonctionnaires de véritables boucs émissaires au service des visées néolibérales : réduction des budgets publics, privatisations, précarisation de l'emploi, remise en cause des retraites, etc. Essentielles à la mise en place de la société de marché, les principales fonctions de ce matraquage doivent être décrites, tant du point de vue des mécanismes de conditionnement de l'opinion que dans leurs effets réels sur l'Etat, les politiques publiques ou le mouvement social. Il s'agit, d'abord, de faire fonctionner au plus bas coût possible les services publics et faciliter ainsi, à plus ou moins long terme, leur privatisation. En présentant, le plus souvent sans la moindre déontologie, l'évolution comparée du salaire moyen dans le public et dans le privé, en rabâchant que, « dans le match », les fonctionnaires sont les « gagnants » (3), les médias n'ont pas seulement contribué à exciter la jalousie des salariés du privé. Ils ont aussi grandement freiné les revendications salariales dans la fonction publique. A telle enseigne qu'au cours des deux dernières décennies, la part des dépenses induites par la fonction publique d'Etat dans le PIB, c'est-à-dire la fraction de richesses que consacre la France à l'entretien de ses fonctionnaires d'Etat, a diminué de 10,5 à 8,5 %. Ce qui signifie qu'ils coûtent à la nation, proportionnellement à sa richesse, 20 % de moins en l'an 2000 qu'en 1980. Inutile de préciser que ces résultats, pourtant aisément consultables dans les rapports annuels du ministère de la fonction publique, n'ont jamais, eux, fait l'objet du plus petit entrefilet...

Une logique identique a prévalu dans le domaine des moyens matériels et, plus encore, des effectifs. A force de ressasser qu'« ils sont trop nombreux », on en est arrivé à la situation inverse : ils ne le sont pas assez. Et ce dans tous les secteurs vitaux. Justice, police, santé, éducation, transports, caisses de sécurité sociale ou d'allocations familiales, inspection du travail, prévention des risques technologiques, on n'en finirait pas d'énumérer la liste des services publics qui souffrent d'une pénurie, plus ou moins dramatique, de personnel. Seules exceptions, remarquables : les privilégiés des hautes sphères de l'Etat, l'Elysée, Matignon, les cabinets ministériels. Ce qui ne manque pas de piquant et s'avère, en fait, comparable à la situation qui prévaut dans les grands groupes privés. Plus « ça enfle » en haut, dans les équipes de direction, plus « ça dégraisse » en bas, aux niveaux intermédiaires et inférieurs de l'entreprise.

On assiste depuis vingt ans à une politique délibérée de pénurie qui fait de plus en plus reposer le fonctionnement des services publics sur la bonne volonté des salariés. Parce que la demande de la population ne cesse de croître et de se diversifier, ceux-ci se trouvent pris entre le marteau de la rigueur financière et l'enclume des besoins, pressants ou nouveaux. Piégés par leur sens du devoir et de la solidarité, ils consentent un peu partout à un surcroît de travail exercé dans des conditions de plus en plus difficiles, dangereuses, insatisfaisantes. Tout en attisant le mécontentement des usagers et en préparant ainsi le terrain aux privatisations, cette situation provoque des conflits sociaux à répétition auxquels il est généralement répondu par des discours trompeurs sur le redéploiement des effectifs - comme si celui-ci pouvait encore faire face au problème - ou par des plans de créations d'emploi aussi insuffisants que très bien exploités sur le plan médiatique.

Il ne faudrait surtout pas croire que cette politique est en voie d'abandon. Bons élèves de la contrainte des marchés financiers, signataires du pacte de stabilité budgétaire européen ou prêts à discuter des privatisations dans le cadre de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS) à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), nos gouvernants parient désormais sur l'accélération des départs à la retraite pour réussir le dégraissage des effectifs publics qu'ils n'ont pu obtenir par attaque frontale, comme dans d'autres pays. Pari explicite et à court ou moyen terme dans le camp des ultra-libéraux et des libéraux, hypocritement dénié et plus étalé dans le temps chez les sociaux-libéraux.

