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Observations géologiques sur les îles volcaniques


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SAINTE-HÉLÈNE
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Laves des séries feldspathique, basaltique et sous-marine. — Coupe de Flagstaff Hill et du Barn. — Dikes. — Baies Turk’s Cap et Prosperous. — Enceinte basaltique. — Crête centrale cratériforme avec rebord intérieur et parapet. — Cônes de phonolite. — Bancs superficiels de gres calcareux. — Coquilles terrestres éteintes. — Lits de détritus. — Soulèvement de la région. — Dénudation. — Cratères de soulèvement.



L’île tout entière est d’origine volcanique ; suivant Beatson 69, sa circonférence est d’environ 28 milles. Le centre et la plus grande partie de l’île sont constitués par des roches de nature feldspathique, généralement très décomposées, et offrant alors une remarquable succession de lits argileux tendres, alternants, rouges, pourpres, bruns, jaunes et blancs. Par suite du peu de durée de notre séjour, je n’ai pu examiner ces lits avec soin ; quelques-uns d’entre eux, spécialement ceux à nuances blanches, jaunes et brunes, constituaient originairement des coulées de lave, mais la plupart de ces lits ont probablement été éjaculés sous forme de scories et de cendres ; d’autres lits, colorés en pourpre, avec des plages à contours cristallins constituées par une substance blanche tendre, semblent avoir été autrefois des porphyres argileux compacts et résistants ; ils sont aujourd’hui onctueux au toucher, et donnent, comme la cire, une rayure luisante sous l’ongle. Les lits argileux rouges offrent généralement une structure bréchiforme, et ont été formes, sans aucun doute, par la décomposition de scories. Cependant, plusieurs coulées fort étendues, appartenant à cette série, conservent leur caractère lithoïde, elles sont soit d’une couleur vert-noirâtre avec de petits cristaux aciculaires de feldspath, soit d’une teinte très pâle ; dans ce dernier cas, elles sont formées principalement de petits cristaux de feldspath souvent écailleux, portant un grand nombre de taches noires microscopiques. Ces coulées sont généralement compactes et lamellaires ; pourtant d’autres coulées, d’une composition semblable, sont celluleuses et légèrement altérées. Aucune de ces roches ne renferme de grands cristaux de feldspath ni ne présente la cassure rugueuse caractéristique du trachyte. Ces laves et ces tufs feldspathiques recouvrent les autres roches et appartiennent donc à la dernière phase éruptive ; cependant d’innombrables dykes et de grandes masses de roches fondues y ont été postérieurement injectés. Ils convergent, en s’élevant, vers la crête curviligne centrale, dont un point atteint l’altitude de 2 700 pieds. Cette crête est la partie la plus élevée de l’île, et elle a constitué autrefois le bord septentrional d’un grand cratère, d’où se sont écoulées les laves de cette série ; la structure de ce cratère est rendue fort obscure par l’état de dégradation dans lequel il se trouve, par la disparition de sa partie méridionale et par les dislocations violentes que l’île a subies.

Série basaltique. — La côte de l’île consiste en un cercle, grossièrement dessiné, de grands remparts de basalte, noirs et stratifiés, s’inclinant vers la mer et que les flots ont transformés en falaises souvent presque perpendiculaires, dont la hauteur varie de quelques centaines de pieds à 2 000 pieds. Ce cercle, ou plutôt cette enceinte en forme de fer à cheval est ouverte du côté du sud et entamée par plusieurs autres grandes brèches. Son rebord supérieur ou sommet ne s’élevé ordinairement qu’à une faible altitude au-dessus du niveau de la contrée intérieure voisine, et les laves feldspathiques plus récentes, descendant des hauteurs centrales, viennent généralement buter contre son plan interne qu’elles recouvrent ; mais, dans la partie nord-ouest de l’île (pour autant qu’on en puisse juger de loin) les laves semblent avoir déborde cette barrière et l’avoir masquée en partie. En certains endroits où l’anneau basaltique est rompu et où cette enceinte noire est divisée en tronçons, les laves feldspathiques ont coulé entre ces derniers et surplombent aujourd’hui la côte sous forme de falaises élevées. Ces roches basaltiques ont une couleur noire et sont stratifiées en couches minces ; elles sont habituellement très celluleuses, mais parfois compactes ; quelques-unes d’entre elles renferment de nombreux cristaux de feldspath vitreux et des octaèdres de fer titanifère ; d’autres abondent en cristaux d’augite et en grains d’olivine. Les vacuoles sont fréquemment tapissées de petits cristaux (de chabasie ?), ce qui donne même parfois à la roche une structure amygdaloidale. Les coulées de lave sont séparées les unes des autres par des cendres ou par un tuf salifère friable, d’un rouge vif, offrant des lignes superposées comme celles que provoque la sédimentation et qui présente parfois une structure concrétionnée mal définie. Les roches de la série basaltique ne se montrent que près de la côte. Dans la plupart des contrées volcaniques les laves trachytiques sont plus anciennes que les laves basaltiques ; mais ici nous constatons qu’un grand amas de roches, dont la composition est très voisine de celle de la famille trachytique, a été éjaculé après les nappes basaltiques : cependant les nombreux dykes injectés dans les laves feldspathiques, et où abondent de grands cristaux d’augite, dévoilent peut-être une tendance au retour vers le mode ordinaire de superposition.

Laves sous-marines de la base. — Les laves de la série inférieure se trouvent immédiatement au-dessous des roches basaltiques et feldspathiques. Suivant M. Seale 70, on peut les observer, en divers points de la plage, sur le pourtour entier de l’île. Dans les coupes que j’ai étudiées, leur nature est fort variable ; quelques-unes des couches abondent en cristaux d’augite ; d’autres, colorées en brun, sont laminaires ou formées de galets, et plusieurs sections sont rendues fortement amygdaloides par la présence de matières calcaires. Les nappes successives sont intimement unies entre elles, ou séparées les unes des autres par des bancs de roches scoriacées ou de tuf laminaire renfermant souvent des fragments nettement arrondis. Les interstices de ces couches sont remplis de gypse et de sel ; le gypse se présente parfois aussi en lits minces. L’abondance de ces deux substances, la présence de cailloux roulés dans les tufs et l’abondance des roches amygdaloïdes me portent à croire que ces couches volcaniques inférieures sont d’éruption sous-marine. Peut-être cette remarque doit-elle être appliquée aussi à une partie des roches basaltiques surincombantes ; mais je n’ai pu trouver de preuve bien nette de ce dernier fait. Partout ou j’ai examiné les couches de la série inférieure, j’ai constate qu’elles étaient traversées par un très grand nombre de dykes.

