A la même table avec un général arménien
Nous revenons au bureau d’Hovik à Sissyan et le motif de l’animation que nous avons vue ce matin devient claire : Basensi, son frère cadet et général de l’armée arménienne est en visite dans la région. J’y apprends qu’à la période soviétique Basensi était colonel de KGB. En Afghanistan il avait fait son service militaire comme officier du service de contre-espionnage militaire. Il a fait ses études à l’Académie Militaire de l’URSS. Jusqu’en 1995 il a occupé des postes différents à l’Armée Soviétique. En 1995 il est revenu à l’Armée arménienne où il a été nommé au poste de chef adjoint de l’Etat-majeur général qui était responsable pour les problèmes de contre-espionnage militaire. A la différence de ses frères Hovik et Kolya, Basensi ne parle pas la langue azrbaïdjanaise (ou il ne veut pas parler, en tout cas quand je lui pose une question en azerbaïdjanais il me dit qu’il ne parle pas ma langue.) et c’est pourquoi nous parlons en russe.
-
Je ne te dirai pas «sois le bienvenu», au moins parce que la guerre entre nous n’est pas encore finie.
Je réponds à ma manière :
-
Et parce qu’il n’y a pas de nécessité de dire «sois le bienvenu» à quelqu’un qui revient chez lui.
-
C’est vrai, ça aussi, dit-il et sourit artificiellement.
Hovik invite tous à la table. Dans une pièce pas très grande une table est couverte pour huit personnes. La table n’est pas très riche. Quatre personnes venues d’Irévan, Hovik et son frère Basensi, encore 2 colonels sont à la table. Hovik sert la vodka de mûr pour les autres et il me demande :
-
Bois-tu ?
-
Non, dis-je, - je ne bois pas en général.
Hovik n’insiste pas, mais son frère continue à ironiser :
-
Même si tu bois en général on peut te comprendre maintenant, tu ne peux pas boire avec nous.
Je ne réponds pas. Ils mettent sur la table des brochettes et de l’asperge rôtie. C’est vrai que j’ai mangé plusieurs fois l’asperge rôtie à Gandja, à Bakou, à Khathcmaz pendant la période de réfugié, mais je n’ai jamais trouvé le goût de l’asperge d’Ouroud. C’est pourquoi j’ai pris directement de l’asperge, mais pas de la brochette. Hovik a remarqué cela et a dit :
-
Ara, tu as un bon goût, mange bien ! Les habitants de ville ne peuvent pas apprécier l’asperge, parce qu’ils ne la connaisent pas.
Comme le grade militaire de Basensi est plus important il est assis à la tête de la table comme chef de table. Il dit :
-
Pour la simple raison que tout le monde sait je ne porterai pas de toast, mais en tant qu’un homme de guerre qui a fait 40 ans de service militaire je dois dire que la guerre est quelque chose de mauvais, je souhaite qu’elle finisse et que la paix soit établie bientôt !
Jusqu’aujourd’hui je ne sais pas à quel niveau les arméniens sont sincères quand ils disent qu’ils veulent la paix ? Peut-être veulent-ils se montrer comme une colombe de la paix, je ne sais pas, mais en tout cas pendant ces trois jours de visites tous les arméniens à qui j’ai communiqué ont confirmé qu’ils voulaient la paix.
Comme on ne dit pas de toasts nous ne restons pas longtemps à la table. Maintenant nous n’avons rien à faire à Sissyan et je dis au revoir à Hovik et à Basensi en leur serrant les mains avant de les quitter. Kolya qui est le plus âgé des frères et qui est un ami très proche de mon oncle Ajdar a les larmes aux yeux quand il m’embrasse avant de nous nous séparer et me demande de passser ses meilleurs voeux à Ajdar.
Les bonnes routes du pays arriéré
Notre voiture avance vers Irévan avec grande vitesse sur la route de montagne qui est bien faite. Depuis hier je voyage un peu partout en Arménie. Je n’ai vu nulle part des chantiers, mais par contre les routes sont très bien faites et bien entretenues et cela m’étonne.
Je partage mon étonnement avec Samvel Nikoyan :
-
Comment l’Arménie peut-elle construire et entretenir si bien ses routes avec un budget d’Etat qui n’est pas assez grand?
