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1. TOUS LES RWANDAIS SONT PERDANTS
Depuis 1959, les Hutu et les Tutsi du Rwanda sont en conflit grave, nommé pudiquement « ethnisme ». Ce conflit a touché son paroxysme en 1994 par le génocide des Tutsi. Celui-ci, à son tour, a produit une fracture entre les deux groupes, fracture qui n’est réparable qu’à une condition : la conviction que personne ne gagne rien à éliminer son frère. Quand bien même on serait assez sot pour tenter une telle entreprise, la réussite parfaite est impossible. Le génocide de la minorité n’a pas réussi au complet puisque des Tutsi existent encore. Bien entendu, prétendre éliminer les Hutu, la majorité de la population, serait encore plus irréaliste. Dès lors, qu’on s’aime ou pas, les deux groupes sont condamnés à vivre ensemble sur ce territoire qui s’appelle le Rwanda et qui leur est commun.

I.1 Nos chefs furent les premiers perdants
A la question de savoir à qui ont profité nos malheurs, une première réponse est que ce ne sont pas à nos chefs d’Etat. Quel triste sort! La période coloniale qui a préparé la grande crise a emporté nos derniers rois : Musinga et son fils Rudahigwa. Ils sont morts sur une terre étrangère, par une main étrangère! Les deux premiers présidents, Kayibanda et Habyarimana, sont morts sur la terre de leurs ancêtres, mais qui leur était devenue une terre étrangère. Dans l’au-delà du Rwanda où ils sont aujourd’hui tous les quatre, ils doivent se dire : pauvres Rwandais, nous sommes tous les perdants dans cette bagarre. C’est le même ennemi qui nous dresse les uns contre les autres. Ils doivent se dire : si nos frères et nos sœurs ne sortent pas de cette folie, personne n’en sortira vivante.
I.2 Nos partis politiques ont récolté la tempête
« A semer le vent, on récolte la tempête »! C’est malheureux à y penser. Peu avant l’indépendance du Rwanda, nous fûmes secoués par l’ouragan des partis politiques dont les principaux furent : l’Unar, le Rader l’Aprosoma et le Parmehutu. Rien que ces noms, nous voyons évoquée le conflit « ethnique ». Mais, tous ces partis ont vécu. Leurs successeurs actuels doivent se garder, sous peine de subir le même sort, le virus de l’ethnisme. Qui, parmi les Rwandais, a gagné dans cette fracture de l’unité nationale ? Les fous, les génocidaires, les amis de nos ennemis ? Qu’on se le dise en regardant le visage meurtri de notre nation. Non pas que tous les partis politiques aient failli à leur, mission mais aucun n’a pu nous sauver. Nos pas que tous aient les mains tachées du sang. Toujours est-il que l’un d’entre eux, le Parmehutu et ses successeurs du Hutu-power, a semé la haine et récolté la tempête!

I.3 Nos génocidaires sont devenus les maudits de la terre

On se le demande : à qui a profité le génocide? Ceux qui voulaient le monopole du pouvoir ? Ils ne l’ont pas eu. Les cadavres du génocide n’engraissent personne. A parler cyniquement, il n’a même pas été parfait. Ceux qui voulaient en finir avec les Tutsi sont affligés de leur présence quotidienne. Bien sûr, on veut achever « ce travail », mais est-ce encore facile? Le génocide des Tutsi a provoqué par ricochet une multitude de morts parmi les Hutu. Actuellement, certains tombent sous les coups de leurs congénères qui les qualifient de traîtres. Le résultat commun est que l'unité symbolisée par le régime actuel est toujours un symbole. A quand la réalité? Allons –nous rester les damnées de la terre jusqu'à contaminer tout le contient? L'actuel anti-tutsisme congolais est le fruit de nos entrailles. Que donnera t-il? Pour sur, il donnera ailleurs ce qu'il a donné ici:même causes, mêmes effets?


II. QUI ONT BESOIN DE NOS MALHEURS?
En vérité, le malheur n'est bon pour personne. La question revient à dire: qui ont besoin de nos malheurs pour leurs intérêts égoïstes? Nous espérons le découvrir dans trois contextes de notre histoire politique, culturelle et économique.

