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Taz : Zone Autonome Temporaire


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«Partis pour Croatan».


Nous n'avons aucune envie de définir la TAZ ou d'élaborer des dogmes sur la manière dont elle doit être créée. Nous nous contentons de dire qu'elle a été, qu'elle sera et qu'elle est en devenir. Il serait alors plus intéressant et plus utile d'examiner quelques TAZs passées et présentes, et d'envisager ses manifestations futures; en évoquant quelques prototypes, nous pourrions être à même d'apprécier l'étendue possible de l'ensemble, et d'apercevoir éventuellement un «archétype». Abandonnant toute tentative d'encyclopédisme, nous adopterons une technique d'éparpillement, une mosaïque d'aperçus, en commençant tout à fait arbitrairement avec le xvie-xviie siècle et la colonisation du Nouveau Monde.

L'ouverture du «nouveau» monde fut conçue d'emblée comme une opération occulte. Le mage John Dee, conseiller spirituel d'Elizabeth I, semble avoir inventé le concept d'«impérialisme magique», et avoir contaminé de fait une génération entière. Halkyut et Raleigh tombèrent sous son charme, et Raleigh usa de ses contacts avec «l'Ecole de la Nuit» - une kabbale de penseurs avancés, d'aristocrates et d'adeptes - pour pousser la cause de l'exploration, de la colonisation et de la cartographie. La Tempête de Shakespeare était une pièce de propagande pour la nouvelle idéologie et la Colonie Roanoke fut sa première vitrine expérimentale.

La vision alchimiste du Nouveau Monde associa celui-ci à la materia primera ou hylè, à l'«état de Nature», à l'innocence et au tout-est-possible («Virgin-ia»), un chaos que l'adepte transmuerait en «or», c'est-à-dire en perfection spirituelle aussi bien qu'en abondance matérielle.

Mais cette vision alchimiste relève également d'une fascination actuelle pour l'originel, une sympathie rampante, un sentiment d'envie pour sa forme sans-forme, et qui prend pour cible le symbole de «l'Indien»: «L'Homme» à l'état de nature, non corrompu par le «gouvernement». Caliban, l'Homme Sauvage, est comme un virus qui habite la machine même de l'Impérialisme Occulte. Les humains forêt/animaux sont investis d'emblée du pouvoir magique du marginal, du méprisé et de l'exclu. D'un côté Caliban est laid, et la Nature est une «étendue sauvage hurlante». De l'autre, Caliban est noble et sans chaînes et la Nature est un Eden. Cette fracture dans la conscience européenne précède la dichotomie Romantique/Classique; elle s'est enracinée dans la Haute Magie de la Renaissance. La découverte de l'Amérique (l'Eldorado, la Fontaine de Jouvence) l'a cristallisée, et elle a pris forme dans les schémas réels de la colonisation.

À l'école primaire on a appris aux Américains que les premières colonies de Roanoke avaient échoué ; les colons disparurent, ne laissant derrière eux que ce message cryptique: «Partis pour Croatan». Des récits ultérieurs d'«indiens-aux-yeux-gris» furent classés légendes. Les textes laissent supposer que ce qui se passa véritablement, c'est que les indiens massacrèrent les colons sans défense. Pourtant «Croatan» n'était pas un Eldorado, mais le nom d'une tribu voisine d'indiens amicaux. Apparemment la colonie fut simplement déplacée de la côte vers le Grand Marécage Lugubre et absorbée par cette tribu. Les indiens-aux-yeux-gris étaient réels - ils sont toujours là et s'appellent toujours les Croatans.

Ainsi - la toute première colonie du Nouveau Monde choisit de renoncer à son contrat avec Prospero (Dee/Raleigh/l'Empire) et de suivre Caliban chez l'Homme Sauvage. Ils désertèrent. Ils devinrent «Indiens», «s'indigénèrent» et préférèrent le chaos aux effroyables misères de la servitude, aux ploutocrates et intellectuels de Londres.