-
Même un seul centime du budjet d’Etat de l’Armenie n’a pas été dépensé pour la reconstruction et l’entretien de ces routes. Il y a trois ans que Gulbékyan, milliardaire arménien qui habite en Amérique a fait transférer ses 800 millions de dollars (un million par km. !) au fond routier de l’Arménie pour la reconstruction des grandes routes magistrales en déclarant que « la route est la première culture du pays » . Grâce à ce moyen les routes sont reconstruites. Maintenant les routes sont bonnes, sinon on ne pourrait jamais parcourir en 6 heures les distances que nous avons faites. Ce même Gulbékyan donne 50 millions de dollars chaque année pour les entretiens et les réparations courantes des routes.
Suite à la fatigue de voyage et à l’effet de la vodka Samvel Nikayan dort le long de la route et ne se réveille qu’à Irévan. Et moi, en faisant chemin j’admire les paysages pittoresques que nous passons le long de la route. Qui sait quand est-ce que j’aurai les possibiltés de revenir ici et de revoir la Patrie encore une fois ?
A dix heures et demie du soir nous arrivons à Irévan. Devant l’hôtel je dis au revoir à Nikoyan et on se sépare. Mes gardes du corps m’accompagnent jusqu’à ma chambre. Le téléphone sonne quand j’entre dans la chambre. C’est Assaf muellim. Il demande si nous avions bien fait notre voyage.
-
Tout va bien, dis-je, par contre je suis très fatigué, demain on discutera.
La conférence de presse
Le 7-8 juin nous avons eu notre conférence. Pendant les pauses les journalistes arméniens se collaient comme des vraies sangsues. Je ne parlerai pas largement de cette conférence de presse tenant compte que le but de ces mémoires n’est pas ça, mais je veux faire savoir que les questions étaient essentiellement sur le problème du Haut Karabakh. Nous aussi, nous déclarons d’être pour la solution de ce problème comformément aux normes juridiques internationales, dans le cadre de l’intégralité territoriale de l’Azerbaïdjan et avec une assurance de la sécurité pour la population arménienne du Karabakh de la part d’Etat.
C’est bien dommage que la presse pro-pouvoir arménienne et pro-opposition azerbaïdjanaise ont utilisé nos discours et nos interviews en les déformant.
Pourtant il y avait assez de journalistes objectifs. Par exemple, le journal «Novoyé vremya» qui sort en russe à Irévan avait publié ce que j’avais dit sur la destruction du cimetière azerbaïdjanais sans avoir touché le contenu. Même ils avaient publié la polémique que j’ai eue avec un journaliste arménien qui avait posé une question banale : «Avait-vous aimé la brochette arménienne?» Ma réponse était pleine de sarcasme et adéquate à cette question : «Il est difficille de dire si la brochette en tant qu’un repas apartient aux arméniens, aux géorgiens ou aux azerbaïdjanais, mais ce qui est sûr que l’agneau appartenait aux arméniens.»
Le même journal avait publié également la réponse d’Assaf Hadjyev à la question concernant la destruction des tombeaux arméniens à Djulfa : «Il faut vérifier si vraiment il y avait des tombeaux arméniens à Djulfa, ou non, mais mon collègue Moussa Ouroud vient de visiter son village où il n’avait même trouvé aucune trace du cimetière rasé de leur village. Et alors qu’est-ce que vous pourriez dire à ce propos ?»
Il est aussi intéressant que mon interview au journal pro-opposition de l’Arménie «Haykakan jamanak» (le temps arménien) dans le site de «Arm. diaspora» était publié sans changement. Je cite ici certains épisodes de cette interview :
-
L’histoire dit que le Haut Karabakh est un territoire arménien...
-
C’est votre histoire qui dit ça.
-
Vous êtes né dans le district de Sissyan. Croyez-vous que l’Arménie est votre deuxième Patrie ?
-
Non, je suis né dans un autre Etat.
-
N’avez-vous pas eu peur de venir ici ?
-
J’espère bien qu’en Arménie les députés ne seront pas fusillés une deuxième fois !
Après cette réponse la journaliste arménienne se perd un instant ayant les yeux carrés, elle bave de convoitise avec diffivulté et ne trouve pas de mots.
Je continue à attaquer :
-
Sûrement tu ne publieras pas ma réponse.
-
Si, je la publierai telle qu’elle est. Si cela vous intéresse vous pourrez la trouver sur internet.