Un autre objectif, capital, du matraquage est de rogner ou privatiser les droits attachés à la condition salariale. Dans cet esprit, tout droit, du plus minime au plus fondamental, est qualifié d'« avantage », de « privilège ». Ce coup de force des mots, cette fantastique entreprise de culpabilisation ne sont bien sûr pas destinés aux seuls agents du secteur public. Ils visent l'ensemble des salariés.

Ainsi commence-t-on généralement, dans les innombrables dossiers que consacre la presse aux « privilèges des fonctionnaires », par s'en prendre au célèbre maquis des primes et indemnités publiques. Afin d'y dénicher quelque sac de charbon des mineurs, indemnité chaussures des facteurs, prime d'entretien du matériel des employés des cimetières ou prime d'égout des conseillers d'Etat. Facile à faire, toujours drôle en raison des multiples absurdités que recèle ce maquis, ce premier florilège a en fait pour but de « chauffer » le lecteur, de le mettre en condition pour d'autres découvertes, supposées plus sérieuses. A l'image des voyages gratuits pour le personnel de la SNCF, des rabais consentis sur le prix de l'électricité ou du téléphone à EDF et France Télécom ou des colonies de vacances subventionnées par les comités d'entreprise des sociétés publiques mais aussi privées. A ce stade, il devient alors possible de s'attaquer aux conquêtes sociales les plus précieuses. Les retraites, d'abord, à propos desquelles nul n'ignore plus les solutions « équitables », « réalistes » et « modernes » : il faut niveler par le bas en ramenant le public au niveau du privé et les livrer, via les fonds de pension, aux appétits du capitalisme et aux fluctuations de la Bourse. La stabilité de l'emploi, ensuite. Garantie à vie du fonctionnaire, protection relative du contrat à durée indéterminée dans le privé constitueraient des « privilèges », des « droits acquis » d'un autre temps. Le « normal », le « compétitif » seraient désormais, que nous le voulions ou non, la précarité, l'insécurité de l'emploi.

Si, pour l'instant, tous les autres droits ont plutôt bien résisté, force est hélas de constater qu'en ce qui concerne la stabilité de l'emploi il n'en a pas été de même. L'emploi précaire a crû dans des proportions considérables dans le privé mais il a également beaucoup progressé dans la fonction publique. A tel point que près de 25 % des salariés du public (1,3 million sur 5,5 millions) sont contractuels ou précaires. En même temps que s'effectuait ce grignotage, on a vu disparaître du centre du débat intellectuel ou social sur le travail toute référence positive à la stabilité de l'emploi. Comme si, au fond, cela faisait « ringard »...
Une entreprise de division

Or, qui n'en connaît les bienfaits ? Condition indispensable quoique non suffisante de la liberté d'expression, au travail comme ailleurs, la stabilité de l'emploi est aussi ce qui permet, accompagnée d'un salaire décent, d'avoir une vie confortable, ouverte sur l'avenir, faite de projets pour soi-même ou ses proches. Projets qui sont bénéfiques à l'économie et à la société et évitent que celle-ci ne se transforme en un champ de méfiances, de frustrations, de violences. Rien n'oppose, contrairement à ce que l'on entend souvent dire, la stabilité de l'emploi et cette autre valeur, très prisée, qu'est la diversité. Bien au contraire, c'est souvent quand on a l'assurance de la stabilité que l'on peut sereinement envisager « autre chose », qu'il s'agisse d'innover sur son lieu de travail, d'entreprendre une activité « à côté » ou de se divertir. Bref, comme les retraites, la stabilité de l'emploi n'est pas seulement une conquête sociale pour laquelle des générations se sont battues. Elle est une valeur de civilisation qui rend la vie et la société véritablement humaines et vivables.

Troisième fonction : diviser la population afin d'empêcher la formation d'un mouvement social large et unitaire. Des incessantes comparaisons des conditions des salariés du public et du privé à la rengaine sur les « usagers-otages », des syndicats de fonctionnaires « gréviculteurs » à « l'indispensable service minimum », on a, là encore, cogné dur. Avec des résultats contradictoires.