Là où se trouvait jadis l'«Île de la Tortue», l'Amérique venait au monde, et Croatan resta enfouie dans sa psychè collective. Par-delà la frontière, l'état de nature (i.e. l'absence d'État) prévalut - et dans la conscience du colon, l'option de l'étendue sauvage était toujours latente, la tentation de laisser tomber l'église, le travail de la ferme, l'instruction, les impôts - tous les fardeaux de la civilisation et de «partir pour Croatan» d'une manière ou d'une autre. En outre, quand en Angleterre la révolution fut trahie, tout d'abord par Cromwell, puis par la Restauration, des vagues de Protestants radicaux s'enfuirent ou furent déportés vers le Nouveau Monde (qui était devenu une prison, un lieu d'exil). Antinomiens, Familistes, Quakers fripons, Levellers, Diggers, Ranters furent alors lâchés dans l'ombre occulte de l'étendue sauvage et se précipitèrent pour l'embrasser.

Anne Hutchinson et ses amis n'étaient que les plus connus des Antinomiens (c'est-à-dire les plus élevés socialement) - ayant eu la mauvaise chance d'être impliqués dans la politique de la Colonie de la Baie - mais il est clair qu'il y eut une aile beaucoup plus radicale du mouvement. Les incidents relatés par Hawthorne dans The Maypole of Merry Mount sont rigoureusement historiques; apparemment les extrémistes avaient décidé d'un commun accord de renoncer au Christianisme et de se convertir au paganisme. S'ils étaient parvenus à s'unir avec leurs alliés indiens, il en aurait résulté une religion syncrétique Antinomienne/ Celtique/Algonquine, une sorte de Santeria nord-américaine du dix-septième siècle.

Sous les administrations plus lâches et plus corrompues des Caraïbes, où les intérêts des rivaux européens avaient laissé de nombreuses îles désertes ou délaissées, les sectaristes purent mieux prospérer. La Barbade et la Jamaïque en particulier ont dû être peuplées par de nombreux extrémistes, et je crois que les influences des Levellers et des Ranters ont contribué à l'«utopie» Boucanière sur l'île de la Tortue. Là, pour la première fois, grâce à Oexmelin, nous sommes en mesure d'étudier en profondeur une proto-TAZ du Nouveau Monde réussie. Fuyant les terribles «avantages» de l'Impérialisme comme l'esclavage, la servitude, le racisme et l'intolérance, les tortures du travail forcé et la mort vivante dans les plantations, les Boucaniers adoptèrent le mode de vie indien, se marièrent avec les Caribéens, acceptèrent les Noirs et les Espagnols comme égaux, rejetèrent toute nationalité, élirent leurs capitaines démocratiquement, et retournèrent à l'«état de Nature». Après s'être déclarés «en guerre avec le monde entier», ils partirent piller; leurs contrats mutuels, appelés «Articles», étaient si égalitaires que chaque membre recevait une part entière, et le capitaine pas plus d'une-un-quart ou une-et-demie. Le fouet et les punitions étaient interdits, les querelles étaient réglées par vote ou par duel d'honneur.

Il est tout simplement erroné de la part de certains historiens de stigmatiser les pirates comme de simples brigands des mers ou même des proto-capitalistes. En un sens, c'étaient des «bandits sociaux», bien que leurs communautés de base ne soient pas des sociétés paysannes traditionnelles, mais des «utopies» créées ex nihilo sur des terres inconnues, des enclaves de liberté totale occupant des espaces vides sur la carte. Après la chute de l'île de la Tortue, l'idéal boucanier resta vivant pendant tout «l'Âge d'Or» de la Piraterie (1660-1720 environ) et aboutit, par exemple, au peuplement de Belise qui avait été fondée par les Boucaniers. Puis, quand la scène se déplaça à Madagascar - une île qui n'avait pas encore été annexée par un pouvoir impérial et qui n'était gérée que par un ensemble informel de rois natifs (des chefs) désireux de s'allier aux pirates - l'Utopie Pirate atteignit sa plus haute forme.

