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Buridan le héros de la Tour de Nesle Beq michel Zévaco Buridan le héros de la Tour de Nesle


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La Tour de Nesle


Gautier d’Aulnay, malgré ses airs matamores, était plus prudent que son frère. Nous ne disons pas moins brave. Mais Philippe avait ce genre de courage qui refuse de parlementer avec le danger. Dans la situation d’esprit où il se trouvait, avec au cœur un incurable amour sans issue possible, il recherchait avidement les occasions de s’exposer. C’est lui qui avait eu l’idée de la provocation à Marigny.

Gautier, bon vivant, adorant la vie qui lui était douce, vu qu’il avait eu le soin de ne l’empêtrer d’aucun bagage sentimental, Gautier eût voulu vivre trois cents ans, à condition d’être toujours robuste et de trouver toujours des cabarets dignes de lui ; Gautier donc, l’homme de la franche lippée, savait compter avec le péril et trouvait intempestives les occasions d’offrir inutilement aux coups sa belle et large poitrine.

Lors donc qu’ils eurent reçu la visite de l’homme qui leur donnait rendez-vous à la Tour de Nesle, Gautier commença par fermer et cadenasser la porte en disant :

« Nous n’irons pas. C’est un piège que nous tend le Marigny. Mais le piège est trop grossier. Il nous croit donc bien bêtes ? C’est humiliant. Et je porte encore ceci à son compte.

– Nous irons, dit Philippe.

– Diable !... Mais explique-moi pourquoi nous devons aller nous faire mettre en marmelade par les sbires que Marigny n’aura pas manqué d’aposter à cette Tour de Nesle ? Que tu aies envie de mourir, toi, cela se conçoit, puisque tu n’aimes que la reine et que la reine est sacrée ! Mais moi, frère, j’aime les deux princesses, et ce serait bien le diable, tête et ventre ! si je ne faisais partager mon amour au moins à l’une des deux. Donc, je ne vois pas...

– Nous ne trouverons aucun sbire, interrompit Philippe. Si Marigny avait su notre présence dans cet hôtel, au lieu de nous envoyer quelqu’un pour nous attirer dans un guet-apens, il nous eût simplement envoyé douze archers et nous serions déjà au fond de quelque basse fosse.

– Tiens ! C’est vrai, cela !... Allons donc à la Tour de Nesle. D’autant... d’autant... attends donc... »

Gautier se rapprocha de son frère. Il avait pris une mine des plus réjouies, clignait de l’œil, et la figure émerveillée, s’écriait :

« Oh ! oh ! mais oui... c’est bien cela !

– Quoi donc, mon brave Gautier ?

– Des histoires que je me suis laissé raconter après boire sur une certaine tour. Je me rappelle à présent, c’est bien de la Tour de Nesle qu’il s’agit dans ces histoires ! »

Gautier s’esclaffa.

« Et que t’a-t-on raconté, voyons ? dit Philippe.

– On raconte... on dit... c’est drôle, vois-tu !... on raconte que, parfois, les sombres fenêtres grillées de la Tour de Nesle s’illuminent... Des gens disent qu’à certains soirs, ils ont vu une femme d’une beauté magnifique... Oh ! mais d’une beauté, vois-tu ! dont serait jalouse la reine Marguerite elle-même !...

– Frère ! murmura Philippe, je t’en supplie, ne mêle pas le nom pur de la reine à ces contes des grossières amours de quelque ribaude.

– Des contes ? Par la Vierge et par Vénus ! Dis des faits authentiques, réels. Il n’est pas une taverne de la rue du Val-d’Amour à la rue Tirevache où on n’en parle comme de choses tout à fait sûres ! On dit donc que cette femme splendide guette les passants, et quand elle en voit un qui lui plaît, elle l’appelle de son sourire et de la main... On dit qu’alors on entend dans la tour des bruits d’orgies, qui durent fort tard avant dans la nuit... Écoute ! Faut-il te le dire ? Souvent je suis passé devant la tour, à l’heure brune, dans l’espoir d’être pour une nuit l’élu de la belle inconnue...

– Et l’as-tu vue ? demanda Philippe avec un sourire.

– Jamais. Sans cela, tu penses bien qu’elle n’eût pas manqué de me remarquer. Je n’ai vu que les pierres noires et effritées de la vieille tour, les barreaux effrayants de ses fenêtres et l’eau sombre du fleuve clapotant à ses pieds et s’en allant avec des gémissements, comme si, après avoir touché ces pierres, la Seine emportait des âmes de trépassés...

– Tu vois bien. Et as-tu jamais rencontré l’un de ces hommes invités à ces nocturnes orgies ?

– Jamais. Je l’avoue. Et nul n’en a jamais vu un seul. Mais si ce soir nous allions voir la dame mystérieuse ! Si elle allait me sourire !... Ou bien à toi !