D'un côté, l'offensive a fait la preuve de son efficacité et contribué, avec bien d'autres facteurs, à la fameuse atonie du mouvement social durant les années 1980, lisible dans la très forte chute des grèves au sein des entreprises du secteur privé et semi-public. Alors que le chiffre moyen annuel de journées non travaillées s'y élevait dans les années 1970 à 3,5 millions, il n'était plus que de 1,3 million dans la décennie suivante (4) !

De l'autre, l'entreprise de division a été si grossière qu'elle a, dans un délai finalement assez court, été retournée à l'envoyeur sous la forme du « Tous ensemble ». En témoignent le soutien populaire au mouvement de 1995, les manifestations unitaires de 2001 sur les retraites ou les fronts communs « élus-fonctionnaires-salariés du privé-usagers » qui se sont multipliés ces dernières années pour défendre le service public et l'emploi. Autrement dit, tout ce qui irrite voire rend haineux les ultra-libéraux.

Ultime objectif : éviter la remise en cause des véritables privilégiés de nos sociétés. Soit ces journalistes stars grassement rétribués pour leur travail de modelage de l'opinion, ces hauts fonctionnaires des « fromages de la République » ou des postes de direction des institutions européennes et mondiales, ces patrons des grands groupes au train de vie proprement hallucinant (salaires extravagants + jetons de présence juteux + stock-options à satiété + pactoles de licenciement + retraites somptueuses + avantages en nature surabondants + évasion fiscale légale ou illégale...), enfin, ces détenteurs de méga-fortunes habitués des palmarès et des fondations alibis.

Pour ces riches et ultra riches, le traitement médiatique s'avère singulièrement moins vindicatif que pour les fonctionnaires. Certes, on dénonce bien leur suffisance, leurs prébendes, leurs gains boursiers phénoménaux ou l'on met en cause les plus corrompus d'entre eux. Mais en même temps, à coups de portraits flatteurs du « manager de l'année » ou de reportages télévisés sur leurs habitudes de luxe, on entretient, par-dessus tout, la fascination de l'opinion pour leur argent et leurs privilèges. On cultive également le leurre de la transparence, sans autre effet que la transparence elle-même. Enfin on sait omettre, quand il le faut, quelques données particulièrement gênantes.

Tel est le cas des cumuls de postes de direction et d'administration des grandes entreprises. Régulièrement abordé par la presse, grand public ou spécialisée, le sujet peut sembler rebattu. Or il n'en est rien car la présentation journalistique ne fournit jamais que la partie émergée de l'iceberg (5).

Ce travail d'occultation s'effectue par divers biais. D'une part, les journalistes se limitent généralement aux mandats d'administrateur, c'est-à-dire aux personnes physiques qu'on a priées de venir siéger dans un conseil, et évoquent plus rarement d'autres positions telles que celle de membre de conseil de surveillance. D'autre part, ils oublient les mandats de représentant permanent, c'est-à-dire les fonctions d'administrateur qu'occupe un individu dans un conseil en tant que représentant d'une personne morale (une autre société). Enfin, il n'est pas fait référence aux multiples postes de PDG, directeur ou gérant mais uniquement au principal d'entre eux. En d'autres termes, c'est une vision très partielle et édulcorée du phénomène des cumuls dans le monde économique et financier que donne la presse.

Les raisons de ce mensonge par omission se comprennent fort bien dès lors qu'on s'est procuré ce qui est sans nul doute la bible sur le sujet : le Dafsa des administrateurs, publié chaque année par la société du même nom et facilement consultable (par exemple, à la bibliothèque du Centre Georges-Pompidou, à Paris). A partir de cet épais volume de près de mille pages, nous avons élaboré le tableau qui fournit, sur la base des dernières données disponibles (2000) et au travers d'un échantillon de 50 personnes, une plus juste et complète appréhension du phénomène.