Vraiment, trois mois après ce voyage tout à fait par hasard j’ai trouvé sur internet cette interview traduite en anglais et je me suis étonné dans le bon sens du mot. J’ai salué la fidélité à son métier de cette petite jeune brune arménienne au nez pointu.
Pendant la conférence nous avons eu une histoire amusante liée avec les journalistes arméniens et je veux vous écrire ça aussi.
Vers la fin de la conférence un journaliste arménien s’approche de David Saganalédhzé, député géorgien d’opposition et l’ayant confondu avec Mélik Raïsyan, député du Parlement de la Géorgie lui demande :
-
Pardon, Mr., vous êtes député du Parlement de la Géorgie ?
-
Oui.
-
Vous êtes arménien ?
Dato, grand farceur venge de Mélik et de tous les arméniens :
-
Hier j’ai beaucoup bu, sûrement c’est à cause de ça que j’ai l’air d’un monstre, mais je ne suis pas arménien.
L’arménien de Khanlar
Je veux décrire encore une histoire intéressante que j’ai eue au Parlement de l’Arménie. Pendant l’une des pauses une dame de 35-40 ans s’approche et demande en russe :
-
Qui est le député de Kirovabad ?
Je réponds : En Azerbaïdjan il n’y pas de ville qui s’appelle Kirovabad. Nous avons rendu à cette ville son ancien nom - Gandja. Nous sommes tous les deux députés de Gandja et Assaf muellim est né et a grandi à Gandja.
Ayant écouté ces mots la dame faillit embrasser Assaf muellim de joie.
-
Tu es de Gandja, mon cher ? Comment est Gandja maintenant ? On dit que Gandja a beaucoup changé pour le mieux, est-ce vrai ?
On se ragarde avec étonnement. D’abord nous pensons que c’est une dame azrebaïdjanaise mariée avec un arménien. C’est pourquoi nous lui posons des questions sur elle, sur sa famille et nous demandons comment elle est venue ici. Elle nous dit qu’elle s’appelle Thcakanyan Knarik, elle est née et a grandie dans le district de Khanlar de l’Azerbaïdjan. Jusqu’en 1989 elle avait vécu 47, rue Nizami. Elle faisait ses études dans la section azerbaïdjanaise et elle était en deuxième année de l’Institut de l’Agriculture de l’Azerbaïdjan quand elle a déménagé à Irévan. Elle habite avec son mari, sa fille et sa mère. Son mari est originaire de Khanlar aussi. «Tous nos plaisirs sont restés à Khanlar. Nous nous adaptons quand même, c’est surtout difficile pour ma mère. Elle n’arrive pas à s’adapter aux nouvelles conditions », dit-elle.
Knarik travaille au secrétariat du Parlement de l’Arménie. Elle est spécialiste en ordinateur. Elle avait appris l’arrivée des députés azerbaïdjanais à Irévan quand elle voulait imprimer leur liste et elle a appris que l’un d’eux (Assaf muellim) était de Gandja. Elle est venue voir ce député. Elle dont la famille écoute toujours à la maison la radio azerbaïdjanaise et surtout les chansons azéries. Elle dit que sa fille a quatorze ans et participe dans des compétitions de musiques et de chansons et toujours elle est classée en première place.
Après elle dit :
-
Vous savez pourquoi elle est toujours première ?
-
Sûrement elle a du talent, dit Assaf muellim.
-
Non, ce n’est pas la seule raison. Nous écoutons à la radio chez nous les chansons des chanteurs populaires Azerbaïdjanais comme Ayghun Kazimova, Faik Agayev, Zulfiya Khanbabayeva, Brilyant Dadachova, elle retient la mélodie, nous traduisons les mots des chansons en arménien et ma fille chante et elle a toujours du succès. Assaf muellim dit ne pouvant pas s’abstenir :
-
C’est votre ancien métier.
Nous rions tous les trois.
-
Je vous inviterais avec plaisir chez moi mais je n’ai pas le permis. Que la guerre finisse bientôt, qu’on ait un armistice et qu’on puisse faire des visites réciproques.
Ce n’est pas clair pour moi jusqu’aujourd’hui que la femme qui nous s’est présentée comme Schakanyan Knarik en s’approchant de nous dans la salle de réunion du Parlement arménien était-elle une réfugiée qui avait une nostalgie pour l’Azerbaïdjan ou bien une réalisatrice habile du scénario préparé par les organes de service de l’Arménie afin de créer dans nos imaginations le type d’une simple famille arménienne victime du conflit de Karabakh !