Le récit que fait Defoe du Capitaine Misson et de la fondation de Libertalia, est peut-être - comme le disent certains historiens - un canular littéraire destiné à faire la propagande des théories radicales Whig (les libéraux anglais), mais il était imbriqué dans L'Histoire générale des plus fameux Pyrates (1724-1728), qui est en grande partie toujours considérée comme véridique et précise. En outre, l'histoire du Capitaine Misson ne fut pas critiquée à la parution du livre, alors que beaucoup d'anciens membres des équipages de Madagascar étaient encore vivants. Il semble que ceux-ci y aient cru, sans aucun doute parce qu'ils avaient connu des enclaves pirates très semblables à Libertalia. Une fois de plus, des esclaves libérés, des natifs, et même des ennemis traditionnels comme les Portugais, avaient été invités à s'unir en toute égalité. (Libérer les bateaux d'esclaves était une préoccupation majeure.) La terre était gérée en commun, les représentants élus pour de courtes durées, le butin partagé ; la doctrine de la liberté était prêchée bien plus radicalement que celle du Sens Commun.

Libertalia espéra durer, et Misson mourut en la défendant(9).Mais la plupart des utopies pirates étaient faites pour être temporaires; en fait les vraies «républiques» corsaires étaient leurs vaisseaux voguant sous la loi des Articles. Les enclaves terrestres n'avaient pas de loi du tout. Exemple classique, Nassau aux Bahamas, un village balnéaire de cabanes et de tentes, consacré au vin, aux femmes (et probablement aux garçons aussi, si l'on en juge par ce qu'écrit Birge dans Sodomie et Piraterie), aux chansons (les pirates étaient très amateurs de musique et avaient l'habitude de louer des groupes de musiciens pour des croisières entières) et aux pires excès; il disparut en l'espace d'une nuit lorsque la flotte britannique apparut dans la Baie. Barbe Noire et «Calico Jack» Rackham et sa bande de femmes-pirates partirent vers des rivages plus sauvages et de pires destins, tandis que d'autres acceptèrent le Pardon et se réformèrent. Mais la tradition des Boucaniers subsista à Madagascar, où les enfants sang-mêlés des pirates constituèrent leurs propres royaumes, et dans les Caraïbes, où les esclaves en fuite et les groupes mixtes noir/blanc/ rouge prospérèrent dans les montagnes et l'arrière-pays, sous le nom de «Maroons». Quand Zora Neale Hurston visita la Jamaïque dans les années vingt (voir son livre Dis à mon cheval), la communauté maroon avait gardé un certain degré d'autonomie et quelques vieux usages populaires. Les Maroons du Surinam quant à eux, pratiquent encore le «paganisme» africain.

Au cours du dix-huitième siècle, l'Amérique du Nord produisit également quelques «communautés tri-raciales isolées», en marge de la société. (Ce terme «clinique» fut inventé par le Mouvement Eugéniste, qui réalisa les premières études scientifiques sur ces communautés. Malheureusement ladite «science» ne fit que servir d'alibi à la haine des pauvres et des «bâtards», et la «solution au problème» fut généralement la stérilisation forcée.) Les noyaux était toujours constitués d'esclaves et de paysans en fuite, de «criminels» (c'est-à-dire les plus pauvres), de «prostituées» (c'est-à-dire les femmes blanches mariées à des non-blancs), et de membres des différentes tribus natives. Parfois, dans certains cas, comme chez les Seminoles et les Cherokees, la structure tribale traditionnelle absorba les nouveaux arrivants; en d'autres cas, de nouvelles tribus étaient constituées. Ainsi les Maroons du Grand Marais Lugubre, qui vécurent aux dix-huitième et dix-neuvième siècles, adoptaient les esclaves évadés et fonctionnaient comme des étapes sur l'Underground Railway (les circuits d'évasion des esclaves), servant de centre religieux et idéologique pour les rebelles. La religion était le HooDoo, un mélange d'éléments africains, indigènes et chrétiens, et selon l'historien H. Leaming-Bey, les aînés de la foi et les chefs Maroons du Grand Marais étaient connus comme «The Seven Finger High Glister».

Les Ramapaughs du nord du New Jersey (incorrectement connus sous le nom de «Jackson Whites») ont, eux aussi, une généalogie romantique et archétypique: esclaves libérés des soldats hollandais, clans divers du Delaware et de l'Algonquin, habituelles «prostituées», «Hessiens» (une appellation pour les mercenaires britanniques égarés, les déserteurs Loyalistes etc.), et bandes locales de bandits sociaux comme celle de Claudius Smith.