Les résultats défient l'entendement. Ils sont 50 et cumulent 397 postes de direction, 491 mandats d'administrateur, 208 mandats de représentant permanent et 117 autres fonctions (conseil de surveillance, présidence d'organismes divers, etc.). Soit au total 1 213 postes et, en moyenne, 24 par individu !

Certains, à l'image des cinq premiers du tableau, sont d'une voracité inouïe et cumulent de 40 à 59 fonctions, le plus souvent à l'intérieur de leur groupe (Yves Carcelle, Patrick Ricard, Philippe Foriel-Destezet, Gérald de Roquemaurel) mais aussi à l'extérieur. Cette année-là, le cinquième, Vincent Bolloré, n'appréciait visiblement pas de ne présider que Bolloré, Bolloré Investissements ou Bolloré Participations. Et donc Fiat France, la Société des chemins de fer et tramways du Var et du Gard, la Compagnie des tramways de Rouen ou celle des Caoutchoucs de Padang figuraient, entre autres, à sa liste de mandats de représentant permanent. En outre, compter, parmi ses treize fauteuils d'administrateur, la Société financière luxembourgeoise, la Société nationale d'exploitation des tabacs et allumettes ou être conseiller de la Banque de France ne paraissait pas non plus l'effrayer.

La suite et le milieu du tableau ne sont pas moins instructifs. On y trouve en effet de tout : des héritiers de dynasties politiques (Etienne Pflimlin, 38 postes), industrielles (Laurent Dassault 23, Arnaud Lagardère 21, Olivier Bouygues 19) et financières (Eric de Rothschild 28), des nouveaux venus de l'industrie du divertissement (Michel Guillemot 38, Alain Weill 22) ou du sport (André Crestey 29). Ou bien encore des femmes qui, tout en détonant dans ce milieu dominé par les hommes, ne manquent pas d'un solide appétit : Brigitte Gauthier-Darcet d'Europe 1 (31), Gilberte Lombard du Crédit commercial de France (28).

La permanence des héritiers

Plus bas encore, on peut vérifier la règle selon laquelle on peut cumuler moins que ses congénères - mais encore énormément - tout en étant beaucoup plus célèbres qu'eux. Tel est le cas de la lanterne rouge, le « multicartes » Alain Minc, dont les dix territoires portent la marque de sa longue amitié avec François Pinault et de ses affinités mondaines : président de sa société AM Conseil, il était alors aussi président du conseil de surveillance du Monde et de la Société des lecteurs du journal, administrateur de la Fnac, de Mk2, de Moulinex, de Valeo et de Vinci, membre du conseil de surveillance de Pinault-Printemps-Redoute et de Yves Saint Laurent Parfums. Comment oublierait-on Ernest-Antoine Seillière qui n'hésitait pas à ajouter à la présidence du Mouvement des entreprises de France (Medef) seize autres fonctions : président de la Compagnie générale d'industrie et de participations et de Marine-Wendel, vice-président de Cap Gemini, conseiller de la Banque de France, administrateur chez Eridiana Beghin-Say, Gip, Valeo, à la Société générale et à la Société lorraine de participations sidérurgiques, membre du conseil de surveillance de Gras Savoye et Cie, Hermès international, Oranje-Nassau Groep et Peugeot, représentant permanent enfin chez Stallergenes, Bio-Mérieux Alliance et au Bureau Veritas chargé de la classification des navires. Et donc, jusqu'en 1998, de l'Erika...

Tous enfin, loin d'être ces simples représentants de l'« exception française » que se complaît à décrire la presse, témoignent des dynamiques actuelles du capitalisme : internationalisation et prolifération des activités au sein des grands groupes qui contribuent à l'augmentation du nombre de sociétés et donc de postes à pourvoir, financiarisation et émiettement croissants de l'actionnariat qui y concourt également, interpénétration du capital public et privé au travers des prises de participations croisées, etc. Mais ils en traduisent aussi les permanences. Par la présence, on l'a vu, de maints héritiers ou une concentration du pouvoir en, finalement, très peu de mains : pour passer de l'échantillon représentatif à la réalité, il suffirait de multiplier les noms par quatre ou cinq tout au plus...