La Mosquée Bleue d’Irévan
La conférence a achevé son travail à midi le 8 juin. La présidence a été donnée à l’Azerbaïdjan, Tigran Togosyan a présenté le marteau et l’enclume – les symboles de la présidnce à Assaf Hadjiyev chef de la délégation Azerbaïdjanaise. Après la partie officielle les organisateurs nous ont demandé si on avait quelque souhait.
-
On voudrait bien visiter Maténadaran et la Mosquée Bleue, si c’est possible – ai-je dit.
Assaf muellim m’a regardé avec étonnement.
-
Je comprends la Mosquée Bleue, mais pourquoi veux-tu visiter Maténadaran ?
-
Bien sûr, je ne vais pas à Maténadaran pour lire les archives religieuses. En 1974 deux monuments historiques datant du Moyen Age - une statuette de bélier et un coffre en pierre ont été transportés et mis dans la cour de Maténadaran. Il faut profiter de l’occasion pour les filmer.
Nous allons à Maténadaran accompagnés par les « gardes du corps ». Pour ne pas éveiller le doute je filme le plan général du bâtiment et de la cour, les monuments datant de différentes époques. Je cherche partout dans la cour le monument à la statuette de bélier mais je ne la trouve pas.
En général il n’y a aucune statuette de bélier. Il paraît que les arméniens ont détruit ces monuments datant de l’époque d’Aghgoyounlou et de Garagoyounlou de l’histoire Azerbaïdjanaise en craignant de ne pouvoir les présenter comme les leurs. Les statuettes de beliers étaient des centaines sur le territoire de l’Azerbaïdjan d’Ouest qui s’appelle aujourd’hui la République d’Arménie.
Par contre je trouve le coffre en pierre. En tant que la seule chose qui reste du cimetière d’Ouroud j’ai envie de l’embrasser. On voit clairement qu’ils avaient essayé d’effacer les écritures arabes sur le coffre, mais les ornements et les symboles restent non touchés. Je prends la photo du coffre sous différents angles et je caresse avec la main les écritures éfacées comme on caresse la blessure de quelqu’un. Cette pierre dont les ecritures sont efacées, aussi bien que toutes les régions de l’Azerbaïdjan d’Ouest m’ont paru dignes de pitié.
Je n’avais plus rien à faire dans Maténadaran. Je vais maintenant visiter la Mosquée Bleue - le seul monument historique des musulmans qui est gardé dans ce pays appelé aujourd’hui la République d’Arménie pour montrer la tolérence arménienne.
La Mosquée Bleue est l’un des jolis monuments historiques importants de la région d’Irévan. Cette Mosquée qui est construite en 1764 par Huseynali Khan, gouverneur d’Irévan s’appelle aussi la Mosquée d’Huseynali Khan. Près de la porte d’entrée de la Mosquée il y a une plaque avec une courte information sur son histoire en arménien et an englais qui confirme que ce monument date du XVIII siècle. Il n’y a aucune information sur ceux qui l’ont construite et sur son origine musulmane et turque.
Nous ouvrons la vieille grande porte d’entrée et nous entrons dans la vaste cour de la Mosquée Bleue. Le désordre qui regne dans la cour abandonnée nous attire l’attention. Pour faire mine de reconstruire la Mosquée ils ont entassé au milieu de la cour un peu de briques et un peu de ciment qui est déjà pétrifié (Je touche le sac de ciment par la main pour être sûr). Le tas de sable est couvert de feuilles mortes et de poubelles. Tout cela montre que ces matériaux de construction sont ici apportés ici depuis longtemps et ils sont déjà oubliés.
La jolie piscine qui est au milieu de la cour de la Mosquée est vide. C’est seulement la grande salle de prière de la Mosquée qui est ouverte, les portes des autres pièces – de la bibliothèque, de la madrassa, des salles d’été et d’hiver sont fermées.
Au seuil de la porte de la grande salle de prière nous récitons «Fatiha» pour les âmes de tous les musulmans qui sont enterrés sur le territoire d’Irévan, puis nous enlevons nos souliers et nous y entrons. La salle de prière est assez grande. Le plancher est couvert d’une moquette. La vue générale de la salle est pauvre. Apparemment le toit du Minaret coule et ça se voit au plafond et au mur. Sur le plancher la trace de l’eau coulée n’est pas nettoyée exprès pour montrer que c’est récent.