Flagslaff Hill et le Barn. — Je décrirai maintenant quelques-unes des coupes les plus remarquables en commençant par ces deux collines qui constituent les traits les plus caractéristiques de la partie nord-est de l’île. Le profil carré et anguleux du Barn ainsi que sa couleur noire montrent au premier coup d’œil qu’il appartient à la série basaltique, tandis que la surface adoucie et la forme conique de Flagstaff Hill, et ses teintes vives et variées prouvent avec la même évidence que cette dernière colline est formée des roches feldspathiques altérées, dont il a été question au commencement du chapitre. Ces deux hautes collines sont réunies (comme on le voit dans la figure n° 8) par une crête aiguë constituée par les laves à galets de la série inférieure. Les couches de cette crête plongent vers l’ouest sous un angle qui diminue graduellement à mesure qu’on s’avance vers le Flagstaff, et l’on peut constater, quoique assez difficilement, que les couches feldspathiques supérieures de cette colline plongent uniformément vers l’W.-S.-W. près du Barn, les couches de la crête sont presque verticales, mais leur allure est masquée par d’innombrables dykes ; leur inclinaison change probablement sous cette colline et, de verticales qu’elles étaient, les couches se montrent inclinées dans un sens opposé : en effet, les couches supérieures basaltiques, qui ont environ 800 à 1 000 pieds d’épaisseur, plongent vers le nord-est sous un angle de 30 à 40 deg.

[Illustration : FIG. 8. Les lignes épaisses représentent les couches basaltiques ; les lignes fines, les couches sous-marines inférieures ; les lignes pointillées, les couches feldspathiques supérieures. Les dykes sont indiqués par des hachures transversales.]



La crête ainsi que les collines de Flagstaff et de Barn sont sillonnées de dykes, dont plusieurs conservent un parallélisme remarquable suivant une direction N.-N.-W — S.-S.-E. Les dykes sont formes principalement d’une roche a laquelle de grands cristaux d’augite donnent la structure porphyrique, d’autres dykes sont formés d’un trapp brun a grains fins. La plupart de ces dykes sont recouverts d’une couche brillante 71, épaisse de un à deux dixièmes de pouce, fusible en un émail noir, contrairement à ce qui se produit pour la rétinite véritable. Cette couche est évidemment analogue au revêtement superficiel brillant qu’on observe sur un grand nombre de coulées de lave. On peut suivre souvent les dykes sur de grandes surfaces, tant dans le sens horizontal que dans le sens vertical, et ils paraissent conserver une épaisseur à peu près toujours uniforme 72. M. Seale rapporte qu’un dyke situé près du Barn ne décroît en largeur que de 4 pouces seulement sur toute sa hauteur, qui est de 1 260 pieds, — de 9 pieds à la base elle se réduit à 8 pieds 8 pouces au sommet. Dans cette crête la direction suivie par les dykes paraît avoir été surtout déterminée par l’alternance de couches tendres et dures ; souvent ils sont intimement associés aux couches les plus dures, et restent parallèles sur des longueurs si considérables que fréquemment il devient impossible de distinguer les bancs qui sont de vrais dykes, des nappes de lave. Quoique les dykes soient si nombreux sur cette crête, ils sont plus nombreux encore dans les vallées voisines situées au sud, à tel point que je n’en ai vu nulle part un aussi grand nombre. Dans ces vallées ils ont une orientation moins régulière et couvrent le sol d’un réseau semblable à une toile d’araignée ; en certains points la surface du sol paraît même exclusivement constituée par des dykes entrelacés.

Cette disposition complexe des dykes, la forte inclinaison et l’anticlinal des couches de la série inférieure recouvertes aux extrémités opposées de cette crête par deux grandes masses rocheuses, d’âge et de composition différents, devaient, à mon avis, conduire presque infailliblement à une fausse interprétation de cette coupe. On a même suppose que la région qui nous occupe avait fait partie d’un cratère, mais cette opinion s’écarte tellement de la vérité que le sommet de Flagstaff Hill a constitué autrefois l’extrémité inférieure d’une nappe de lave et de cendres éjaculées par la crête cratériforme centrale. A en juger par la pente des coulées contemporaines dans une partie voisine et non bouleversée de l’île, les couches de Flagstaff Hill doivent avoir été soulevées de 1 200 pieds au moins, et probablement d’une quantité beaucoup plus considérable encore, car les grands dykes tronqués qu’on observe au sommet de la colline démontrent qu’elle a été fortement dénudée. Le sommet de Flagstaff Hill atteint à peu près la même hauteur que la crête cratériforme, et, avant d’avoir subi une dénudation, il était probablement plus élevé que cette crête, dont il est séparé par une région fort étendue et beaucoup plus basse ; par conséquent, nous constatons ici que l’extrémité inférieure d’un système de coulées de lave a été redressée de manière à atteindre une altitude égale ou même peut-être supérieure à celle du cratère sur les flancs duquel elles ont coulé originairement. Je crois que les dislocations de cette amplitude sont extrêmement rares 73 dans les régions volcaniques. La formation de dykes aussi nombreux dans cette partie de l’île prouve que la surface de la région doit avoir subi une dislocation tout à fait extraordinaire. Sur la crête entre les collines de Flagstaff et de Barn cette dislocation ou extension s’est probablement produite après le redressement des couches, ou a peut-être suivi immédiatement ce phénomène, car, si les couches avaient été alors horizontales, elles auraient fort probablement été fissurées et injectées dans le sens transversal et non suivant le plan de stratification. Quoique la contrée qui s’étend entre le Barn et Flagstaff Hill présente une ligne anticlinale bien nette dirigée du nord au sud, et quoique la plupart des dykes suivent cette même ligne avec beaucoup de régularité, les couches occupent cependant leur position primitive à un mille seulement au sud de la crête. Cela démontre que la force perturbatrice a exercé son action plutôt sur un point isolé que suivant une ligne. Son mode d’activité se trouve probablement expliqué par la structure du Little Stony-top, montagne de 2 000 pieds de hauteur, située à quelques milles au sud du Barn ; nous distinguons là, même de loin, une sorte de coin aigu, forme d’une roche colonnaire compacte, de couleur sombre, et les couches feldspathiques aux teintes brillantes descendant sur ses deux flancs, à partir de son sommet dénudé. Ce coin, qui a fait donner à la montagne le nom de Stony-top, consiste en une masse rocheuse injectée à l’état liquide dans les couches surincombantes ; et si nous supposons qu’une masse rocheuse semblable a été injectée sous la crête reliant le Barn et Flagstaff Hill, on pourrait expliquer ainsi la structure de cette région.