– En ce cas, je n’irais pas. Seulement, ce n’est pas vrai, mon bon Gautier. Qu’importe, au surplus ! Celui qui nous appelle est un ennemi de Marigny, voilà tout. Et c’est assez ! Cet homme, fût-il un démon, je le bénirai s’il nous donne le moyen de venger notre père et notre mère. »

La décision prise, les deux frères attendirent avec impatience le moment d’aller au mystérieux rendez-vous. Vers neuf heures et demie, ils se mirent en route, passèrent la Seine, non par les ponts qui étaient barrés et tendus de chaînes dès le couvre-feu, mais grâce à un batelier complaisant, et, à dix heures, s’approchèrent de la Tour de Nesle.

Elle élevait sa silhouette décharnée dans la nuit noire et se dressait, pareille au fantôme de quelque titanesque sentinelle, en face du vieux Louvre, qui, de l’autre côté de l’eau, découpait sur le ciel sombre la confusion de ses bâtiments, de ses tourelles et de ses murailles d’enceinte. Et ces deux êtres de pierre, dont l’âme étrange palpitait dans les ténèbres, semblaient se regarder comme s’ils eussent eu des secrets terribles à échanger.

Tout à coup, Gautier posa sa main frémissante sur l’épaule de son frère.

« As-tu vu ? fit-il dans un souffle.

– Quoi ?

– Les fenêtres de la tour sont éclairées... oh !... éclairées comme on dit dans les histoires qui se racontent chez Agnès Piedeleu ! »

Philippe haussa les épaules et dit :

« Puisque celui qui nous appelle nous attend dans la tour, il faut bien que l’on ait allumé les flambeaux.

– C’est juste », fit Gautier avec un soupir de regret.

À ce moment, une ombre se dressa près d’eux. Philippe reconnut ou crut reconnaître la silhouette de l’homme qui s’était présenté rue Froidmantel. Il s’approcha et murmura :

« Marigny.

– Montfaucon ! », répondit l’homme qui se mit en marche droit vers la tour en leur faisant signe de le suivre.

La main sur la garde de leurs dagues, ils obéirent et, bientôt, ils se trouvèrent devant une porte basse et cintrée qui était entrouverte.

« Passez, mes gentilshommes... on vous attend ! »

Philippe jeta un rapide regard autour de lui, mais tout était tranquille... et, d’ailleurs, il eût été trop tard pour reculer. Il entra le premier. Gautier suivit. Ils se trouvèrent dans une large pièce dallée où il n’y avait aucun meuble et au fond de laquelle commençait un escalier tournant.

À ce moment, comme Philippe se retournait, il vit l’homme qui, sans bruit, sans un grincement, refermait la lourde porte d’entrée, poussait les verrous, tournait la clef dans la serrure et la cachait sous son manteau.

Il frissonna.

Le silence funèbre qui régnait dans la tour, le froid de glace qui des voûtes de cette salle lui tombait sur les épaules, la manœuvre de l’homme, tout cela fit battre son cœur d’un sinistre pressentiment... mais déjà le guide commençait à monter l’escalier.

« Par la sambleu ! murmura Gautier, il faut avouer que si ce qu’on raconte est vrai, la dame aux rendez-vous a choisi un triste lieu de plaisir. J’ai la petite mort dans les moelles ! »

Au premier étage, cette impression se dissipa soudain. Là, c’était un appartement bien clos, bien tiède, avec de beaux meubles tels que les riches bourgeois en possédaient dans leurs logis, généralement parés avec une entente parfaite de ce que nous appelons le confort. Car, dans ce temps, on vivait à la maison, les rues de Paris étant loin d’être ce qu’elles sont de nos jours : de véritables salons de promenades, de conversation et d’affaires.

Au second étage, ce fut encore bien mieux. Philippe et Gautier d’Aulnay furent introduits dans une petite pièce tendue de belles tapisseries, aux sièges ornés d’épais coussins, et où régnait un doux parfum que Gautier renifla en grondant, les yeux écarquillés et le visage pourpre :

« Ça sent encore meilleur que chez Agnès... »

Une indéfinissable inquiétude s’empara de Philippe. Leur guide avait disparu. Mais au moment où cet homme franchissait la porte du fond en leur faisant signe d’attendre, Philippe avait pu entrevoir son visage, dans un rapide mouvement de son capuchon. Il tressaillit et, saisissant son frère par le bras : « Dieu me damne, murmura-t-il, si notre guide ne ressemble pas à quelqu’un que nous avons vu souvent du haut de notre fenêtre de la rue Froidmantel !

– Bah ! À qui ça ?

– À Stragildo !...

– Au gardien des lionnes du roi !

– Oui ! Et des lions de la reine !...

