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1958 tableau des états-unis


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Chapitre 6.

LA RÉPARTITION
GÉOGRAPHIQUE DE
LA POPULATION
AUX ÉTATS-UNIS


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Le peuplement des États-Unis s'est fait d'abord par immigration, puis surtout et enfin presque exclusivement par excédents de naissances. L'immigration, limitée au début à la côte Atlantique, s'est ensuite portée vers l'Ouest, soutenue par une série de migrations intérieures issues de l'Est, mouvement humain massif qui a abouti à la mise en valeur de tout un continent.

La colonisation de l'Ouest s'est opérée après les guerres de l'Empire et surtout après la guerre de Sécession. Le mouvement était à peu près achevé vers 1890, la « frontière » ayant reculé de plus en plus. Je me rappelle, juste après la traversée des Alleghanies, avoir entendu des gens s'écrier avec satisfaction : We are getting West ! Mais il s'en trouvait d'autres, à Saint-Paul (Minnesota), pour dire avec une égale conviction : Way down East in Chicago, ce qui souligne à quel point cette notion d'Ouest, plus mystique que géographique, est mouvante. La côte du Pacifique est colonisée depuis la découverte de l'or en 1848, mais les premiers prospecteurs arrivaient par Panama et le premier transcontinental, l'Union Pacific, remonte seulement à 1870. L'histoire ne s'arrête pas là, car la seconde guerre mondiale a donné lieu au brassage de populations sans doute le plus important, entraînant une redistribution qui a modifié sensiblement le centre de gravité du pays.

[p. 48]

I


On distingue, au XIXe siècle, deux courants migratoires principaux. Le premier, issu de la Nouvelle-Angleterre, se dirige vers l'Ouest par le Sud des Grands Lacs, à travers l'Ohio, l'Indiana, l'Illinois, l'Iowa, le Missouri, le Kansas, transplantant sur son passage la tradition puritaine des premiers colons du Nord-Est, établissant partout une élite de pionniers et de leaders, dont l'influence dirigeante est encore sensible aujourd'hui (c'est de façon analogue que les écossais presbytériens des Provinces Maritimes ont colonisé l'Ouest canadien). Un courant parallèle plus au Sud, issu de la Virginie, du Tennessee, peuplait la partie méridionale de ces mêmes États, amenant aussi des protestants, mais plus pauvres et d'un autre esprit, ayant souvent même le caractère de pauvres blancs (Lincoln, on le sait, provenait de cette origine).

La signification de cette double migration est essentielle, car elle a prolongé vers l'Ouest la différence originelle de deux types d'Américains, correspondant à deux tempéraments politiques, républicain au Nord, démocrate au Sud, la répartition géographique des votes étant encore déterminée, dans l'Illinois par exemple ou le Missouri, par cette origine distincte des électeurs. L'esprit du Centre-Ouest, devenu plus typique de la personnalité nationale qu'une Nouvelle-Angleterre envahie d'Irlandais, de Canadiens français et d'Italiens, s'explique largement par cette présence au cœur même du continent de véritables garnisons puritaines ayant pris la tête du progrès économique. Ces migrations initiales se sont par la suite ramifiées, d'une part droit vers l'Ouest et le Pacifique, d'autre part vers le Texas et la Californie du Sud par la Santa Fé trail, enfin vers le Montana et l'Oregon. Une tradition républicaine s'est ainsi imprimée au Nord-Ouest, et au Sud-Ouest une tradition démocrate.

Les courants de base sont dans le sens de la latitude, mais une migration continentale importante, venue du Nord, a, dans la seconde moitié du XIXe siècle, peuplé la Nouvelle-Angleterre de 1 000 000 de Franco-Canadiens, main-d'œuvre de l'industrie cotonnière : la langue française (une langue assez corrompue, il faut l'admettre), la religion catholique se sont ainsi implantées dans la partie traditionnellement la plus anglaise et la plus protestante du pays, contribuant à altérer sa pureté initiale.

[p. 49]


Les grands mouvements de population que nous venons d'évoquer sont antérieurs à 1914 et même à 1900, mais il s'est produit depuis lors des redistributions démographiques, dont la grande importance ne saurait être méconnue : populations plus pauvres attirées par des régions de niveau de vie supérieur, classes sociales enrichies émigrant vers des climats plus agréables. La principale de ces migrations est celle qui, depuis la première guerre mondiale, a drainé vers les grandes villes du Nord une fraction massive des Noirs du Sud, dont l'industrie avait besoin comme main-d'œuvre, cependant qu'ils espéraient y trouver un traitement social meilleur. C'est ainsi que New York contient 1 000 000 de Nègres, Chicago plus de 500 000.