Baies Turks’ Cap et Prosperous. — Prosperous Hill est une grande montagne noire et escarpée, située à 2 milles et demi au sud du Barn, et constituée de couches basaltiques comme cette dernière colline. Ces couches reposent d’un côté sur les bancs porphyriques bruns de la série inférieure, et d’un autre côté sur une masse fissurée d’une roche fortement scoriacée et amygdaloïde, qui paraît avoir constitué un centre d’éruption sous-marine peu étendu et contemporain de la série inférieure. Prosperous Hill est traverse, comme le Barn, par un grand nombre de dykes, dont la plupart courent du nord au sud, et ses couches plongent obliquement, peut-on dire, de l’île vers la mer, sous un angle d’environ 20 deg. Comme on le voit dans la figure n° 9, l’espace compris entre Prosperous Hill et le Barn est occupé par des falaises élevées, formées de laves de la série supérieure ou feldspathique, reposant en stratification discordante sur les strates sous-marines inférieures, comme nous avons vu qu’elles le font à Flagstaff Hill. Néanmoins, à l’opposé de ce qui se présente sur cette dernière colline, les couches supérieures sont presque horizontales et s’élèvent doucement vers l’intérieur de l’île. En outre, ces couches sont composées de laves compactes, noir-verdâtre, ou plus communément brun pâle, au lieu d’être constituées par des matériaux devenus tendres, et colorés de teintes vives. Ces laves compactes brunes sont formées presque entièrement de feldspath en petits éclats luisants ou en petits cristaux aciculaires très rapprochés les uns des autres et associés a de nombreuses petites taches noires qui sont probablement de la hornblende. Les strates basaltiques de Prosperous Hill ne s’élèvent qu’à une faible hauteur au-dessus du niveau des coulées feldspathiques doucement inclinées qui viennent buter contre leurs bords redressés et les entourent. L’inclinaison des couches basaltiques paraît trop prononcée pour être due au fait qu’elles auraient coulé sur une pente, et elles doivent avoir été amenées à leur position actuelle par un redressement survenu avant l’éruption des coulées feldspathiques.

[Illustration : FIG. 9. — Les lignes doubles représentent les couches basaltiques ; les lignes simples, les couches sous-marines inférieures ; les lignes pointillées, les couches feldspathiques supérieures.]



Enceinte basaltique. — En faisant le tour de l’île, on observe qu’au sud de Prosperous Hill les laves de la série supérieure forment des falaises très élevées surplombant la mer. Le cap désigne sous le nom de Great Stony-top, et qu’on rencontre ensuite, est composé, je crois, de basalte ainsi que le promontoire appelé Long Range Point, auquel aboutissent, du côté de la terre, les couches colorées. Sur la côte sud de l’île nous voyons les strates basaltiques de South Barn plonger obliquement vers la mer sous un angle très prononcé ; ce cap dépasse légèrement aussi le niveau des laves feldspathiques plus modernes. Plus loin encore, la côte a été fortement dénudée sur une grande longueur, de chaque cote de Sandy Bay, et il ne semble plus être reste en cet endroit que les débris de la base du grand cratère central. Les couches basaltiques reparaissent avec leur inclinaison vers la mer, au pied de la colline appelée Man-and-Horse ; et elles se poursuivent sur toute la longueur de la côte nord-ouest, depuis ce point jusqu’à Sugar-Loaf Hill, qui est situe près du Flagstaff. Ces coulées offrent partout la même inclinaison vers la mer, et elles reposent, en certains points au moins, sur les laves de la série inférieure. Nous voyons ainsi que la circonférence de l’île est formée par une enceinte de basalte fortement ébréchée, ou plutôt par des masses de basalte disposées en forme de fer à cheval ouvert vers le sud et coupe par plusieurs larges brèches du côté de l’est. La largeur de cette frange marginale paraît varier de 1 mille à 1 mille et demi du côté nord-ouest, qui est le seul où elle soit parfaitement complète. Les couches basaltiques et celles de la série inférieure, qu’elles recouvrent, sont faiblement inclinées vers la mer aux endroits ou leur allure primitive n’a pas été modifiée. La dégradation plus prononcée de l’anneau basaltique autour de la moitié orientale de l’île qu’autour de sa moitié occidentale, est due évidemment à ce que la puissance érosive des vagues est beaucoup plus considérable sur la côte orientale, exposée au vent, que sur la côte placée sous le vent, c’est ce que prouve du reste la hauteur plus forte des falaises sur la première de ces côtes. On ne saurait affirmer si les brèches ont été ouvertes dans la bordure de basalte avant ou après l’éruption des laves de la série supérieure ; mais, comme certaines parties détachées de l’enceinte basaltique paraissent avoir été redressées avant que ce phénomène se fut produit, et pour d’autres raison encore, il est fort probable que tout au moins un certain nombre des brèches sont antérieures à l’éruption. Si on reconstitue hypothétiquement cette enceinte circulaire de basalte, l’espace interne, ou la cavité, qui a été comblée ultérieurement par les matières éjaculées par le grand cratère central, paraît avoir présenté une forme ovale, longue de 8 a 9 milles sur 4 milles environ de largeur, et dont l’axe était dirigé suivant une ligne N.-E.-S.-W. coïncidant avec le grand axe actuel de l’île.