II.1 Le problème politique: l'indépendance du Rwanda
Historiquement parlant, l'antagonisme hutu tutsi est crée par la colonisation. Dire cela n'est contre le dialogue, c'est une exigence de vérité que celui-ci suppose. Parmi les témoins de cette histoire, citons le mieux informé, le colonel Guy Logiest a exécuté avec qui fut le " Résident Spécial" du Rwanda et qui, en cette qualité une main de fer l'opération de faire du Rwanda une république hutu.
Ce Colonel a écrit un livre sous-titré: Un blanc dans la bagarre tutsi hutu (Didier Hatier, Bruxelles, 1988). Dans sa préface, son ami le Professeur Stengers nous parle de l'action de ce colonel. " Dès le 17novembre, ce pur néophyte en politique rwandaise, réunissant les administrateurs de territoire, décide d'assurer l'avenir en renversant d'un seul coup brutalement, la politique traditionnelle menée par la tutelle belge depuis les origines: à la place des chefs et sous –chefs tutsi, il décide de nommer systématiquement, en masse, de Hutu. (…) La révolution rwandaise qui va mettre à bas le pouvoir tutsi, est désormais en marche (p-1-11). (…) l'administrateur belge aide le parti hutu et les aide à gagner les élections, on met en place, sur la base de ces élections gagnées par les Hutu, un nouveau réseau de bourgmestres recrutés presque entièrement parmi les Hutu. Le colonel va jusqu'à fournir la logistique nécessaire pour le coup d'Etat hutu qui renversera le Mwami" ( p.11).
Dans cette opération de " hutuisation" du Rwanda, l'Eglise catholique a eu un rôle décisif sous la direction de Mgr André Perraudin. Voici le témoignage du colonel Logiest:
" Monseigneur Perraudin, archevêque de Kabgayi, a su imprimer à l’Eglise catholique une orientation audacieuse pour l’époque, afin de restituer au peuple hutu sa dignité d’enfant de Dieu. Ce faisant, il lui a apporté l’immense soutien d’une Eglise militante. Il l’a fait discrètement, soucieux de respecter toutes les races, mais sans hésiter à prendre la défense des faibles et des opprimés. Dans un pays profondément chrétien, cette action perspicace a revétu une importance capital" (p. 219).
« Je me rendis ensuite à l’évêché où Mgr Perraudin me reçut très aimablement. Il me fit comprendre en termes mesurés qu’il fallait réparer les injustices dont les Hutu étaient constamment les victimes et que des changements s’avéraient nécessaires dans l’organisation politique du pays » (p.50).
Revenons à la préface du professeur Stengers. « Ajoutons-y un, plus subtil mais certainement très puissant lui aussi, un élément psychologique qui se lit entre les lignes : les Hutu se déclarent les amis de la Belgique et sollicitent son intervention en leur faveur, alors que les Tutsi ne songent manifestement qu’à se débarrasser des Belges ». (p.111). En conclusion de cette préface, le professeur Stengers observe : «Ce qui frappe le lecteur, c’est que, par deux fois au moins, le colonel Logiest revient dans son livre sur les motivations qui l’ont fait agir, pour sonder en quelque sorte sa propre conscience. Citons : «Aujourd’hui, après plus de vingt-cinq ans, je m’interroge sur les motifs qui me faisaient agir avec tant de détermination. C’était sans nul doute la volonté de rendre à un peuple sa dignité. C’était peut-être tout autant le désir d’abaisser la morgue et d’exposer la duplicité d’une aristocratie foncièrement oppressive et injuste ». Le professeur termine sa préface par cette phrase qui résume tout : «…pour comprendre pourquoi il ya un Rwanda hutu, il faut comprendre le Colonel Logiest » (IV).
Pour conclure, disons que ce long témoignage valait la peine pour rappeler la vérité historique, base de tout dialogue qui déjoue les faux-fuyants. L’ordre social du Rwanda créé par la colonisation a duré plus de 30 ans des deux premières républiques. Cet ordre, s’il avait gouverné le pays dans la justice, il aurait eu une durée sempiternelle, appuyée qu’il était sur la majorité ethnique hutu. Hélas, il s’est détruit lui-même. Kayibanda a été renversé par Habyarimana. Celui-ci a imposé une dictature par un parti unique et finalement inique. Il a ainsi provoqué sa chute et celle du pouvoir hutu. La minorité tutsi et tous les démocraties hutu sont en train de rétablir, combien péniblement, l’ordre social et l’unité nationale. Cependant, la question de l’indépendance du Rwanda ne semble pas expliquer, totalement l’«anti-tutsisme» actuel. Allons plus loin dans nos investigations.