Cet attrait du Nord n'est pas limité aux Nègres. On estime en 1952 à 260 000 le nombre des Porto-Ricains établis à New York, où ils forment, en marge du quartier noir de Harlem, une pègre dont on ne peut se défendre dès l'instant qu'aucun visa d'immigration n'est requis en l'espèce, Porto-Rico étant possession américaine. Mais bien autrement massive, dans l'Ouest, le Sud-Ouest, la Californie, est la pénétration des Mexicains. Ceux-ci sont attirés par la perspective de salaires plus élevés que chez eux, encore que, d'un point de vue américain, ce soient souvent des salaires de famine. En raison de la mécanisation agricole la main-d'œuvre stable tend à disparaître des campagnes, aussi les cultivateurs sont-ils contents de disposer de ces travailleurs temporaires, frustes mais vigoureux, avec lesquels on se gêne d'autant moins qu'ils ont la plupart du temps passé la frontière en fraude, notamment en traversant à la nage le Rio Grande, d'où leur surnom de Wetbacks (dos humides) : sur une frontière de 1 600 milles 1, 600 hommes de police sont évidemment bien incapables de les empêcher de passer. On estime qu'en 1952 plus de 1 000 000 de ces Mexicains ont été employés aux États-Unis : on en a arrêté 635 000, qu'on a renvoyés de l'autre côté de la frontière, mais au fond l'Ouest, qui s'en accommode, souhaite que rien de décisif ne soit fait pour arrêter ce flux exotique, qui tend à devenir un aspect presque normal de la vie des États au delà du Mississipi, car moissons, travaux des mines et des routes ne se passeraient pas volontiers de pareil recrutement.

C'est que, refusant depuis une génération l'immigration [p. 50] régulière en provenance de l'Europe, les États-Unis ressentent un besoin chronique de cette main-d’œuvre de force qu'Américains et assimilés refusent de plus en plus de fournir, main-d’œuvre à proprement parler coloniale, qu'en vertu de la loi des vases communicants la différence des niveaux de vie appelle vers le Nord.

Par une sorte de chassé-croisé, tandis que les pauvres sont attirés vers le Nord, les riches ou enrichis sont attirés vers le Sud. La Floride se peuple de luxueux hivernants ou estivants qui en modifient le caractère, la pénétrant de foyers républicains, altérant l'intégrité ancienne de son esprit sudiste. La Californie du Sud, après la prospérité agricole de la première guerre mondiale, a reçu toute une population de fermiers de l'Iowa et du Kansas, cherchant sur les rives du Pacifique un climat plus clément : ils forment à Los Angeles une classe spéciale de retraités, apportant paradoxalement dans ces régions d'atmosphère latine je ne sais quelle influence protestante du Centre-Ouest. Il faut mentionner, dans une catégorie analogue, la migration de qualité qui attire vers l'altitude et les ciels sans nuages du Nouveau-Mexique ou de l'Arizona des colonies sélectionnées de malades ou de convalescents, de peintres, de poètes ou d'écrivains : Santa Fé, Taos sont de petits foyers artistiques et littéraires, où le souvenir de D. H. Lawrence demeure vivant.

Mais le mouvement séculaire lié à la mise en valeur du territoire se poursuit, non plus seulement vers l'Ouest, mais vers le Sud. Jusqu’à la première guerre mondiale, le vieux Sud, encore marqué du sceau de la défaite, était resté somnolent et à l'écart. Dès après 1918 a eu lieu la migration de l'industrie cotonnière des États du Nord-Est vers la Caroline du Nord, la Géorgie, l'Alabama : les trois quarts de ses broches et métiers sont désormais dans cette partie du pays. Puis sont venus les booms d'après la seconde guerre mondiale, qui ont sensationnellement développé le Texas et sont en train d'industrialiser les États du bas Mississipi avec une étonnante rapidité. Ce double développement n'est du reste qu'une suite de l'activité économique prodigieuse dont la dernière guerre a été l'occasion, l’État ayant pris en main, pour l'organiser, la diriger, l'orienter, l’ensemble de la production nationale, tendue vers les fins de la victoire. Des déplacements massifs de main-d'œuvre se sont produits de ce fait, portant sur des effectifs évalués à huit millions d'hommes. La répartition ancienne de la population en a [p. 51] été sensiblement affectée, car, si beaucoup de ces déplacements étaient temporaires, nombreux sont ceux qui, ayant apprécié l'agrément de milieux et de climats meilleurs, ont décidé de s'y fixer.