Crète centrale courbe. — Cette crête est formée, comme nous l’avons dit plus haut, de laves feldspathiques grises et de tufs argileux rouges, bréchiformes, semblables aux couches de la série supérieure colorées de teintes vives. Les laves grises renferment un grand nombre de petits points noirs, facilement fusibles, et quelques rares cristaux de feldspath de grande dimension. Elles sont généralement devenues fort tendres. Sauf ce caractère et la propriété d’être très vésiculaires en beaucoup d’endroits, elles sont entièrement semblables aux grandes nappes de lave qui surplombent la côte à Prosperous Bay. A en juger d’après les traces de dénudation, il s’est écoulé de longs intervalles de temps entre la formation des bancs successifs dont la crête est constituée. Sur le versant escarpé du nord j’ai observé dans plusieurs coupes une surface ondulée de tuf rouge fortement érodée, et recouverte de laves feldspathiques grises décomposées, sans autre interposition qu’une mince couche terreuse. En un point voisin j’ai remarqué un dyke de trapp, large de 4 pieds, arasé et recouvert par la lave feldspathique comme le représente la figure. La crête se termine vers l’est en un crochet, qui n’est représenté avec une netteté suffisante sur aucune des cartes que j’ai vues. Vers son extrémité occidentale elle s’abaisse graduellement et se divise en plusieurs crêtes secondaires. La partie la mieux définie de la crête, entre Diana’s Peak et Nest Lodge, sert de base à des pics dont la hauteur varie de 2 000 a 2 700 pieds, et qui sont les plus élevés de toute l’île ; elle mesure un peu moins de 3 milles de longueur en ligne droite. Sur tout cet espace la crête offre un aspect et une structure uniformes ; sa courbure rappelle la ligne de cote d’une grande baie, et elle est formée de plusieurs lignes courbes plus petites, dont la concavité est toujours ouverte vers le sud. Son versant septentrional et externe est renforcé par des crêtes étroites en arc-boutant qui s’abaissent vers la plaine environnante. Le côté interne est beaucoup plus escarpé et s’élève presque à pic ; il est constitué par la tranche des couches qui s’inclinent doucement vers l’intérieur. Le long de certaines parties du versant interne, et près du sommet, s’étend une corniche unie ou rebord, dont le contour suit les courbes secondaires de la crête. Des rebords de ce genre ne sont pas rares dans les cratères volcaniques, et leur formation semble due à l’affaissement d’une nappe horizontale de lave durcie, dont les bords restent adhérer aux parois du cratère 74 (comme la glace aux bords d’un étang dont l’eau s’est retirée).

[Illustration : FIG. 10. — Dike. 1. Lave feldspathique grise. — 2. Couche d’une matière terreuse rougeâtre épaisse d’un pouce. — 3. Tuf argileux rouge bréchiforme.]

En certains endroits, la crête est surmontée d’un parapet dont les deux faces sont verticales. Près de Diana’s Peak, ce mur est extrêmement étroit. J’ai observé à l’archipel des Galapagos des parapets dont la structure et l’aspect sont identiques à ceux des murs que nous venons de citer, et qui surmontent plusieurs des cratères ; l’un d’eux, que j’ai plus particulièrement étudié, était composé de scories rouges, luisantes, fortement cimentées ; comme il était vertical du côté externe et qu’il s’étendait sur la circonférence du cratère presque tout entière, il le rendait à peu près inaccessible. Suivant de Humboldt, le Pic de Ténérife et le Cotopaxi ont une structure analogue 75 ; il dit « qu’à leur sommet un mur circulaire entoure le cratère ; vu de loin ce mur offre l’aspect d’un petit cylindre posé sur un cône tronqué. Pour le Cotopaxi 76 cette structure spéciale est visible à l’œil nu d’une distance de plus de 2 000 toises, et personne n’a jamais atteint son cratère. Sur le Pic de Ténérife le parapet est si élevé qu’il serait impossible d’atteindre la Caldera, si une crevasse ne s’ouvrait pas sur le côté oriental ». L’origine de ces parapets circulaires est probablement due à la chaleur des vapeurs dégagées du cratère qui en pénètrent et en durcissent les parois sur une profondeur à peu près uniforme ; et plus tard les actions atmosphériques attaquent lentement la montagne sans entamer la partie durcie ; celle-ci se montre alors sous forme de cylindre ou de parapet circulaire.

En tenant compte des particularités de structure que nous venons de signaler dans la crête centrale : la convergence des couches de la série supérieure vers cette crête, l’état fortement vésiculaire que les laves y prennent, la corniche unie qui s’étend le long de son flanc concave et vertical, comme celle qu’on observe dans l’intérieur de certains volcans encore actifs, le mur en forme de parapet qui couronne son sommet, et enfin sa courbure spéciale qui se distingue de tous les profils habituels aux soulèvements, tous ces faits me prouvent que cette crête recourbée n’est autre chose que le dernier vestige d’un grand cratère. Cependant, quand on cherche à retrouver le contour primitif de ce cratère, on est bien vite désorienté ; son extrémité occidentale s’abaisse graduellement, et s’étend vers la côte en se divisant en d’autres crêtes ; l’extrémité orientale est plus fortement courbée, mais elle est à peine mieux définie. Quelques particularités me font supposer que le mur méridional du cratère rencontrait la crête actuelle près de Nest Lodge ; s’il en est ainsi, le cratère doit avoir à peu près 3 milles de longueur sur 1 mille et demi de largeur environ. Nous aurions cherche vainement à reconnaître la véritable nature de la crête, si la dénudation qu’elle a subie et la décomposition des roches dont elle est formée avaient été un peu plus avancées qu’elles ne le sont, et si la crête avait été coupée par de grands dykes et par des masses considérables de matières injectées, comme l’ont été plusieurs autres parties de l’île. Même dans l’état actuel des choses, nous avons vu qu’a Flagstaff Hill l’extrémité inférieure d’une nappe de matière éruptive a été soulevée à une hauteur égale et probablement même supérieure à celle du cratère dont elle s’est écoulée. Il est intéressant de suivre ainsi les degrés par lesquels passe la structure d’une région volcanique en s’obscurcissant peu à peu pour finir par s’effacer. L’île de Sainte-Hélène se rapproche tellement de cette dernière phase que jusqu’ici personne, je crois, n’a suppose que la crête centrale ou l’axe de l’île fut la dernière épave du cratère dont les coulées volcaniques les plus récentes ont été éjaculées.