11.2 Le problème culturel : l’indépendance d’esprit du Tutsi
Pour aller tout droit au but, commençons par une citation. Mgr Phocas Nikwigiize, ancien évêque de Ruhengeri, déclarait au journal flamand De Volkskrant le 26 juin 1995 : « Le Tutsi est rusé, hypocrite et mauvais par nature ». Cette idée n’est pas une création personnelle de cet évêque. Elle fait partie d’une conception culturelle de l’occident colonial. Selon cette conception ethnologique, le Tutsi est d’une race noble, supérieure à celle des Hutu de race proche de l’animalité. Cette conception n’est rien d’autre qu’une application sur notre peuple de celle plus large de l’arianisme (arya = noble) qui suppose que certains peuples sont meilleurs que les autres. Le nazisme fut, en Europe, l’application de cette même idéologie ethnologique.
Dans le contexte colonial, un peuple colonisé auquel le pouvoir colonial n’a pas réussi à «domestiquer l’esprit», qui garde sa liberté de pensée, ce peuple-là est qualifié de réfractaire à la civilisation. Les qualificatifs affublés aux Tutsi –rusés, hypocrites, arrogants, mauvais par nature – et que nous retrouvons dans la bouche de notre évêque, répondent à cette conception de l’anthropologie occidentale. La faute du Tutsi est d’avoir un esprit d’autonomie qui ne réfléchit pas par procuration, qui ne se met à genoux devant personne, même écrasé, il reste spirituellement autonome de jugement. Il reste homme et refuse de devenir une chose. Tel est, à notre avis, une autre cause et non la moindre de l’anti-tutsisme du monde colonial occidental.
Si l’on voit les choses de notre côté, le Tutsi est le type d’homme réfractaire à tout complexe d’infériorité. Et pour la conscience de supériorité de l’homme blanc, cette rébellion psychologique et culturelle doit sans doute choquer la mentalité coloniale. Alex De Backer l’a bien compris pour dire ce qui suit :
« Il va sans dire que la caricature africaine des valeurs occidentales n’épargne pas plus les Tutsi et les Hutu que les autres Africains, mais force est de constater que les nouveaux dirigeants du Rwanda n’ont cure de plastronner affublés de pareilles verroteries. Des chefs d’Etats et d’armée comme (ceux du Rwanda d’aujourd’hui) représentent une nouvelle image du chef africain qui dérange ceux qui, en occident, se rassurent sur la nature des chefs < négres > quand ils jouent les Bokassa ou les Mobutu. Insensibles au mimétisme grossier, ces Africains montrent pourtant qu’il est possible de gouverner en Afrique en remettant les Occidentaux é leur place, ni plus ni moins, et ce n’est pas si peu, car des relations bilatérales respectueuses des uns et des autres nécessitent que l’on ait affaire à des adultes responsables et décomplexés » (ARN / RNA N° 48, p. 9).
La culture rwandaise traditionnelle a fortement développé cette indépendance d’esprit qui s’accorde si mal avec le complexe de supériorité de l’homme blanc à mentalité coloniale. C’est cette contradiction qui fait en grande partie notre problème actuel faussement attribuée aux seuls Tutsi. Des leaders africains comme Mandela, des gouvernements qui n’ont d’honoraires à payer aux devins occidentaux comme le nôtre, des pays africains qui choisissent leurs alliances utiles pour eux et en toute indépendance, voilà la philosophie d’avenir. Bon gré, mal gré, l’Occident doit encaisser cette réalité et abandonner la politique du « diviser les négres » pour continuer de les manipuler. Nous avons ainsi répondu à la question « à qui profitent nos malheurs ». Nous avons ainsi pointé du doigt également les mieux et les mobiles qui formulent les accusations contre les Tutsi du Rwanda et ceux d’ailleurs en Afrique qui gardent leur tête à égale distance entre les deux épaules.