– Bah ! Qu’est-ce que cela prouve ? On dit bien que je ressemble, trait pour trait, à notre sire le roi Louis !... Et pourtant, je ne suis pas le roi, malheureusement, car si j’étais le roi, tête et ventre ! je commencerais par... »

Gautier n’eut pas le temps d’énumérer les innombrables réjouissances que lui eût values ce titre de roi, qu’il regrettait de ne pas avoir. Les deux frères, tout à coup, furent envahis par ce sentiment de stupeur qui saisit l’homme devant l’invraisemblable réalité.

La porte venait de s’ouvrir toute grande, et ce qui apparaissait à leurs yeux, c’était une somptueuse et large pièce éclairée par six torchères supportant chacune six flambeaux de cire teintée de rose, dont les flammes très douces dégageaient une légère fumée odorante. Au fond, un bahut supportait un service d’argent massif comme on n’en pouvait voir que chez le roi : aiguières, surtouts, plats, curieuses et précieuses salières, flacons richement travaillés... En face, sur un dressoir, s’alignaient des mets tout préparés, et une table éblouissante attendait les convives, tout embaumée de fleurs rares qui devaient sortir de quelque serre.

À cette table, trois femmes étaient assises. Entre chacune d’elles, il y avait un siège vide. C’est donc qu’on attendait trois convives...

Devant ces trois inconnues, qui apparaissaient soudainement comme des fées ou des spectres, Philippe et Gautier d’Aulnay demeuraient comme frappés de vertige. Une sensation exorbitante s’emparait d’eux, une sorte de langueur subtile, une torpeur des sens due aux parfums dégagés par les flambeaux et, presque aussitôt, une surexcitation de l’esprit qui leur fit concevoir qu’ils étaient transportés tout éveillés en quelque rêve magique.

En effet, ces trois femmes étaient d’une somptueuse beauté.

Nous parlons de la beauté plastique du corps, car, pour les visages, ils étaient masqués de noir et on ne pouvait en voir que les bouches rouges comme des grenades s’ouvrant sous l’ardent baiser des soleils d’Espagne, et les yeux scintillants comme des astres au fond des ciels noirs des nuits hivernales.

Elles avaient toutes trois la gorge, les seins et les bras découverts.

Elles portaient des robes d’une excessive légèreté, des robes d’une sorte de gaze vaporeuse qu’une ribaude du cabaret du Val-d’Amour eût hésité à revêtir, des robes subtilement arrangées pour dévêtir, plutôt que pour habiller ces trois admirables statues qui semblaient des copies de déesses du Parthénon, mais des copies palpitantes de vie.

L’une d’elles se souleva à demi et d’une voix suave prononça :

« Daignez entrer, messires, et prendre place près de nous ; en attendant l’arrivée de votre ami Buridan sans qui nous ne commencerons pas ce souper, nous écouterons la musique des violes et nous échangerons des paroles d’amour. Car il faut bien vous le dire, c’est un faux prétexte que nous avons pris pour vous faire venir ici... la vérité, c’est que nous sommes... mettons trois sœurs... oui, trois sœurs amoureuses de vous... Voici ma sœur Pasithée qui est éprise de vous, seigneur Philippe, à en mourir ; voici ma sœur Thalie qui brûle pour vous, seigneur Gautier, et moi, Églé, c’est pour le seigneur Buridan que mon cœur s’est enflammé... »

Ayant ainsi fait la présentation sous les noms des trois déesses filles de Jupiter et de Vénus, la dame fit aux deux frères un geste gracieux qui les invitait à prendre place à table.

Ces paroles étranges, la frénétique impudence de l’aveu d’amour qu’elles contenaient, la splendide impudicité des attitudes et des costumes, l’imprévu de cette scène qui semblait due à la délirante imagination de quelque trouvère passionné, le mystère fastueux de ce décor... c’était dans l’esprit des deux frères un prodigieux étonnement, mais s’il semblait à Philippe que cette perversité des trois inconnues dépassait les bornes humaines, s’il songeait, bien qu’il ne partageât pas toutes les superstitions de son époque, qu’il avait peut-être affaire à une infernale apparition, Gautier émerveillé, Gautier rugissant, Gautier un peu pâle, s’avançait, subjugué, fasciné, et s’asseyait près de celle qu’on avait nommée Thalie.

« Elle est blonde ! songea-t-il simplement. Ma foi, ce soir, j’adore les blondes... »

Et comme il cherchait vainement une parole à dire à cette inconnue, brusquement il appuya ses lèvres sur les épaules blanches, violent baiser qui fit tressaillir la ribaude.

Car, quel autre nom pourrions-nous donner à ces femmes ?

Gautier, à ce moment, éclatait d’un rire terrible où il y avait un peu de folie, et bégayait :

« Ainsi, notre brave Buridan sera de la partie ?

