Gedinne Les tandems du dépassement – Tour de Belgique pour handicapés visuels

En ce jour de l'Ascension – tout un symbole – sur le circuit de Gedinne cher à Antoine Schmit, il n'est pas question pour une fois de bolides vrombissants, pétaradants, caracolants. Les ont remplacés de drôles de machines, tout en longueur, discrètes, quasi furtives. Au guidon de l'avant, un clairvoyant et derrière un malvoyant, ce qui fait quatre jambes pédalant. En parfaite synchronisation : on ne sait si c'est l'un qui tire l'autre ou ce dernier qui propulse le premier ; toujours est-il que la conjugaison de leurs efforts donne des résultats qui laissent pantois : pensez donc , plus de 44 km/h de moyenne pour le prologue contre la montre de 5 km. Et durant la course en ligne de 75 km, la cadence reste élevée, la coordination ne faiblit pas, l'osmose reste parfaite entre deux volontés qui ont choisi de se dépasser. Tout ça force l'admiration des spectateurs, hélas trop peu nombreux. Car, il y a bien plus qu'un aspect sportif dans cette compétition d'un genre unique. Il tombe à pic l'aphorisme qui dit qu'aimer, c'est regarder ensemble dans une même direction ainsi que le dernier titre de Guillaume Musso « Que serais-je sans toi » ? Quand un homme prête son regard à un autre pour qu'il puisse exister pleinement et se réaliser, c'est plus qu'un geste d'humanité, c'est une grande leçon de clairvoyance.

Venez faire un tour à Gedinne, c'est une région magnifique, on y vient de partout. Eh bien, ils sont venus ces coureurs de toute l'Europe, de Biélorussie, de Roumanie, de Pologne, d'Italie, d'Allemagne, de France et de Navarre et d'ailleurs, sans oublier les Belges et notamment Marc Eymard, le régional de l'étape. Certains, comme les Polonais vainqueurs de l'épreuve gedinnoise ont participé aux Jeux Olympiques de Pékin. Sur le tarmac, il y a comme un petit air de tour de France. Grande concentration pour les concurrents qui se font masser comme il se doit pendant que les mécanos ajustent au plus près les mécaniques. Les officiels se préparent et à ce propos, force est de constater que nos amis flamands ont une course d'avance. Bien entendu, les commentateurs fonctionnent aussi en tandem, la langue de Vondel succédant à celle de Voltaire. Après qu'il a chanté la messe à Laforêt nous arrive l'invité d'honneur en la personne de Marcel Javaux – primus inter pares – la référence en matière d'arbitrage, question football bien entendu. C'est avec l'humour et l'à-propos qu'on lui connaît qu'il répond bien aimablement aux diverses questions posées par un Thierry Rose plus volubile que jamais. A ce propos, annonceurs et commerçants qui avez patronné l'épreuve, soyez rassurés, vos noms et coordonnées ont été répétés à l'envi par ce professionnel du micro qui n'en est pas à sa première sur le circuit de Gedinne. Suivent l'épreuve d'un oeil attentif, le bourgmestre Vincent Massinon, l'échevin-docteur Pierre Rolin qui remettront les prix aux divers équipages. Noël Suray , conseiller communal est aussi présent et fort intéressé. Que tout oubli de personne, involontaire, soit pardonné.

Une telle organisation suppose une certaine intendance allant des signaleurs aux barmen sans oublier les préposés aux tickets, les responsables du barbecue pour en arriver au staff ravitaillement assuré par une présence quasi exclusivement féminine. Quelque 130 spaghetti seront servis à la salle de Patignies avant la dégustation finale sous le chapiteau monté sur le circuit. « Faboulos ! » susurre un Espagnol dont les yeux semblent rivés sur cette immense broche qui tourne sans pitié faisant dorer un sacré cochon dont chacun va se régaler.