II.3 Le problème économique : primum vivere
«D’abord vivre, philosopher après», (Si on a bien mangé), est la sagesse de tous les jours et de tout le monde. «Ihembe» (l’écuelle) disait-on ces derniers temps pour qualifier les objectifs prioritaires des partis politiques. Dans nos pays tiers-mondistes, tout problème de caractère national contient cet aspect économique. Abasangiye ubusa bitana ibisambo (ceux qui partagent peu se traitent de gloutons) dit notre sagesse populaire. Le politique cache souvent ce réalisme du «ventre» dans des tricheries moralisatrices fort élégantes. Dans le cas du Rwanda, nous allons noter trois applications typiques qui entrent dans notre présente réflexion.
II.3.1 La colonisation
A la conférence de Berlin de 1885, l’Afrique fut livrée au pillage de ses matières premières pour faire fonctionner les industries européennes. Cette main basse fut nommée politiquement un d’humanité : civiliser et évangéliser les Nègres.
II.3.2 La décolonisation
A l’heure de l’indépendance du Rwanda, le colonisateur belge a provoqué le problème ethnique pour empêcher les Rwandais de s’entendre sur la décolonisation de leur pays. Le groupe tutsi auquel appartenait la classe dirigeante l’exigeait ; la groupe hutu par contre, écarté du pouvoir par le colonisateur, subordonnait la décolonisation à l’acquisition du pouvoir indigène en collaboration avec cet oppresseur d’hier.
II.3.3. Les coups d’Etat
La république a renversé la monarchie. La première république a été renversée par la seconde. Un Hutu a limogé un autre Hutu, montrant ainsi que le problème ethnique est un artifice fallacieux. Le dernier président fut éliminé pour avoir identifié le pays avec sa propriété familiale (Akazu).