Le grand espace vide, où la vallée, qui existe au sud de la crête centrale curviligne, et sur laquelle s’étendait autrefois la moitié du cratère, est formée de monticules et de crêtes dénudés et érodés, constitués par des roches rouges, jaunes et brunes, mêlées en une confusion chaotique, entrelacées de dykes, et sans aucune stratification régulière. La partie principale consiste en scories rouges en voie de décomposition, associées à des tufs de diverses variétés et à des lits argileux jaunâtres pleins de cristaux brisés, parmi lesquels ceux d’augite sont d’une grandeur remarquable. Ca et la surgissent des masses de lave très vésiculaires et très amygdaloides. Sur l’une des crêtes, au milieu de la vallée, se dresse brusquement une colline conique très escarpée, désignée sous le nom de Lot. C’est un trait saillant et singulier du paysage. Cette colline est formée de phonolite, dont une partie est en grands feuillets courbes, une autre partie est constituée de boules concrétionnées plus ou moins anguleuses, et la troisième consiste en colonnes disposées en rayons divergents. De sa base divergent, en s’inclinant dans toutes les directions, des couches de lave, de tuf et de scories 77 ; la partie du cône qui émerge au-dessus de ces couches est haute de 197 pieds 78 et sa section horizontale est ovale. Le phonolite est gris verdâtre et plein de petits cristaux aciculaires de feldspath ; il offre, dans la plupart des cas, une cassure conchoïdale, il est sonore et il est criblé de petites cavités. Au S.-W. de Lot, on observe plusieurs autres pics colonnaires fort remarquables, mais de forme moins régulière, notamment Lot’s Wife, et les Asses’ Ears, constitués d’une roche analogue. Leur forme aplatie et leur position relative démontrent clairement qu’ils se trouvent sur la même ligne de fissure. Il est intéressant de remarquer, en outre, que, si on prolongeait la ligne N.-E.-S.-W., joignant Lot et Lot’s Wife, elle couperait Flagstaff Hill, qui est sillonné de nombreux dykes courant dans cette même direction, comme nous l’avons dit plus haut, et dont la structure bouleversée rend vraisemblable qu’une grande masse de roche autrefois liquide se trouve injectée sous cette colline.

Dans la même grande vallée on rencontre plusieurs autres masses coniques de roches injectées (j’ai observé que l’une d’entre elles était formée de greenstone compact), dont quelques-unes ne semblent avoir aucune relation avec la direction suivie par un dyke, tandis que d’autres sont évidemment reliées par une de ces lignes. Trois ou quatre grandes lignes de dykes s’étendent au travers de la vallée suivant une direction N.-E.-S.-W., parallèle à celle qui joint les Asses’ Ears et Lot’s Wife, et probablement Lot. Le grand nombre de ces masses de roches injectées est un trait remarquable de la géologie de Sainte-Hélène. Outre celles que nous venons de citer, et la masse hypothétique qui s’étendrait sous Flagstaff Hill, mentionnons encore la masse qui forme Little-Stony-Top, et comme j’ai lieu de le croire, d’autres masses encore au Man-and-Horse et à High-Hill. La plupart de ces masses, sinon toutes, ont été injectées postérieurement aux dernières éruptions volcaniques du cratère central. La formation, sur des lignes de fissure, de saillies rocheuses coniques, dont les parois sont le plus souvent parallèles, peut être vraisemblablement attribuée a des inégalités de tension, provoquant la formation de petites fissures transversales ; les bords des couches cèdent naturellement en ces points d’intersection, et sont facilement redressés. Je dois faire observer, enfin, que partout les éminencés de phonolite ont une tendance 79 à prendre des formes singulières et même grotesques, comme celle de Lot ; le pic de Fernando Noronha en offre un exemple ; pourtant à San Thiago, les cônes de phonolite, quoique aigus, ont une forme régulière. En supposant, comme cela paraît probable, que tous les monticules ou obélisques de ce genre ont été originairement injectés à l’état liquide dans un moule forme par des couches qui ont cédé sous la pression des masses injectées, comme le fait s’est produit certainement pour Lot, on peut se demander d’où proviennent leurs formes si souvent escarpées et étranges en comparaison de celles des masses de greenstone et de basalte qui partagent avec les premières le même mode de formation. Ces formes seraient-elles dues à une fluidité moins parfaite que l’on considère généralement comme caractéristique des laves trachytiques voisines des phonolites ?



Dépôts superficiels. — On rencontre, tant sur la côte septentrionale de l’île que sur sa côte méridionale, un grés calcarifère tendre, en bancs superficiels fort étendus quoique peu épais. Il consiste en très petits fragments roules de coquilles et d’autres organismes d’une dimension uniforme, qui conservent en partie leurs couleurs jaune, brune et rose, et offrent parfois, mais très rarement, des traces vagues de leur forme externe primitive. Je me suis vainement efforcé de trouver un fragment de coquille qui ne fut pas roulé. La couleur des fragments est le caractère le plus net qui fasse reconnaître leur origine ; l’action d’une chaleur modérée altère ces nuances et provoque le dégagement d’une odeur ; ce sont donc des caractères identiques à ceux que présentent des coquilles fraîches. Ces fragments sont cimentés entre eux et sont mélangés d’une matière terreuse : d’après Beatson, les masses les plus pures contiennent 70 p. 100 de carbonate de chaux. Les bancs, dont l’épaisseur varie de 2 ou 3 pieds à 15 pieds, recouvrent la surface du sol ; on les rencontre généralement sur celui des flancs de la vallée qui est protégé contre l’action du vent, et ils se trouvent à la hauteur de plusieurs centaines de pieds au-dessus du niveau de la mer. Leur position correspond à celle que le sable prendrait aujourd’hui sous l’action du vent alizé ; et sans aucun doute ils ont été formés de cette manière, ce qui explique l’uniformité et la finesse des particules, ainsi que l’absence complète de coquilles entières ou même de fragments de dimension moyenne. C’est un fait remarquable que sur aucun point de la côte il n’existe aujourd’hui de bancs coquillers d’où la poussière calcaire aurait pu être enlevée et triée. Nous devons donc remonter à une période plus ancienne, antérieure aux bouleversements qui ont produit les grandes falaises actuelles, et durant laquelle une côte en pente douce, comme celle de l’Ascension, se prêtait à l’accumulation des débris de coquilles. Quelques-uns des bancs de ce calcaire se trouvent à l’altitude de 6 à 700 pieds au-dessus de la mer ; mais cette altitude peut être due, en partie, à un soulèvement du sol postérieur à l’accumulation du sable calcaire.