Ce qui permettrait, en définitive, de poser à tous ces ultra privilégiés quelques questions discourtoises mais essentielles. Etes-vous certain, à cumuler ainsi, de bien respecter la loi sur les sociétés ? Comment faites-vous pour assumer quotidiennement les différentes fonctions attachées à chacun de vos postes ? Et combien d'argent en retirez-vous au total ? Histoire de poursuivre l'oeuvre de transparence et de disposer de données exploitables pour l'instauration d'un plafond de revenu. Il existe bien un revenu minimum d'insertion (RMI). A quand un revenu maximal de solidarité (RMS) ?

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Voir le tableau Les cumuls dans le monde économique et financier, et l'article Flamme bourgeoise, cendre prolétarienne.

(1) François de Closets, Toujours plus !, Grasset, Paris, 1982, p.130.

(2) Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, Garnier-Flammarion, Paris, 1996.

(3) En réalité, les résultats sont donnés d'avance puisqu'il existe une plus forte proportion de diplômés et de cadres dans le public que dans le privé. Mais bien rares sont les organes de presse qui prennent soin de le préciser...

(4) Ces chiffres moyens ont été calculés à partir des statistiques officielles reproduites dans Jean-Paul Juès, La grève en France, PUF, Paris, 1998, p. 117.

(5) Signalons toutefois deux exceptions à cette règle : les numéros du 14 au 20 mai 1998 de L'Evénement du jeudi et du 1er au 7 juin 1998 de Marianne qui avaient bien voulu donner écho, à l'époque, aux données publiées dans Les Cumulards : la confiscation de l'argent, du pouvoir et de la parole, Stock, Paris, 1998.
C- Ailleurs… Chaque usage a sa raison ?

1- La pénurie des profs et leur salaire comparé à ceux des autres pays de l’OCDE

a) comparaison salaires d’après enquête OCDE.

Regards sur l'éducation - OCDE 2001 www.oecd.org/els/education/ei/EAG/ En français : http://www1.oecd.org/els/fr/

Ce site fournit des chiffres tout à fait révélateurs ; des graphiques élaborés par nos soins d’après les données de l'OCDE sont consultables dans le dossier complet.


  • Salaire statutaire d'un professeur de lycée (enseignement général public), ayant 15 ans d'ancienneté et la certification standard requise. On constate que les profs en France sont loin d'être les mieux payés parmi les pays de l'OCDE, leur traitement étant même inférieur à la moyenne. D’autre part, en % du PNB, les Français sont encore en deçà de la moyenne. En Corée du sud, un professeur touche 2,5 fois le PNB par habitant alors qu'en France on est à peine à 1,28 fois le PNB. Cependant, si l’on se fonde sur le pourcentage du PNB par habitant et non plus seulement sur la somme perçue par l’enseignant, les données changent. Par exemple, si les professeurs pouvaient sembler bien payés aux Etats-Unis, on se rend compte qu’ils ne le sont pas du tout en raison de l’importance du PNB/hab. du pays. Mais la charge d'enseignement n'est pas la même partout (par exemple, aux Etats-Unis, le service d'un professeur de lycée est supérieur de 50 % à la moyenne des pays de l'OCDE)

- Salaire par heure de présence devant élèves d'un professeur de lycée (enseignement général public), ayant 15 ans d'ancienneté et la certification standard requise. Rapport entre le  traitement annuel et le nombre d'heures de présence devant les élèves. La France se situe dans la moyenne pour un rapport à peine supérieur à la moitié du rapport suisse
Source : OCDE 2001 http://www.oecd.org//els/education/ei/EAG/tables/D1.xls ; http://www.oecd.org/els/education /ei/eag/tables/D3.xls

NB : l'OCDE a aussi relevé pour onze pays le montant maximal des primes statutaires : il représentait en moyenne 12 % du traitement de base ; la France se situait dans la moyenne, avec 11 %. En France il s’agit d’indemnités et non de primes.