Certains groupes se réclament d'une origine africano-islamique: les Moors du Delaware et les Ben Ishmael, qui émigrèrent du Kentucky en Ohio au milieu du dix-huitième siècle. Les Ishmaels pratiquaient la polygamie, ne buvaient jamais d'alcool, gagnaient leur vie comme ménestrels, se mariaient avec des indiens et adoptaient leurs coutumes et étaient si enclins au nomadisme qu'ils mettaient des roues à leurs maisons. Leur migration annuelle passait par des villes frontières nommées Mecca ou encore Medina. Au dix-neuvième siècle certains d'entre eux épousèrent les idéaux anarchistes et furent la cible des Eugénistes lors d'un pogrom particulièrement pervers de sauvetage-par-extermination. Quelques-unes des toutes premières lois eugénistes furent passées en leur honneur. Ils «disparurent» en tant que tribu dans les années vingt, mais allèrent probablement gonfler les rangs des premières sectes «Islamistes Noires» et du «Moorish Science Temple».

J'ai moi-même grandi avec les légendes des «Kallikaks» du New Jersey Pine Barrens (et bien sûr avec Lovecraft, un raciste fanatique, fasciné par les communautés isolées). Ces légendes s'avèrent être la mémoire populaire des calomnies eugénistes; depuis leur quartier général de Vineland (New Jersey), ils ont entrepris les «réformes» habituelles contre «le mélange des gènes» et «la faiblesse d'esprit» dans les Barrens (en publiant entre autres des photographies des Kallikaks, grossièrement et visiblement retouchées sur lesquelles ils ressemblaient à des monstres dégénérés).

Les «communautés isolées» - du moins celles qui ont préservé leur identité jusqu'au vingtième siècle - refusent constamment d'être absorbées par la culture dominante ou par la «sous-culture» noire, au sein de laquelle les sociologues modernes préfèrent les ranger. Dans les années soixante-dix, inspirés par la renaissance des Natifs Américains, un certain nombre de groupes - parmi lesquels les Moors et les Ramapaughs - s'adressèrent au Bureau des Affaires Indiennes (BIA) pour être reconnus comme tribus indiennes. Ils reçurent le soutien des activistes indigènes mais se virent refuser la reconnaissance officielle. Après tout, s'ils avaient obtenu gain de cause, leur victoire aurait pu établir un précédent dangereux pour les marginaux de toutes sortes, des «Peyotistes blancs» et autres Hippies aux nationalistes noirs, ariens, anarchistes et libertaires - une «réserve» pour tout le monde et pour n'importe qui! Le «Projet Européen» ne peut pas reconnaître l'existence de l'Homme Sauvage - le chaos vert reste une trop grande menace pour le rêve impérial d'ordre.

Les Moors et les Ramapaughs rejetèrent essentiellement l'explication «diachronique» ou historique de leur origine au profit d'une identité «synchronique» fondée sur le «mythe» de l'adoption indienne. Autrement dit, ils s'auto-proclamèrent «Indiens». Si tous ceux qui veulent «être indien» pouvaient ainsi s'auto-proclamer indien, imaginez quel départ pour Croatan ce serait. Cette vieille ombre occulte hante encore les restes de nos forêts (qui, soit dit en passant, se sont largement accrues dans le Nord-Est depuis les XVIII-XIXe siècles, alors que de vastes étendues de terre cultivée sont retournées à la broussaille. Sur son lit de mort, Thoreau rêvait du retour de «...Indiens... forêts(10)» : le retour du réprimé).