III. UN DIALOGUE LONG ET DIFFICILE
De ce qui précède, il ressort que le conflit prétendu ethnique apparaît clairement comme une stratégie coloniale appuyée par quelques Rwandais assoiffés d’un pouvoir égoïste. Les deux groupes sociaux, en tant que groupes, n’y sont pour rien et en sont victimes tous les deux. Si les Tutsi ont été tués, les Hutu, fort nombreux, l’ont été aussi. Le régionalisme a opposé les Hutu du Nord et les autres (Kiga et Nduga). Les deux premières républiques étaient hutu ; pourtant la seconde a trucidé la première. Où est l’ethnisme dans tout cela ? On fait intervenir le Tutsi pour cacher les vrais enjeux. Cette conclusion, si elle était comprise par tout le monde, constituerait une base d’un dialogue national salutaire. Hélas, nous ne sommes pas seuls dans nos problèmes.
III.1 Il y a anguille sous roche
Nos ancêtres ont averti :Arimwo gishigisha navura = le sang continuellement remué ne se coagule pas ; Urwishe ya nka ruracyayirimwo = la mort qui tué la vache est toujours là. En clair, le diviseur des Rwandais est toujours à l’œuvre. Le texte qui va être lu en donne un exemple d’une brûlante actualité. Le périodique la lettre du Continent, cité par Billet d’Afrique, N° 69, nous informe sur ce qu’elle appelle : « Paris et Tripoli, nouvelle idylle au Congo ». Le passage que nous allons lire, indique, non seulement les forces invisibles qui se battent au Congo/Kà côté de Kabila, mais également celles qui rendent long et difficile le dialogue entre Rwandais. Lisons.
«Il n’y a pas de subtile stratégique […] dans le nouveau flirt poussé entre la France et la Libye et ses effets induits dans le conflit du Congo/K. Il ne s’agit que de business […]. Les deux pays sont passés en quelques mois des relations au niveau des services secrets à une normalisation diplomatique, avec la visite cet été au Quai d’Orsay du ministre libyen des affaires étrangères. Les chambres de commerce […] multiplient de discrètes réunions bourrées à craquer de chefs d’entreprise de plus en plus affairés. Avec l’attribution en août d’un important contrat au groupe Suez-Lyonnaise des Eaux et, surtout, la visite à Tripoli de son patron Jérôme Monod, un proche du président Jacques Chirac […]. Premier effet de ces retrouvailles : le nouveau «parrainage» financier libyen des anciens poulains Tchad, Ange –Félix Patassé de Centrafrique et Ibrahim Baré Maïnassara du Niger ne connaissent plus qu’une métropole : Tripoli […].
Après avoir reçu à plusieurs repriser ces dernières semaines le Congolais Laurent-Désiré Kabila puis le Soudanais Omar El Béchir, le «Price du désert» finance aujourd’hui une vaste coalition militaire régionale […] composée du Tchad […], du Soudan qui a déjà engagé des hommes dans les combats [au Congo-K] en appui aux ex – FAR de l’ancien président Habyarimana, du Centrafrique qui a toujours laissé passer les troupes de Khartoum pour prendre à revers la rébellion soudanaise de John Garang et du Niger qui abrite à Niamey les anciens généraux mobutistes Baramoto et Nzimbi. C’est l’union sacrée». Dans cette union sacrée, nos génocidaires Interahamwe et ex-Far sont ragaillardis et espèrent ainsi reconquérir le pouvoir au Rwanda. Ce n’est donc pas le Congo de Kabila, avec ses supporte. Ce n’est donc pas le Congo de Kabila, avec ses supporters africais et europées qui nous facilitent le dialogue.
III.2 Le génocide est un fossé difficile à combler
Le génocide est un fossé psychologique énorme entre les auteurs et les victimes. Mais, qu’est-ce un génocide au sens strict ? Dans son périodique Ubutabera, N° 45 (Paris, 1998), le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) nous donne une bonne définition du génocide appliqué au cas du Rwanda.
«… la victime d’acte de génocide est choisie non pas en fonction de son identité individuelle, mais bien en raison de son appartenance nationale, ethnique, raciale ou religieuse (…). La victime de l’acte est donc un membre du groupe (…), ce qui signifie finalement que la victime du crime de génocide est le groupe lui-même et non pas seulement l’individu » (p.8) Les juristes d’Arusha sont clairs : tout le groupe tutsi est génocide. De fait, l’intention visait tous les tutsi, même si, en pratique, cela n’a pas été possible. De plus, chaque membre du groupe a subi le tort dans sa solidarité sociale avec les victimes effectives.
Faut-il dire que tous les membres du groupe hutu sont génocidaires ? Nullement. Tout homme est responsable de ses propres actes et non de ceux d’autrui. De plus, des Hutu qui ont désapprouvé le génocide et en ont même été victimes sont nombreux. Cette catégorie de Hutu non génocidaires constitue la classe tampon entre les deux groupes adverses. Elle devrait jouer un rôle décisif dans l’effort de dialogue et de réconciliation.
III.3 La punition facilite le dialogue
L’un des effets de la punition juste est de venir à bout de l’impénitence et même de l’impertinence. On a bien vu que l’application de la Peine capitale a été suivie de nombreux aveux de culpabilité dans l’espoir d’allégement des peines. A l’occasion de la première exécution publique des génocidaires, bien des réactions ont donné à penser qu’elle est injuste. Voici un avis pertinent qui l’approuve et indique son effet positif. Nous le tenons d’un spécialiste en criminologie, Arkedy d’Arian :
« De tout tempes, l’application de la peine de mort s’est trouvée justifiée par l’Eglise, dans la mesure où elle sanctionnait un crime majeur. Pour le criminel, la condamnation à la peine capitale représentait un moyen expiatoire. Pour la société, elle réalisait un double objectif : empêcher le criminel de récidiver et dissuader un certain nombre d’individus criminogènes de l’imiter.
En ce qui concerne ce dernier objectif, il est indispensable qu’une fois les recours légaux épuisés, la sentence prononcée soit exécutée dans les plus brefs délais ; cela, afin de réaliser un impact médiatique efficace sur la population et d’éliminer tant le risque d’évasion du coupable que celui de chantage de la part de son entourage. La peine de mort devrait pouvoir être prononcée, au moins, dans les cas majeurs suivants :