L’infiltration de l’eau des pluies a consolidé certaines parties de ces bancs, les a transformés en une roche compacte, et a provoqué la formation de calcaires stalagmitiques brun fonce. A la carrière de Sugar-Loaf, des fragments de roches ont été recouverts, sur les pentes adjacentes 80, par des couches minces superposées de matière calcaire formant un revêtement épais. Un fait curieux, c’est qu’un grand nombre de ces cailloux sont recouverts sur toute leur surface, sans qu’aucun point indiquant leur contact avec une autre roche ait été laisse à nu ; ces cailloux doivent donc avoir été soulevés par l’action du dépôt très lent qui s’opérait et les recouvrait de couches successives de carbonate de chaux. Des masses d’une roche blanche, finement oolitique, sont fixées à la surface externe d’un certain nombre de ces cailloux. Von Buch a décrit un calcaire compact de Lanzarote qui ressemble parfaitement au dépôt stalagmitique dont il s’agit ; cet enduit recouvre des cailloux, et en certains endroits il est finement oolitique. Ce calcaire forme une couche très étendue dont l’épaisseur varie d’un pouce à 2 ou 3 pieds, et on le rencontre a la hauteur de 800 pieds au-dessus de la mer, mais uniquement sur celle des côtes de l’île qui est exposée aux vents violents du nord-ouest. Von Buch fait observer 81 qu’on ne le rencontre pas dans les cavités du sol, mais uniquement sur les flancs continus et inclinés de la montagne. Il croit que ce calcaire a été déposé par les embruns que ces vents violents portent au-dessus de l’île tout entière. Il me paraît cependant beaucoup plus vraisemblable que cette roche a été formée, comme à Sainte-Hélène, par l’infiltration de l’eau dans des amas de coquilles finement concassées ; car lorsque le sable est transporté par le vent sur une côte très exposée, il tend toujours à s’accumuler sur des surfaces larges et unies offrant aux vents une résistance uniforme. En outre, à l’île voisine de Fuerteventura 82, il existe un calcaire terreux qui, d’après von Buch, est entièrement semblable aux spécimens provenant de Sainte-Hélène qu’il a vus, et qu’il croit formés par le transport de débris de coquilles sous l’action du vent.



Dans la carrière de Sugar-Loaf Hill, dont j’ai parlé plus haut, les bancs supérieurs de calcaire sont plus tendres, moins purs, et ont le grain plus fin que les bancs inférieurs. Les coquilles terrestres y abondent et quelques-unes sont intactes ; ces bancs renferment aussi des ossements d’oiseaux et de grands œufs 83 qui proviennent, selon toute probabilité, d’oiseaux aquatiques. Il est vraisemblable que ces couches supérieures sont restées longtemps à l’état meuble, et que c’est durant cette période que les produits terrestres y ont été renfermés. M. G.-R. Sowerby a bien voulu examiner trois espèces de coquilles terrestres, provenant de ces bancs, que je lui ai remises. La description qu’il en a faite se trouve à l’Appendice. L’une de ces coquilles est une Succinée, identique à une espèce actuellement vivante et qui abonde dans l’île ; les deux autres, notamment Cochlogena fossilis et Helix biplicata, ne sont pas connues comme organismes actuels ; la dernière de ces espèces a été trouvée aussi dans une autre localité fort différente, où elle est associée à une espèce incontestablement éteinte du genre Cochlogena.

Lits de coquilles terrestres éteintes. — En diverses parties de l’île, on trouve, enfouies dans la terre, des coquilles terrestres qui paraissent appartenir toutes à des espèces éteintes. La plupart d’entre elles ont été trouvées sur Flagstaff-Hill, à une altitude considérable. Sur le versant nord-ouest de cette colline, un ravin creusé par la pluie a mis à découvert une coupe d’environ 20 pieds de puissance, dont la partie supérieure consiste en terre végétale noire, évidemment amenée des parties plus élevées de la colline par l’eau des pluies, et la partie inférieure en terre moins noire, ou abondent des coquilles jeunes et vieilles entières ou brisées. Cette terre est faiblement consolidée en certains points par une matière calcareuse provenant probablement de la décomposition partielle d’une certaine quantité des coquilles. M. Seale, l’intelligent résident de Sainte-Hélène, qui a, le premier, appelé l’attention sur ces coquilles, m’en a donné une collection nombreuse provenant d’une autre localité, ou elles semblent avoir été enfouies dans une terre fort noire. M. G.-R. Sowerby a étudié ces coquilles et les a décrites dans l’Appendice. Il y en a sept espèces, notamment une Cochlogena, deux espèces du genre Cochlicopa, et quatre du genre Helix ; aucune de ces espèces n’est connue comme vivante et n’a été trouvée ailleurs que là. De petites espèces ont été retirées de l’intérieur des grandes coquilles de Cochlogena auris-vulpina. Cette dernière espèce est fort singulière à divers égards. Lamarck lui-même l’a classée dans un genre marin, elle a été prise ainsi erronément pour une coquille marine, et les espèces plus petites qui l’accompagnent ayant passé inaperçues, on a mesuré l’altitude des endroits exactement déterminés où elle a été trouvée, et on a conclu ainsi au soulèvement de l’île ! Il est bien remarquable que toutes les coquilles de cette espèce que j’ai trouvées en un même endroit forment, d’après M. Sowerby, une variété distincte de celle à laquelle appartiennent les coquilles provenant d’une autre localité et recueillies par M. Seale. Comme cette Cochlogena est une coquille grande et bien visible, j’ai soigneusement interrogé plusieurs habitants fort intelligents, sur le point de savoir s’ils avaient jamais vu cet animal à l’état vivant ; ils m’ont tous affirmé que non, et même ils ne voulaient pas croire que ce fut un organisme terrestre ; en outre, M. Seale, qui a collectionné des coquilles à Sainte-Hélène pendant toute sa vie, ne l’a jamais rencontrée à l’état vivant. Peut-être découvrira-t-on que quelques-unes des espèces les plus petites sont encore vivantes ; mais, d’un autre côté, les deux mollusques terrestres vivant actuellement en abondance dans l’île n’ont jamais été trouvés, que je sache, associés dans les roches avec les espèces éteintes. J’ai montré dans mon journal 84 que l’extinction de ces mollusques terrestres pourrait n’être pas fort ancienne, car un grand changement s’est produit dans l’île il y a environ cent vingt ans ; à cette époque, les vieux arbres moururent, et ils ne furent pas remplacés parce que les jeunes arbres étaient détruits au fur et à mesure de leur naissance par les chèvres et les porcs, qui vivaient dans l’île en grand nombre et à l’état de liberté depuis 1502. M. Seale affirme que sur Flagstaff-Hill, où les coquilles enfouies sont surtout abondantes, comme nous l’avons vu, on peut observer partout des traces qui démontrent clairement que cette colline a été couverte autrefois d’une épaisse forêt ; aujourd’hui, il n’y croit pas même un buisson. La couche épaisse de terre végétale noire, qui recouvre le banc coquillier sur les flancs de cette colline, a été probablement amenée du sommet par les eaux dès que les arbres périrent et que l’abri qu’ils offraient disparût.