2- étude de l’OCDE sur la qualité des différents systèmes éducatifs : la France élève moyen

On l’a vu avec des dépenses dans la moyenne le système français ressort comme ayant une réussite moyenne. LE MONDE | 04.12.01

La France, élève moyen de la classe OCDE L'OCDE délivre des satisfecit aux pays les plus performants. La Finlande, le Japon, la Corée figurent ainsi au premier rang de l'étude pour la "compréhension de l'écrit", la "culture mathématique" et la "culture scientifique", les trois domaines concernés par l'enquête. Ils comptent également parmi les pays qui enregistrent un écart faible entre les meilleurs élèves et les moins bons. "Un niveau élevé de performance globale peut aller de pair avec une répartition équitable des résultats", en conclut l'OCDE. La Grande-Bretagne, le Canada, l'Australie obtiennent eux aussi des résultats largement supérieurs à la moyenne de l'OCDE, ces données globales pouvant néanmoins varier fortement selon les établissements scolaires.

L'OCDE souligne la réussite de certains pays en matière de lutte contre les inégalités sociales à l'école. Elle se félicite que le lien entre le milieu social des élèves et leurs résultats scolaires ne soit pas automatique. "Les écoles - et les décideurs politiques - ont de toute évidence un rôle à jouer dans [cette] lutte", note l'OCDE. De nouveau, le Canada, la Corée, la Finlande figurent parmi les pays qui parviennent à limiter l'impact négatif du milieu social et familial sur la réussite des élèves. La Suède, le Japon et l'Islande sont aussi distingués. Le volontarisme politique apparaît également efficace pour réduire les inégalités sexuelles à l'école, constate l'organisation internationale.



Commentaire: en termes de niveau et de démocratisation le Japon, la Corée, le canada et la Finlande sortent du lot.

Les réussites des pays les plus en pointe résultent d'un ensemble d'éléments. "Aucun facteur n'explique à lui seul pourquoi des établissements scolaires ou des pays obtiennent de meilleurs résultats, mais certaines politiques et pratiques sont en général associées à la réussite", indique l'OCDE. Les résultats moyens d'un pays sont en général corrélés avec le niveau des dépenses consacrées à l'éducation, sans que ce lien soit systématique. L'environnement dans lequel se déroule l'apprentissage, de la petite enfance jusqu'à l'âge de quinze ans, est un facteur important : la présence d'enseignants spécialisés et la qualité des relations entre élèves et professeurs influent sur la réussite, souligne l'OCDE.

La France - pour laquelle 4 673 jeunes issus de près de 200 établissements ont subi les tests - se situe dans la moyenne des pays participants en matière de "compréhension de l'écrit" et de "culture scientifique". Elle se place au-dessus de la moyenne en matière de "culture mathématique" - une tendance déjà signalée par des enquêtes thématiques antérieures. L'étude met en évidence des forces et des faiblesses propres à la France. Les élèves français montrent ainsi une réelle capacité, par rapport aux élèves des autres pays, à rechercher les informations demandées. Ils sont plus faibles, à l'inverse, dès qu'il s'agit d'interpréter les données, d'opérer une synthèse ou de livrer une analyse personnelle. En mathématiques, ils disposent de réelles compétences en géométrie ou dans la lecture de graphiques. Leurs résultats sont en revanche plus décevants en algèbre. "Les résultats français sont supérieurs à la moyenne de l'OCDE lorsqu'il s'agit d'exercices purement scolaires, mais cela n'est pas le cas lorsque la situation nécessite une prise d'initiative", constate la direction de la programmation et du développement (DPD) du ministère de l'éducation

3- l’échec du modèle allemand décentralisé


LE MONDE | 04.12.01 | 12h11 L'autocritique de l'Allemagne, nulle en lecture et en maths

Berlin de notre correspondante

Une débâcle», «une misère», «une catastrophe»... Plusieurs semaines encore après la publication du Pisa (Programme international pour le suivi des acquis), enquête comparative de l'OCDE sur le niveau scolaire des élèves de 15 ans, l'Allemagne ne se remet pas de s'être soudain découverte aussi cancre. Sur 32 pays examinés, elle s'est classée 27e en lecture, seuls les élèves de Lettonie, du Luxembourg, du Mexique et du Brésil s'avérant encore plus mauvais que les petits Allemands. En maths et sciences naturelles, l'Allemagne est arrivée 20e, loin derrière la France (10e en maths, 12e en sciences naturelles). Dans ce pays qui s'imaginait volontiers encore «patrie des poètes et des penseurs», un quart des jeunes ne comprennent rien, ou pas grand-chose, lorsqu'on leur présente un texte à lire, a révélé l'enquête.