– Il devrait être ici déjà, dit d’une voix rauque d’impatience celle qui s’était donné à elle-même le nom d’Églé. Mais vous, seigneur Philippe, qu’attendez-vous pour vous asseoir près de ma sœur Pasithée ? N’avez-vous pas entendu qu’elle vous aime ?... Ne voyez-vous pas qu’elle vous tend les bras ?... »

Il y avait une sourde irritation dans l’accent de la dame qui proférait ces paroles exorbitantes.

Pâle comme la mort, Philippe d’Aulnay demeurait debout à la même place, sans un geste.

Et comme la musique des violes commençait à se faire entendre – une musique aussi douce, aussi mystérieuse que le parfum des flambeaux, que l’harmonie des fleurs rares expirant sur la table, une musique créatrice de sensations perverses et de langueurs éperdues –, comme cette musique donc, si savante dans son étrange simplicité, commençait à s’épandre en accords lointains venus, semblait-il, du haut de la tour, ou du ciel, Gautier saisit un flacon d’argent qui contenait un vin au puissant fumet, il en versa les flots de rubis sombre dans la coupe en cristal de Thalie et remplit au ras bord sa propre coupe qu’il vida d’un trait en disant :

« Je bois au maître éternel qui conduit le monde à travers les délices des rêves glorieusement impurs, à l’Amour ! Je bois à vous, déesses ou mortelles, filles du ciel ou filles d’enfer, beautés souveraines, et à toi, magique Thalie, dont le seul sourire me verse des voluptés inouïes... Allons, frère, approche, puisqu’on t’y invite ! Laisse un instant tes soucis que tu reprendras à la porte de cette tour ; vivons une heure ce rêve puisque nous y sommes transportés... Quant à moi, je m’abandonne au charme qui m’étreint, dussé-je y trouver la mort !...

– Bien dit ! s’écria celle qui se nommait Pasithée. Mais, ajouta-t-elle avec une ironie qui avait on ne sait quoi de funèbre, votre frère ne semble pas professer la même courtoisie que vous... à moins qu’il ne me trouve moins belle que vous, seigneur Gautier, ne trouvez belle ma sœur Thalie...

– Madame, dit Philippe, en s’adressant à Églé, c’est-à-dire à celle qui semblait diriger cette scène, madame, je voudrais vous parler à vous... à vous seule. »

D’un geste irrité, Églé frappa sur la table avec un petit marteau d’argent.

Une servante parut, jeune, jolie, aussi peu vêtue que les maîtresses, capable de remplir ses fonctions à cette table sans déparer l’harmonieux ensemble de l’orgie.

« Buridan ? » demanda Églé.

La servante secoua négativement la tête. Une rougeur de colère empourpra ce qui, dans le visage masqué d’Églé, demeurait visible.

« C’est bien, gronda-t-elle. Voici onze heures et le seigneur Buridan ne vient pas. Sans doute, il ignore les lois de la courtoisie... comme monsieur ! ajouta-t-elle en désignant Philippe.

– Madame, répéta Philippe, je désire vous parler... à vous seule. Peut-être daignerez-vous me pardonner, quand vous connaîtrez les causes de mon attitude, qui, à bon droit, je le confesse, peut vous sembler étrange. »

Il y avait une si haute et si noble politesse dans les paroles et l’accent du jeune homme que la dame en parut frappée.

« Qu’on serve la collation, dit-elle en se levant, messire Gautier voudra bien, pour quelques minutes, tenir tête à mes deux sœurs Thalie et Pasithée...

– Fussent-elles dix, cria glorieusement Gautier, que le verre en main, l’amour au cœur, je trouverais encore les paroles dignes de chacune d’elles ! »

Alors, d’un bras il attira à lui Thalie qui se trouvait à sa gauche, Pasithée qui se trouvait à sa droite, et dans un double baiser murmura :

« Par le Ciel, j’ai tenu tête, un soir, au Val-d’Amour, à quatre princesses... et vous n’êtes ici que deux !... »

À ce mot de princesses, que Gautier jetait innocemment, les deux femmes tressaillirent...

La musique des violes continuait sa complainte lointaine, où parfois semblaient passer par bouffées des lamentations et des sanglots ; les flambeaux de cire continuaient à jeter leurs lueurs parfumées, qui pâlissaient parfois comme les flammes de cierges funéraires... Sur cette salle d’orgie, sur cette table splendide, sur ces femmes superbement impudiques, sur cet homme qui s’enivrait de ses propres pensées d’amour, passaient des souffles glacés, pesaient des silences funèbres, et il semblait que sur le groupe étrange de Gautier, Thalie et Pasithée, enlacés, la mort déployât à ce moment de grandes ailes noires...

IX



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