Soulèvement de l’île. — Après avoir constaté que les laves de la série inférieure, dont l’origine est sous-marine, ont été élevées au-dessus du niveau de la mer et atteignent en certains endroits une altitude de plusieurs centaines de pieds, je me suis efforcé de retrouver des signes superficiels du soulèvement de l’île. Le fond d’un certain nombre des gorges qui descendent vers la côte est comble, sur une hauteur de 100 pieds environ, par des couches mal définies de sable, d’argile limoneuse et de masses fragmentaires. M. Seale a trouvé dans ces couches les os de l’Oiseau du Tropique et de l’Albatros ; aujourd’hui le premier de ces oiseaux visite rarement l’île, et le second n’y vient jamais. La différence qui existe entre ces couches et les amas inclinés de débris qui les recouvrent me fait supposer qu’elles ont été déposées dans les gorges lorsque celles-ci se trouvaient au-dessous du niveau de la mer. En outre, M. Seale a montre que quelques-unes des gorges en forme de fissure 85 s’élargissent légèrement du sommet vers la base en offrant une section concave, et cette forme spéciale est due probablement à l’action érosive que la mer exerçait lorsqu’elle pénétrait dans la partie inférieure des gorges. A des altitudes plus considérables on n’a pas de preuves aussi évidentes du soulèvement de cette île ; néanmoins, dans une dépression en forme de baie que présente le plateau s’étendant derrière Prosperous Bay, à l’altitude d’environ 1 000 pieds, on voit des masses rocheuses à sommet plat, dont on ne saurait concevoir la séparation d’avec les couches voisines semblables qu’en admettant qu’elles ont été exposées à l’érosion marine sur une plage. Il serait certainement bien difficile d’expliquer d’une autre manière un grand nombre de dénudations qui ont été produites à de grandes altitudes ; ainsi, par exemple, le sommet aplati de la colline de Barn, dont l’altitude est de 2 000 pieds, présente, suivant M. Seale, un véritable réseau de dykes tronqués ; sur des collines formées, comme le Flagstaff, d’une roche tendre nous pouvons supposer que les dykes ont été érodés et abattus par les agents atmosphériques, mais nous pouvons difficilement supposer que cela soit possible pour les couches basaltiques résistantes du Barn.

Dénudation de la côte. — Les énormes falaises, hautes, en certains endroits, de 1 000 à 2 000 pieds, dont cette île, semblable à une prison, est entourée de toutes parts, sauf en quelques points ou d’étroites vallées descendent vers la côte, forment le trait le plus saillant du paysage. Nous avons vu que des segments de l’enceinte basaltique, longs de 2 à 3 milles sur 1 ou 2 milles de largeur et 1 000 à 2 000 pieds de hauteur, ont été complètement rasés. En outre, des récifs et des bancs de rochers s’élèvent dans la mer en des endroits où elle présente de grandes profondeurs, à 3 ou 4 milles de la côte actuelle. D’après M. Seale, on peut les suivre jusqu’au rivage et constater ainsi qu’ils forment le prolongement de certains grands dykes bien déterminés. La formation de ces rochers est due évidemment à l’action des vagues de l’Ocean Atlantique, et il est intéressant de constater que les rochers situés sous le vent de l’île, du côté qui est partiellement protégé et qui s’étend de Sugar-Loaf Hill à South-West Point, présentent une hauteur moindre, quoique encore considérable, correspondant à une situation mieux abritée. Quand on songe à l’altitude relativement faible que présentent les côtes d’un grand nombre d’îles volcaniques, exposées comme Sainte-Hélène à l’action de la pleine mer, et dont l’origine semble remonter à une haute antiquité, l’esprit recule à l’idée d’évaluer le nombre de siècles nécessaires pour réduire en limon et disperser l’énorme volume de roches dures qui a été arraché au littoral de cette île. L’état de la surface de Sainte-Hélène offre un contraste frappant avec celle de l’île la plus voisine, l’Ascension. A l’Ascension les coulées de lave présentent une surface brillante, comme si elles venaient d’être éjaculées ; leurs limites sont bien définies, et souvent on peut les suivre jusqu’aux cratères encore intacts qui les ont émises. Pendant mes nombreuses et longues promenades je n’ai pas observe un seul dyke ; et sur la circonférence presque entière de l’île la côte est basse et a été rongée au point de ne plus former qu’un petit mur dont la hauteur varie de 10 a 40 pieds (il ne faut pourtant pas attacher à ce fait une importance trop considérable, car l’île a pu s’affaisser). Cependant depuis trois cent quarante ans que l’île de l’Ascension est connue, on n’y a pas signalé le moindre symptôme d’action volcanique 86. D’autre part, à Sainte-Hélène on ne saurait suivre le cours d’aucune coulée de lave, en se guidant soit par l’état de ses limites, soit par celui de la surface ; il n’y reste que l’épave d’un grand cratère. Des dykes ruines sillonnent non seulement les vallées, mais même la surface de quelques-unes des collines les plus élevées ; et, en plusieurs endroits, les sommets dénudés de grands cônes de roche injectée sont exposés et découverts. Enfin, nous avons vu que le pourtour entier de l’île a été profondément érode, de manière à former de gigantesques falaises.