« Nous ne pourrions pas donner un livre entier à lire à nos classes», confirme Uwe Duske, directeur de la Hauptschule de Berlin-Lichterfelde, quartier plutôt bourgeois de l'ouest de la capitale. «Pour beaucoup trop d'élèves, la lecture est devenue une culture étrangère. Et l'on ne peut pas dire que ce soit la faute aux élèves étrangers, puisque 82 % de nos élèves sont d'origine allemande.» Sous le choc du Pisa, tous les principes qui ont fait la particularité et la fierté de l'enseignement allemand sont soudain remis en question: le fédéralisme, qui délègue aux 16 Länder (Etats régionaux) toutes compétences ou presque en matière d'enseignement, la pédagogie antiautoritaire développée depuis 1968, la demi-journée qui concentre les cours de 8 à 13 heures, et surtout le tri précoce, à 10 ans, entre les meilleurs élèves, envoyés vers les Gymnasium (les lycées, menant aux études universitaires), les élèves moyens, expédiés vers les Realschulen (débouchant sur les écoles professionnelles), et les plus mauvais, casés dans les Hauptschulen (écoles principales).

Contingent. Car les travaux de l'OCDE ont montré que le système scolaire allemand est encore plus ségrégationniste que l'américain ou le britannique: de tous les pays testés, l'Allemagne est celui où l'origine sociale des élèves détermine le plus sûrement leur parcours scolaire. «Le système est simple, enrage un ancien élève orienté à l'âge de 10 ans vers une Hauptschule. Dans leurs classes, les profs ont besoin d'un contingent de bons pour le lycée, de moyens pour la Realschule et de nuls pour la Hauptschule. Ils n'ont pas besoin de se soucier de rattraper un élève qui décroche.»
L'Allemagne a un grave problème d'enseignants, reconnaît Rainer Lehmann, professeur de pédagogie à l'université Humboldt de Berlin. «A l'université, les étudiants qui s'orientent vers le métier d'enseignant sont plutôt ceux qui ont des résultats moyens.» La règle impose en outre aux professeurs de lycée d'étudier puis d'enseigner deux matières, souvent totalement différentes. «Cette combinaison entre une compétence souvent réduite et la destruction du principe d'autorité depuis 68 peut être désastreuse», observe Rainer Lehmann. Car l'école «ludique», développée en réaction à l'autoritarisme nazi, livre des élèves qui n'ont pas «appris à apprendre» et «ont de plus en plus de mal à se concentrer sur un travail», déplore le président de la Fédération des enseignants allemands, Josef Kraus. «Les examens, jusqu'au bac inclus, ne sont pas centralisés: chaque établissement choisit ses sujets d'examen, en fonction de ce qu'il a enseigné ou pas, dénonce-t-il. Tout cela conduit à un nivellement vers le bas car, même dans les Länder les plus exigeants, comme la Bavière, les parents protestent qu'en Rhénanie-Westphalie leurs enfants auraient le bac sans difficulté.»

Sélection précoce. De ce constat général de crise, les responsables politiques tirent des leçons contradictoires. Les Länder conservateurs (Bavière, Bade-Wurtemberg...), adeptes de la sélection précoce et d'un enseignement plus strict, soulignent que leurs méthodes leur assurent des résultats bien meilleurs. Les Länder à dominante social-démocrate (Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Berlin...), qui ont tenté depuis les années 70 de retarder la sélection et de prendre en charge les enfants toute la journée, soulignent que les pays les mieux classés par le Pisa ont généralement des systèmes de ce type. La conférence des ministres de l'Education des 16 Länd3er, réunie en urgence pour réagir au Pisa, n'a pu s'entendre que pour prôner «des réponses complexes et différenciées», un effort accru d'apprentissage de l'allemand pour les enfants d'immigrés ou une meilleure évaluation des écoles. Les responsables politiques attendent en fait les résultats détaillés, région par région, qui ne seront pas publiés avant l'été. A défaut de remèdes, la prochaine bataille de l'enseignement est déjà programmée.