La direction générale du mouvement est vers l'Ouest, qui, dans la période décennale de 1940 à 1950, s'est accru dans la proportion de 39,8 p. cent, l'accroissement national moyen étant de 14,3 p. cent. La côte Pacifique, qui vient en tête, a gagné 47,6 p. cent, la région des Rocheuses 21,6 p. cent, le Sud-Est Atlantique 18 p. cent. Ce sont les États du Sud-Ouest et du Pacifique qui se sont le plus accrus : Californie, 51,9 p. cent ; Arizona, 49,3 p. cent ; Nevada, 43,6 p. cent ; Oregon, 38,8 p. cent ; Washington, 36,1 p. cent ; mais la Floride, de son côté, a gagné 44,6 p. cent. Ce progrès s'est fait dans une certaine mesure au détriment du Nord-Ouest et de l'Ouest proprement dit, de certains États du Sud également : l'Oklahoma a perdu 4,8 p. cent de sa population, le North Dakota 3,7, l'Arkansas 2,4, le Mississipi 0,5 p. cent, cependant que dans l'Iowa, le Kansas, le South Dakota, le Nebraska, les gains sont si minimes qu'ils correspondent à une stagnation.

Au lendemain de la première guerre, l'attraction avait été indéniablement vers le Centre, mais elle joue maintenant en faveur des régions excentriques. L’industrie, libérée du charbon, n'est plus comme autrefois liée au sol, à certains sols, et la crainte nouvelle des bombardements lui déconseille une concentration excessive à l'Est ou au Nord ; il faut ajouter que, le besoin de confort se substituant à l'ascétisme du pionnier, on se résigne de moins en moins aux rudes climats dont les générations antérieures s'étaient contentées. Le XXe siècle n'a pas pour les impératifs de la nature la déférence de son prédécesseur.

II


L'importance respective des diverses régions s'est notablement modifiée dans l'intervalle des deux derniers recensements. En 1940, les dix États les plus peuplés étaient par ordre : New York, Pennsylvanie, Illinois, Ohio, Californie, Texas, Michigan, Massachusetts, New jersey, Maryland. Un 1950, l'ordre n'est plus le même : New York, Californie, Pennsylvanie, Illinois, Ohio, Texas, Michigan, New jersey, Massachusetts, Caroline du Nord. Trois États monstres ont plus de 10 000 000 d'habitants : [p. 52] New York, Californie, Pennsylvanie. La Californie, devançant la Pennsylvanie, l'Illinois et l'Ohio, passe du cinquième au deuxième rang. Si l'Est demeure de beaucoup le foyer démographique le plus dense, l'Extrême-Ouest tend à lui faire contrepoids.

Ce déplacement d'équilibre se répercute politiquement sur la répartition géographique des 531 votes présidentiels (435 sièges de la Chambre des représentants au prorata de la population, plus 96 sièges sénatoriaux à raison de deux par État) : trois États disposent d'un bloc massif de plus de 30 votes (New York 45, Californie et Pennsylvanie chacune 32). Quatre autres États disposent de plus de 20 votes : Illinois 27, Ohio 25, Texas 24, Michigan 20. Dans ces conditions l'Est reste sans doute la source principale des voix, mais, par rapport à 1946, les trois États du Pacifique ont passé de 34 votes à 41, le Sud-Atlantique de 56 à 60. La Californie, qui avait 23 votes, en a maintenant 32, le Washington a passé de 6 à 7, la Floride de 6 à 8, le Texas de 23 à 24. Par contre, New York tombe de 47 à 45, la Pennsylvanie de 35 à 32, l'Illinois de 28 à 27. Ces déplacements sont significatifs d'un changement de centre de gravité démographique, dont le recensement de 1950 nous permet de mesurer la portée.