Les Moors et les Ramapaughs avaient évidemment des raisons bien concrètes pour se vouloir indiens - après tout ils avaient des ancêtres indiens - mais si nous considérions leur auto-proclamation en termes aussi bien «mythiques» qu'historiques nous en apprendrions davantage sur notre quête de la TAZ. Il existe dans les sociétés tribales ce que les anthropologistes appellent le mannenbunden : en changeant de forme, en s'incarnant dans le totem animal (loups garou, chamans jaguar, hommes léopard, sorcières chat etc.), les sociétés totémiques se vouèrent à une identification avec la Nature. Dans le contexte général d'une société coloniale (comme le souligne Taussig dans Chamanisme, Colonialisme et Homme Sauvage), le pouvoir de changer de forme est partie prenante de la culture indigène - ainsi la partie la plus réprimée de la société acquiert un pouvoir paradoxal fondé sur le mythe d'un pouvoir occulte, à la fois redouté et désiré par les colonisateurs. Bien sûr les indiens ont réellement une certaine connaissance occulte; mais, parce que l'Empire perçoit cette culture indienne comme une sorte d'«état sauvage spirituel», les indiens en sont arrivés à croire de plus en plus consciemment à ce rôle. Même s'ils sont marginalisés, la Marge acquiert une aura magique. Avant l'homme blanc, ils n'étaient que de simples tribus d'individus - ils sont maintenant les «gardiens de la Nature», les habitants de l'«état de Nature». Finalement le colonisateur lui-même est séduit par ce «mythe». Chaque fois qu'un Américain veut être en marge de la société ou revenir à la terre, il «devient indien». Les démocrates radicaux du Massachusetts (descendants spirituels des Protestants radicaux) qui organisèrent la Partie de Thé et crurent réellement que les gouvernements pourraient être abolis (toute la région de Berkshire s'auto-proclama «état de Nature»!), se déguisèrent en «Mohawks». De cette façon, les colonisateurs qui se trouvèrent soudain en marge de la mère patrie, adoptèrent le rôle des indiens marginaux, cherchant ainsi (d'une certaine façon) à s'approprier leur pouvoir occulte, leur rayonnement mythique. Des Hommes des Montagnes aux Scouts, le rêve de «devenir indien» s'inscrit en filigrane dans l'histoire, la culture et la conscience américaines.

Cette hypothèse est également confortée par l'imagerie sexuelle associée aux groupes «tri-raciaux». Les «natifs» sont bien sûr toujours immoraux, mais les renégats raciaux et les marginaux sont carrément des pervers-polymorphes. Les Boucaniers étaient des sodomites, les Maroons et les Hommes des Montagnes des dégénérés, les «Jukes and Kallikaks» pratiquaient la fornication et l'inceste (entraînant des mutations telle que la polydactylie), les enfants couraient nus et se masturbaient ouvertement etc. Retourner à un «état de Nature» semble paradoxalement autoriser la pratique de tout acte «non naturel», du moins si l'on en croit les Puritains et les Eugénistes. Et comme dans les sociétés répressives racistes et moralistes beaucoup de gens désirent précisément ces actes licencieux, ils projettent leurs désirs sur les marginalisés, et se convainquent ainsi eux-mêmes qu'ils restent purs et civilisés. De fait, certaines communautés marginalisées rejettent effectivement la moralité du consensus - chez les pirates c'est certain! - et réalisent sans aucun doute les désirs refoulés de la civilisation. (Ne le feriez-vous pas?) Devenir «sauvage» est toujours un acte érotique, un acte de nudité.

Avant de quitter le thème des «tri-raciaux isolés», j'aimerais rappeler l'enthousiasme de Nietzsche pour le «mélange des races». Impressionné par la vigueur et la beauté des cultures hybrides, il proposa le mélange des gènes, non seulement comme une solution au problème de race, mais aussi comme le principe d'une nouvelle humanité, libérée du chauvinisme ethnique et national - sans doute fut-il en cela un précurseur du «nomadisme psychique». Le rêve de Nietzsche semble toujours aussi éloigné de nous qu'il le fut de lui. Le chauvinisme règne toujours. Les cultures mélangées restent submergées. Mais les zones autonomes des Boucaniers et des Maroons, des Ishmaels et des Moors, des Ramapaughs et des «Kallikaks», ou plutôt leurs histoires respectives, sont révélatrices de ce que Nietzsche aurait pu appeler la «Volonté de Puissance comme Disparition». Une idée à laquelle il nous faut revenir.

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