Dans un coin de la salle il y un homme qui accomplit sa prière, à l’autre côté il y a un deuxième homme habillé en noire, un fez à la tête, des pantoufles aux pieds et un chapelet à la main qui allait et venait dans la salle. Pour ne pas déranger celui qui accomplissait sa prière nous nous approchons doucement de celui qui a un chapelet à la main en le prenant un iranien nous le saluons en azerbaïdjanais pace que nous savons de la presse que ce sont les iraniens qui viennent à la Mosquée Bleue.
L’homme qui à un fez à la tête et un chapelet à la main nous salue en disant «soyez les bienvenus». Il dit qu’il travaille dans la Mosquée Bleue et nous demande quel est le but de notre visite.
C’est vrai qu’il parle bien azerbaïdjanais mais il n’avait pas d’accent de Tabriz. Je lui demande d’où est-il.
-
Je suis de Téhéran.
-
Vous êtes persan, alors.
-
Non, je suis arménien de Téhéran !
Etonnés, nous nous regardons avec Assaf muellim : Un arménien à la Mosquée ?
Pour tirer au clair la situation Assaf muellim pose des questions :
-
Que faites-vous ici ?
-
Je fais le service ici.
-
Cela veut dire que vous êtes gardien.
-
Non, j’occupe le poste de molla de la Mosquée.
Je ne peux plus m’abstenir :
Cette fois avec un accent fort d’Irévan :
-
Non, ara, un arménien ne peut jamais devenir musulman.
Pour la première fois pendant notre voyage d’Irévan je ne peux pas contrôler mes nerfs et je monte la voix :
-
Mais comment un chrétien peut-il devenir molla ? Qu’est-ce qu’un non-musulman fout dans la Mosquée, alors ?
Mon interlocuteur qui parlait avec un accent doux propre aux iraniens jusqu’à là, change brusquement le ton de sa voix :
-
Ara, tu es venu ici pour un autre but. Mais le Dieu est unique. La Mosqée et l’Eglise sont les deux les maisons du Dieu et tout être humain peut y servir, y travailler et y vivre. La Mosquée n’est pas un endroit pour faire de la provocation. Vous pouvez quitter la Mosquée si vous n’avez pas d’autres questions.
Je ne parle plus. Assaf muellim pose une question afin de changer de sujet :
-
Est-ce qu’il y a plusieurs personnes qui viennent ici pour accomplir la prière ?
Le molla avec une croix au cou de la Mosquée dit par coeur les phrases qu’il a apprises pour les représentants des organisations internationales :
-
Mais bien sûr, ara, chaque jour il y a beaucoup de gens qui viennent à la Mosquée. Mais aujourd’hui ils ne sont pas nombreux.
Nous nous approchons de l’homme qui venait de terminer sa prière. Il dit qu’il est à Irévan depuis deux semaines et il est venu du Pakistan. Il vient ici chaque jour pour accomplir sa prière parce que le marché où il travaille est à côté.
-
Est-ce qu’il y a plusieurs personnes qui viennent ici pour accomplir la prière ? – je lui demande.
-
Non, -dit il,- pendant ces deux semaines je n’ai vu personne ici accomplir la prière.
-
Les commerçants iraniens ne viennent-ils pas ici pour faire prière ?
-
Au marché ils ont un endroit spécial pour la prière et c’est pourquoi ils ne viennent pas ici.
Nous saluons le pakistanais et tous les deux commençons à accomplir la prière. Nous prions Allah pour que tous les réfugiés et déplacés azerbaïdjanais reviennent chez eux.
Les énormes mûriers au milieu de la cour de la Mosquée Bleue qui sont aussi anciens que la Mosquée elle même sont pleins de mûrs et ils «invitent les passants» à goûter leurs fruits. Il est le meilleur temps de manger les mûrs qui sont aussi bien sucrés que le miel. En profitant de l’occasion nous en mangeons à notre aise.
Le 8 juin, à six heures du soir avec la délégation géorgienne nous partons d’Irévan pour Tbilissi. Les routes qui tournent autour du joli cou du lac de Goeytcha comme une écharpe noire passent par la vallée de Dilijan, Idjévan et nous amènent à la frontière de l’Arménie avec la Géorgie. Nous passons la nuit àTbilissi et le lendemain par le vol de Tbilissi-Bakou nons revenons à Bakou.