Le 18 octobre 1951, le bureau du Census a officiellement annoncé par radio que le centre de gravité de la population des États-Unis se situe, en 1950, à 8 milles au Nord-Ouest d'Olney, dans le Sud-Est de l'Illinois, près de la frontière de l'Indiana. En vue du calcul de cette position, le territoire national est considéré comme un plan absolu, les habitants étant supposés avoir tous le même poids : si un pivot pouvait être placé sous ce plan, le centre de gravité serait à l'endroit où le plan serait en équilibre parfait par rapport au pivot ; chaque individu, dans ces conditions, exerce par sa position géographique son influence sur cet équilibre, qui reflète de la sorte, de la façon la plus sensible, les déplacements de population lors de chaque recensement décennal.

Depuis 1790, date du premier calcul, le déplacement a été de 644 milles, le centre initial étant à 23 milles au Nord de Baltimore. Ensuite, le mouvement a toujours été en direction de l'Ouest, se maintenant à peu près sur l'axe du 39e parallèle, avec une tendance peu accentuée vers le Sud : il avait dépassé l'Ohio en 1890, il était en 1940 dans l'Ouest de l'Indiana. Cette orientation persistante correspond au développement de la [p. 53] mise en valeur du continent, dont l'intensité s'est accrue de façon frappante à partir de 1850. Pendant la période décennale de 1850 à 1860, le centre s'est déplacé de 81 milles, passant alors de la Virginie occidentale à l'Ohio. Entre 1940 et 1950, le déplacement a été de 42 milles vers l'Ouest et de 7,6 vers le Sud. Le centre est actuellement au point le plus méridional de toute l'histoire des États-Unis, ce qui prête à des conclusions intéressantes.

La carte industrielle du pays se transforme rapidement. Il n'y a plus, comme antérieurement, de région ayant le monopole de l'industrie : on tend au contraire à produire industriellement partout ; d'autre part, les progrès de la technique agricole permettent la mise en valeur de terrains nouveaux avec une main-d’œuvre réduite, dans des conditions différentes du passé ; telles parties du pays, hier relativement négligées comme le Sud, attirent maintenant l'attention, sont l'objet d'une sorte de colonisation. Ajoutons enfin, comme facteur important du mouvement vers l'Ouest, la répartition industrielle résultant de la guerre, notamment en ce qui concerne l'aviation, la construction navale, l'automobile.

La première guerre mondiale n'avait pas eu cet effet entre 1910 et 1920, le déplacement de centre de gravité vers l'Ouest n'avait été que de 10 milles ; la concentration de l'industrie de guerre s'était opérée principalement sur l'Est et le Centre-Ouest, attirant vers le Nord une importante migration noire. C'est seulement après 1918 que des glissements de population sensibles se sont manifestés vers la côte du Pacifique. Mais cette fois les déplacements ont pris un caractère massif, du fait de la politique qui visait, pour des raisons stratégiques, politiques ou de rendement, à décentraliser systématiquement la production. C'est pour ces raisons que l'Ouest, l'Extrême-Ouest, le Sud pèsent désormais d'un poids dont il faut tenir compte dans l'équilibre, non seulement économique mais politique du pays. Une erreur commune aux voyageurs était déjà de ne pas attribuer au versant du Pacifique une importance suffisante. Cette erreur est devenue impardonnable.

Sans doute le centre de gravité de la population, notion purement théorique, ne donne-t-il pas une idée réelle des conditions économiques et sociales infiniment complexes de son groupement, mais son déplacement persistant est significatif. Entre les deux guerres, le foyer effectif de la puissance industrielle [p. 54] avait passé à la région des Grands Lacs, au cœur même du continent. La tendance est maintenant périphérique, en ce sens que les États qui ont le plus progressé depuis quinze ans ne sont pas ceux du Centre, mais ceux de la côte Pacifique ou du Golfe. Le tout dernier développement industriel est au Texas et dans le bas Mississipi. Il faut probablement signaler, parmi les causes profondes de cette modification d'équilibre, l'ouverture du canal de Panama, qui a permis à des États hier encore excentriques comme la Californie d'entrer en communications directes avec la côte Atlantique et l'Europe et en conséquence de devenir industriels. De ce point de vue, le Centre, surtout si l'on songe que les minerais du Lac Supérieur tendent à s'épuiser, se trouve handicapé par rapport aux régions possédant un front maritime. Cela ne signifie pas que l'Est, zone des capitales, des traditions industrielles et financières, que le Centre-Ouest, expression la plus authentique de la puissance économique américaine, soient en déclin : c'est bien toujours là que reste le foyer animateur. Mais le tableau complémentaire simplifié d'un Est industriel et financier s'opposant à un Ouest agricole et minier a certainement cessé d'être vrai.

[p. 55]

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