II) décentralisation :

INTRODUCTION : de la première loi de décentralisation à l’avant-projet de la nouvelle…

Les inégalités existant déjà en 2003 étant en grande partie dues à la première loi de 1982, une deuxième loi poussant plus loin la décentralisation ne pourra qu’aggraver ces inégalités !...
La première loi de décentralisation de Gaston Deferre sous le gouvernement Mauroy a confié la gestion des locaux et du matériel aux collectivités territoriales

Ecoles aux mairies : les écarts d’une commune à l’autre varient de 1 à 10(Luc Ferry dans Pièces à conviction France3 jeudi 5 juin 2003), la restauration scolaire est presque partout confiée à des sociétés privées de confection industrielle de repas, le prix des repas est environ 2 fois supérieur à celui d’un repas préparé sur place par des fonctionnaires d’état, les ATSEM sont de moins en moins souvent titulaires, elles sont recrutées par les mairies avec un statut fragile et recrutées sans équité par le biais des connaissances ou de l’accointance politique avec la mairie.

Collèges aux conseils généraux : des inégalités flagrantes sont apparues en termes d’équipements informatiques, de vétusté des locaux, de remboursements des transports scolaires, d’attributions de fonds sociaux, tout cela dépendant de la volonté des conseils généraux d’investir plus ou moins pour l’éducation.

Lycées aux conseils régionaux : même schéma que pour les collèges, avec en prime des attributions d’équipements déséquilibrés entre établissements publics et privés sous contrat. voir ci dessous l’exemple édifiant de la Loire Atlantique :

Ce qu'il y a de formidable dans l'enseignement privé, c'est que dès qu'on ne le surveille pas , il s'arrange pour détourner en direction de leurs propres établissements les subsides publics logiquement promis aux établissements publics…


Prenons la Loire atlantique (sources Ouest France 20/05/2000) département où l'enseignement privé sévit dans un nombre important d'établissements bien qu'il reste nettement minoritaire par rapport à l'enseignement public.
Le conseil général engage un plan informatique en direction des établissements scolaires du département: montant total 150 millions de francs.
Ce plan va concerner 16 établissements publics contre pas moins de 29 établissements privés! Un esprit tatillon pourrait rétorquer que cela ne signifie pas nécessairement que la part accordée au privé soit supérieure à celle du public. La suite de l'article est édifiante: sur les 150 millions de francs sur 3 ans, la dotation globale pour les établissements publics sera de 22 millions de francs!!! Le journaliste de Ouest France que les chiffres qu'il indique ne scandalisent apparemment pas précise par ailleurs, -afin de noyer le poisson-, que la dotation pour le secteur privé sera d'au moins 3 millions de francs, dans un premier temps… Car c’est en fait bel et bien la somme de 126 millions de francs qui ira dans les caisses du privé en 3 ans!

Le détail des dotations est aussi instructive: les 22 établissements publics fournis en matériel sont essentiellement des établissements classé ZEP tandis que les collèges privés concernés sont ceux qui , déjà, drainait les enfants de tout ce que Nantes connaît comme hauts bourgeois, notables de l'argent et politiques (Blanche de Castille, Loculi, etc etc).

Commentaire de M. Charles RINGARD, inspecteur académique pour le mot de la fin qu'il partage avec Didier Grolleau, directeur adjoint de l'enseignement diocésain: "C'est un choix citoyen" !...
L’AVANT-PROJET DE LOI SUR LA DECENTRALISATION : UN FLORILEGE ELOQUENT ? INQUIETANT…
Daniel ROBIN le 2 juin 2002

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