Cratères de soulèvement. — Les îles de Sainte-Hélène, de San Thiago et Maurice offrent une grande ressemblance au point de vue de leur structure et de leur histoire géologique. Ces trois îles sont enfermées (tout au moins celles de leurs parties qu’il m’a été possible de visiter) dans un cercle de montagnes basaltiques fortement entamé aujourd’hui, mais qui a été évidemment continu autrefois. Le versant de ces montagnes, dirigé vers l’intérieur de l’île, est escarpe, ou paraît pour le moins l’avoir été autrefois, et les couches dont elles sont constituées plongent vers la mer. Je n’ai pu déterminer l’inclinaison des bancs que dans un petit nombre de cas seulement, et cette opération n’était pas facile, car la stratification paraissait généralement mal définie, si ce n’est quand on l’observait de loin. Cependant, je suis à peu près certain que, conformément aux recherches de M. Elie de Beaumont, leur inclinaison moyenne est supérieure à celle qu’ils auraient pu prendre en coulant sur une pente, étant données leur épaisseur et leur compacité. A Sainte-Hélène et à San Thiago les couches basaltiques reposent sur des bancs plus anciens, d’une composition différente, et qui sont probablement sous-marins. Dans les trois îles, des déluges de laves plus récentes se sont écoulés du centre de l’île vers les montagnes basaltiques et entre ces dernières ; et à Sainte-Hélène la plate-forme centrale a été comblée par ces laves. Chacune des trois îles a été soulevée en masse. A l’île Maurice la mer doit avoir baigné le pied des montagnes basaltiques, à une période géologique éloignée, ainsi qu’elle le fait actuellement à Sainte-Hélène ; à San Thiago la mer attaque aujourd’hui la plaine qui s’étend entre ces montagnes. Dans les trois îles, mais spécialement à San Thiago et à Maurice, l’observateur, placé au sommet d’une des anciennes montagnes basaltiques, cherche en vain à découvrir au centre de l’île (point vers lequel convergent approximativement les strates placées sous ses pieds et sous les montagnes situées à sa droite et à sa gauche), une source d’où ces coulées auraient pu être émises ; mais il n’aperçoit qu’un vaste plateau concave s’étendant au-dessous de lui, ou des monceaux de matières d’origine plus récente.

Je pense que ces montagnes basaltiques doivent être classées avec les cratères de soulèvement ; il importe peu que les enceintes aient été ou non complètes autrefois, car les segments qui en subsistent aujourd’hui ont une structure si uniforme que, s’ils ne constituent pas des fragments de véritables cratères, on ne peut pas les classer parmi les lignes de soulèvement ordinaires. En considérant leur origine, et après avoir lu les ouvrages de M. Lyell 87 et de MM. C. Prevost et Virlet, je ne puis croire que les grandes dépressions centrales aient été formées par un soulèvement en forme de dôme, provoquant le cintrage des couches. D’un autre côté il m’est bien difficile d’admettre que ces montagnes basaltiques ne soient que de simples fragments du pied de grands volcans dont le sommet aurait été enlevé par explosion, ou plus vraisemblablement englouti par affaissement. Ces enceintes ont parfois des dimensions tellement colossales, comme à San Thiago et à Maurice, et on les rencontre si souvent, que je puis difficilement me résoudre à adopter cette explication. En outre, la simultanéité fréquente des faits que je vais énumérer me porte à croire qu’ils ont, en quelque sorte, un rapport commun que n’implique ni l’une ni l’autre des théories rappelées plus haut : en premier lieu, l’état ruiné de l’enceinte qui démontre que les parties actuellement isolées ont été soumises à une dénudation puissante, et tend peut-être, en certains cas, à démontrer que l’enceinte n’a probablement jamais été fermée ; en second lieu, la grande quantité de matière éjaculée par la partie centrale de l’île après la formation de l’enceinte ou pendant la durée de cette formation ; et en troisième lieu, le soulèvement de l’île en masse. Quant au fait que l’inclinaison des couches est supérieure à celle que devraient offrir naturellement les fragments de la base de volcans ordinaires, j’admets volontiers que cette inclinaison a pu augmenter lentement par le soulèvement dont les nombreuses fissures comblées ou dykes donnent à la fois la preuve et la mesure, d’après M. Elie de Beaumont ; théorie aussi neuve qu’importante que nous devons aux recherches de ce géologue a l’Etna.

Convaincu, comme je l’étais alors, par les phénomènes observés en 1835 dans l’Amérique du Sud 88, que les forces qui produisent l’éjaculation des matières par les orifices volcaniques sont identiques à celles qui soulèvent l’ensemble des continents, une hypothèse, embrassant les faits que je viens de citer, se présenta à mon esprit quand j’étudiai la partie de la côte de San Thiago où la couche calcaire soulevée horizontalement plonge dans la mer, immédiatement sous un cône de lave d’éruption postérieure. Cette hypothèse consiste à admettre que, pendant le soulèvement lent d’une contrée ou d’une île volcanique, au centre de laquelle un ou plusieurs orifices restent ouverts, neutralisant ainsi les forces souterraines, la périphérie est soulevée plus fortement que la partie centrale ; et que les parties ainsi surélevées ne s’abaissent pas en pente douce vers la région centrale moins élevée [comme le fait la couche calcaire sous le cône à San Thiago, et comme une grande partie de la circonférence de l’Islande 89 ; mais qu’elles en sont séparées par des failles courbes. D’après ce que nous constatons le long des failles ordinaires, nous pouvons nous attendre à ce que, sur la partie soulevée, les couches, déjà inclinées vers l’extérieur par le fait de leur formation primordiale en coulées de lave, seront rélevées à partir du plan de la faille et prendront ainsi une inclinaison plus forte. Suivant cette hypothèse, que je suis tenté de n’appliquer qu’à quelques cas peu nombreux, il n’est pas probable que l’enceinte ait jamais été complète, et par suite de la lenteur du soulèvement, les parties soulevées auraient été généralement exposées à une dénudation puissante qui aurait provoqué la rupture de l’enceinte. Nous pouvons nous attendre aussi à constater des différences accidentelles d’inclinaison entre les masses soulevées, comme cela se produit à San Thiago. Cette hypothèse rattache également le soulèvement de l’ensemble de la région à l’écoulement de grands flots de lave provenant des plates-formes du centre. Dans cette théorie les montagnes basaltiques marginales des trois îles que nous avons citées plus haut peuvent encore être considérées comme formant des « cratères de soulèvement » ; le genre de soulèvement que l’on suppose a été lent, et la dépression ou plate-forme centrale a été formée, non par le cintrage de la surface, mais simplement par suite d’un soulèvement moins considérable de cette partie de l’île.

Observations géologiques


sur les îles volcaniques (1844)
Chapitre V
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