Après le voyage
Après le voyage on a eu beaucoup d’événements intéressants...
... Tout d’abords les prévisions de Moubariz Gourbanli se sont confirmées. «Arminform» a distribué les informations sur notre voyage par internet ayant déformés nos interviews et ayant faussé les vérités sur notre voyage. Et notre presse d’opposition à son tour, je ne sais pas exprès ou pas, a soutenu ces provocations arméniennes ayant publié des articles où ils nous décrivaient comme les traîtres de Patrie. Même parmi eux il y avait un qui proposait d’annuler les mandats de député d’Assaf Hadjyev et de Moussa Ouroud et de les juger.
... Deux bouteilles d’eau que j’avais prises de la source de Zor-zor était partagée et distribuée de façon suivante : un demi litre pour Seyid Mirich Aga, agsaggal («barbe blanche» - vieillard honoraire) de la population, un demi litre pour oncle Namaz, agsaggal des habitants de Vaghadi, un demi litre pour ma mère et un demi litre pour mes enfants.
... Quand j’ai voulu donner à Seyid Mirich Aga la terre que j’avais prise à Ouroud et partager avec lui mes impressions de voyages, Agsaggal ne m’a posé qu’une seule question :
-
En quel état est le cimetière, le kumbaz (construction sur la tombe des personnes honoraires) de mon Aga reste-t-il toujours ?
Je n’ai pas pu trouver tout de suite une bonne réponse à la question de cette personne sainte qui a plus que 80 ans, qui n’a pas encore perdu son espoir de revenir à son foyer natal et qui est «oncle Seyid» depuis mon enfance. Parce que les arméniens de Sissyan qui s’étaient rencontrés avec les azerbaïdjanais de Sissyan à Moscou, à Rostov, à Kislovodsk avaient toujours dit que le cimetière et la tombe de Seyid Mirismayil Aga n’étaient point touchés. Ma réponse pourrait détruire le seul espoir que Seyid Mirich Aga gardait depuis 18 ans au fond de son coeur. D’autre part je ne pourrais pas mentir à cet homme saint.
Je me suis mobilisé avec grande difficulté et j’ai dit :
-
Aga, là il n’y a pas de cimetière.
Ayant soupiré profondement Seyid n’a rien dit et s’est tu les yeux fixés sur un point X. Il m’a semblé d’avoir commis l’acte le plus vicieux de la vie avec ma visite à Ouroud quand j’ai vu les larmes couler sur la barbe blanche de Seyid Mirich Aga, assez vieilli mais qui était toujours avec le peuple aux jours durs et qui n’avait jamais perdu l’espoir.
... Ma mère n’a même pas goûté l’eau que j’avais apportée d’Ouroud. Pendant quelques jours elle a seulement mouillé son visage avec cette eau et elle a donné le reste à ces petits-enfants, disant qu’ils n’ont pas vu Ouroud, c’est pourquoi ce sont eux qui devaient la boire.
... Ma mère a regardé avec intérêt la vidéo que j’avais faite, mais elle n’a pa reconnu notre maison : «Non, ce n’est pas la même maison que j’ai quittée», a-t-elle dit.
... Oncle Namaz a sacrifié un bélier comme il l’avait promis avant ma visite et il l’a distribué à sept familles l’ayant divisé en sept morceaux...
... J’ai vu Hidayat, poète et publiciste et je lui ai raconté ma visite à Irévan, mais il n’a rien demandé sur cette ville où il avait consacré les 17 ans les plus intéressants de sa vie aux activités sociales et littéraires. Il a parlé de Zangazour et des villages azerbaïdjanais de Sissyan et il m’a suggéré d’écrire mes mémoires de cette visite…
… Le général Baylar Eyoubov a pleuré quand je lui ai dit que le cimetière d’Ouroud était rasé. «Sûrement les arméniens ont détruit tous les cimetières musulmans en Arménie», a-t-il dit.