  1. Assassinat (c’est-à-dire meurtre prémédité) dûment établi, soit par ce qu’on appelle le flagrant délit, soit par les aveux de l’accusé corroborés par les éléments de l’enquête.




  1. Meurtres ou blessures volontaires ayant entraîné la mort, dont la victime aurait été un représentant de forces de l’ordre en activité de service.




  1. Meurtre consécutif à un viol ou en récidive, sans circonstances atténuantes.




  1. En état de guerre, tout acte de trahison dûment prouvé.

Il va de soi que ne serait condamnables à la peine de mort, ni les individus pleinement irresponsables au moment des fait, ni les mineurs d’âge de moins de 16ans.


Quant à la condamnation d’un coupable avéré à une peine incompressible de détention à perpétuité, en l’absence d’une législation prévoyant la peine de mort, elle constitue à la fois, une cruauté plus grande qu’une exécution capitale effectuée dans des conditions humaines et un blac-seing pour la perpétration par le sujet d’autres crimes, soit à l’intérieur du lieu d’emprisonnement, soit en dehors, à la suite d’une éventuelle évasion ».
Dans le sens de la maxime que « la crainte est le commencement de la sagesse », nous pensons que les verdicts et leurs effets répressifs servent la cause du dialogue. Etre reconnu justement coupable et en subir la punition découragent le dialogue en libérant la conscience du coupable de son contentieux criminel. La dette morale est payée, une certaine justice est rétablie, le pardon fait déboucher sur la paix.
III.4 Des aveux qui amorcent le dialogue
Reconnaître la faute est le premier pas vers l’entente entre le coupable et la victime. Nous aimons souligner dans le cas du conflit inter-ethnique au Rwanda trois aveux d’importance.
Le premier est celui de Jean Kambanda. Ce personnage fut le premier Ministre du Gouvernement post-Habyarimana qui a présidé à la phase finale et cruciale du génocide. L’intérêt particulier de son témoignage réside dans la double qualité de son aveu. Tout d’abord et sans ambages, il a tout avoué : le génocide et les autres crimes dont il était accusé. Il a reconnu ensuite qu’il a agi en sa qualité de Chef du gouvernement. Ce deuxième aspect coupe l’herbe des massacres de Tutsi en 1994.
Le second est celui du parti politique MDR. Participant aux conversations organisées par la présidence de la République, ce parti en est venu à faire un aveu qui ressemble à une conversion miraculeuse. Issu du MDR-Parmehutu, le MDR actuel, dans le chef de ses représentants les plus officiels, reconnaît que le mal rwandais est sorti des entrailles de son géniteur. Dans une déclaration nommée Iriburiro (non datée), il est dit :
«MDR iramagana ivangura ry’amoko ryaranze idéologie ya parmehutu yavanguye abatutsi». Nous traduisons : « MDR désapprouve la discrimination ethnique contre les Tutsi qui caractérise l’idéologie du Parmehutu ».
Ainsi donc, le parti politique du premier président du Rwanda est reconnu par ses successeurs authentiques comme la matrice du virus de la division du peuple rwandais. Le MRND-CDR ne fut qu’un avatar du Parmehutu qui a poussé le programme raciste de celui-ci jusqu’au bout : le génocide. L’aveu actuel des représentants officiels du MDR «rénové» est encourageant pour le dialogue entre Rwandais.
Le troisième aveu non moins important est celui de l’Association des Prêtres Rwandais (Aprerwa). Deux raisons fondent l’importance de cet aveu. La première est le rôle joué par les confessions religieuses et surtout l’Eglise catholique dans la détérioration des relations entre les Hutu et le Tutsi. La seconde est que la hiérarchie catholique a de notre crise. Avoir un aveu officiel des membres du clergé catholique, en tant que regroupé dans une association dûment reconnue, est un début d’un changement spectaculaire. En quoi consiste cet aveu :
L’Aprerwa affirme entres que «leur Eglise a eu un rôle certain dans l’idéologie de Nyamwinshi) a le droit de monopoliser le pouvoir». Cette voix du clergé supplée avantageusement au silence gêné de leur hiérarchie. De plus, on nous promet que dans des assises synodales des diocèses qui vont commencer, un examen sérieux et courageux va se faire sur la responsabilité de l’Eglise catholique durant le processus qui a conduit au génocide. Durant leur dernière visite « Ad limina apostolorum », Le Saint-Père a encourage les évêques du Rwanda à ne pas avoir peur : d «affronter le passé tel qu’il est».

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