… Le général Vazensi Azoyan et son frère aîné Hovik Azoyan (celui-ci d’une crise cardiaque) sont morts l’un un mois après et l’autre un an après notre visite d’Irévan…
… Après le retour d’Ouroud j’ai eu beaucoup de problèmes : petits et grands – Ma datcha était pillée et brûlée après un mois de mon retour. Ma mère, mon épouse, ma fille, mon fils sont grièvement tombés malades, j’ai perdu certains amis, en un mot jusqu’à l’anniversaire de ma visite à Ouroud je n’ai pas eu de calme. Je ne suis pas quelqu’un qui croit en la magie, mais je n’ai pas d’autres explications de ces problèmes que les suivantes : Avec ma visite j’ai dû déranger les espris de ceux qui sont enterrés là-bas les ayant laissés de nouveau sous l’occupation...
... Peut être ces esprits croyaient-ils que j’étais venu à Ouroud pour y rester.
2006-2008
СОММАИРЕ
La patrie c’est autre chose 4
PREMIER VOYAGE
Les derniers jours de Zangazour 10
La route de Latchin 16
Le col de Sariyal 18
La Place d’Ane 22
De bons arméniens 24
Neuf heures dans le foyer paternel 28
DEUXIEME VOYAGE
La vie de réfugié 32
Il est difficile d’être heureux quand on est
réfugié 33
Sim-Sim, ouvre la porte 34
Des discussions 44
Préparation au voyage 45
L’inquiétude 47
A Irévan par dessus de la Géorgie 51
L’Hôtel «Mariott» 56
Voyage avec Nikoyan 59
Védi - région entourée de montagne 62
La période de fleurs des montagnes 64
Le bureau d’Hovik Azoyan 68
Les lieux d’habitation vidés 76
Nostalgie pleine de chagrin 81
L’histoire qui est enterrée 83
On pleure quand on pert son foyer 95
A la même table avec un général arménien 108
Les bonnes routes du pays arriéré 111
La conférence de presse 112
L’arménien de Khanlar 115
La Mosquée Bleue d’Irévan 117
Après le voyage 123
Moussa Ouroud
DEUX VOYAGES EN OUROUD
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Ращиля Мяммядова
Igned to print: 29.12.2009
Формат: 84х90 1/32
Volume: 4 ч.в.
Quantitu: 500
Order: 286
Принтед ин Азербаижан бй «Илай» принтинэ щоусе
бй усинэ реаду диапоситивес.
Аддресс: Баку, Сщерифзаде стр. 202.
Тел.: +994-12-498-68-25; Тел.: +994-12-433-00-43
Web: www.adиloglu.az; Е-маил: иnfo@ adиloglu.az
Gouliyev Moussa Issa oglou (Moussa OUROUD)
né le 2 novembre en 1961 dans le village d’Ouroud du district de Sissyan de la République d’Arménie.
Formation :
-
Faculté de Traitement et de Prophylaxie de l’Université d’Etat de Médecine d’Azerbaidjan
-
Faculté de Gestion Publique et Municipale de l’Académie de Gestion Publique auprès le
Président de la République d’Azerbaidjan.
Il est :
-
candidat ès Sciences Médicales,
-
membre de l’Union des Ecrivains de l’Azerbaidjan,
-
boursier de la Bourse Présidentielle,
-
lauréat des primes de littérature : «Nizami», «Aydin», «Araz» et «Youssif Mammadaliyev»,
-
auteur de 9 livres et de plus que 150 articles.
-
membre du Conseil Politique du Parti de Nouvel Azerbaidjan.
Il parle russe et englais.
Expérience professionnelle :
-
médecin-toxicologue au dispensaire toxicologique à Gandja depuis 1984,
-
médecin neuropathologue dans une policlinique à Bakou,
-
expert-neuropathologue à la Commission médicale de travail du District de Yassamal depuis 1993,
-
chef Département et chef Direction au Ministère de Protection sociale de la Population de
la République d’Azerbaidjan en 1994-2000.
Il avait été élu député au Milli Medjlis de la République d’Azerbaidjan en 2ième Convocation.
Le 6 novembre 2005 il est réélu député à la circonscription électorale de Kapaz-2 N40 (Gandja).
Il est vice-président de la Commission permanente de Politique Sociale du Milli Medjlis, chef du Groupe de Travail interparlementaire Azerbaidjan-Algérie et membre des Groupes de Travail interparlementaires Azerbaidjan-Brézil, Azerbaidjan-Kazakhstan, Azerbaidjan-Lituanie, Azerbaidjan-Pakistan.
Il fait parti de la Délégation d’Azerbaidjan au Conseil du Parlement de l’Organisation de Coopération Economique de la Mer Noire.
Marié, trois enfants.
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